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- Membre : Bande Originale De Film

Gabriel YARED - Noir Comme Le Souvenir (mocky) (1995)
Par MARCO STIVELL le 26 Février 2024          Consultée 181 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Noir Comme le Souvenir est assez particulier dans la filmographie de Mocky. C'est un peu comme si le cinéaste traversait une période maudite, étant donné les échecs successifs de Bonsoir puis (nettement plus immérité) Le Mari de Léon, et cela ne va guère s'arranger avec Noir Comme le Souvenir, au titre éloquent. Le roman du même nom (1991) est le premier écrit par Carlene Thompson, spécialiste américaine de polars et proche de Steven Spielberg ; d'elle, Mocky reprendra aussi à son compte Tu Es Si Jolie Ce Soir (1995), en 2015 soit vingt ans plus tard. Pour l'heure, il reste cette histoire glaçante en film qui ne tient ni vraiment de l'enquête policière, ni de la pédophilie et l'enlèvement de mineurs, en tout cas moins que ce qui peut en résulter.

Au début, c'est une fête nocturne communale durant laquelle deux fillettes, dont les parents sont amis, se disputent pour des broutilles. La vigilance des adultes baissant grâce à la liesse et l'alcool, l'une d'elle, Garance, s'éloigne lorsqu'un inconnu déguisé en clown l'invite à la suivre, et elle disparaît – son amie la voit passer ligotée dans une voiture, mais par vengeance infantile, ne dit rien. On retrouve finalement le corps de Garance brûlé et décapité ; l'inspecteur alors chargé de l'enquête, faute de résultats, classe très vite et brusquement celle-ci. Dix-sept ans plus tard, dans la même ville, les parents de Garance sont séparés, la mère ayant refait sa vie et une autre petite fille, mais des meurtres sont commis de façon spectaculaire, notamment sur Pamela, celle qui n'a rien dit.

Un récit dont il est difficile de connaître vraiment l'assassin, selon Mocky. Lui qui a toujours favorisé Paris et la campagne française de tous horizons – de quoi renforcer son importance patrimoniale, rien que pour ça – avec rares exceptions (Solo, 1970, en partie à Anvers), il tourne ici exclusivement en Suisse alémanique et rhénane, à savoir Schaffhouse dans le canton du même nom. Il y a aussi pour des scènes d'hôtel et autres intérieurs un peu de Baden (Argovie, canton voisin), mais les décors de Schaffhouse l'ont marqué, avec notamment un cimetière sous les arbres plongé dans l'ombre même de jour. Peu de scènes 'à la Mocky', à part la fête de l'école, certaines interactions de couples. Jean-Luc Godard aurait pu en être et Fanny Ardant jouer le rôle de la mère, mais ayant refusé, il a échu à Jane Birkin, pour un résultat préférable, moins 'pro' mais plus agréable et sincère.

Sabine Azéma joue l'amie chic et son compagnon flic viril permet à Jean-François Stévenin de marquer autrement les esprits qu'en 1982 lors de Y a-t-il un Français Dans la Salle ? Mais surtout, dans cette distribution en grande partie suisse, outre les Genevoises Vanessa Larré et (une très jeune) Marina Rollman future humoriste, il y a Benoît Régent en docteur, comédien qui montait en flèche alors. Consommateur de drogues, il meurt d'une rupture d'anévrisme le soir même de la dernière journée du tournage de ce film. Mocky (qui, deux semaines avant, a eu lui-même une pneumonie et failli y passer) a certes souvent été présent pour les fins de carrière d'acteurs, on l'a dit déjà, mais là... Il y a donc quelque chose de noir, d'un bout à l'autre de ce long-métrage, qui récolte d'excellentes critiques sans autre succès et reste un des meilleurs de Mocky, avec ne serait-ce qu'une superbe photographie d'Edmond Richard.

Même au niveau musical, la distribution se révèle franco-suisse, avec d'abord Gabriel YARED pour superviser comme il l'avait fait sur trois films en 1987-88 pour Mocky, et qui fait un drôle d'ultime retour tardif. Ensuite, le thème de départ pour la fête de ville provinciale sur les bords du Rhin en pleine nuit est une fanfare au thème léché permettant aux gens de valser. Elle diffère un peu des habituelles entendues chez Mocky - même si celui-ci se (et nous) réserve beaucoup plus tard dans le film de passer en images télé celle de Litan (1982), durant l'un des assassinats -, par son caractère plus viennois. Et pour cause, il s'agit de "Im Kalhenberger Dörfel", 'tube' de l'Autrichien Philipp FARHBACH (contemporain de Johann STRAUSS père durant le XIXème siècle) arrangé par Nicolas Hafner (alors dans le groupe SWISSTET), pianiste genevois spécialiste d'airs populaires adaptés en piano et jazz.

Si Hafner se réserve aussi les chants brefs, masculins puis féminins entendus pendant les enterrements des victimes, YARED se taille la part du lion en créant une mélodie des plus simples, celle que Garance chante au tout début lorsque sa vie bascule. Fredonnement de fillette à l'origine, en 'la la la la', le thème principal s'ancre en tête car il épouse la noirceur et la dureté du film. Avec sa science des claviers et effets, le compositeur use ensuite d'une variation en mettant de l'écho au chant, une grosse nappe sombre et des instruments comme l'alto, les clarinettes ainsi que le clavecin électronique. Cette envolée funèbre, alimentée de mystère, est sans aucun doute l'une des plus justes pour un film de Mocky, voire un film français en dehors des classiques.

On y entend diverses choses, un rock instrumental pour guitar-hero genre Joe SATRIANI, très 90's, lors d'un plan où Azéma et Birkin rentrent ensemble chez cette dernière ; la fanfare de Litan à deux reprises, dénouement compris, et une musique d'enfants pour la fête de l'école, avec flûte solo et ton baroque. Mais le minimalisme à la Mocky fait des merveilles et tout tourne autour de ce thème principal entre la simplicité enfantine et des arrangements d'orfèvre, y compris en termes de programmations.

Il fallait vraiment un apport à la YARED, quitte à ajouter pour ce qui reste une mélodie en mode 'mineur' inquiétant, quelques rajouts en 'majeur' presque joyeux pour le final et le générique. C'est une des petites prouesses humbles qui peut s'adapter à différents registres, comme la douceur innocente lorsque Garance 'réapparaît', voire la version folk 'haletante' durant le meurtre commis aux bains de nuit. Un superbe travail en sons comme en images, même si trop vite tombé dans l'oubli, et Mocky, échappant lui-même à la mort, marqué par celle de l'acteur, prendra sa voiture pour aller seul se ressourcer à Venise, avant de décider de revenir à des films plus légers.

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   MARCO STIVELL

 
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- Gabriel Yared (compositions, orchestrations)
- Nicolas Hafner (arrangements)


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