Le visuel du Mont Matsu, situé sur l’archipel Matsu-Shima l’un des plus beaux paysages du Soleil, Levant prend ici une forme presque enfantine. Tout au fond, à l’instar de certaines illustrations religieuses, le soleil brille de mille feux. La pochette dorsale nous dévoile une prise de vue en noir et blanc d’un paysage forestier dans lequel figurent les quatre membres tous de blanc vêtus, une tenue en droite ligne avec celles des pratiquants de yoga, de tai-chi ou de qi gong, des exercices visant à améliorer l’énergie vitale de tout un chacun.

Contrairement à ce que suggère son nom, YIN YIN, quatuor Electro Pop, est originaire de Maastricht. Le groupe nous délivre ici son 3ème opus édité sous la bannière de Glitterbeat, label qui nous avait déjà permis de découvrir ALTIN GUN.
Enregistré dans un home studio de campagne en Belgique, Mount Matsu nous dévoile une agréable combinaison Electro Pop cosmique dans laquelle le groupe glisse de petits ingrédients issus de la culture asiatique, le tout agrémenté b d’un soupçon de Disco et d’un zest de Soul Funk en droite ligne avec le son de la Stax, le label aux doits qui claquent. Si par rapport à ses deux précédentes galettes, la formation propose un éventail quasi totalement instrumental, la cohésion semble de mise et ce malgré le départ du guitariste organiste Yves Lennertz, remplacé par Erik Bandt en provenance du groupe Diamant.

Si le lapin, l’un des douze animaux représentatifs de l’astrologie chinoise, était déjà décliné et très actif dans le premier album The Rabbit That Hunts The Tiger, c’est encore le cas ici avec "The Year Of The Rabbit", titre d’ouverture qui pourrait s’inscrire entre un disque de Surf Rock genre VENTURES et un générique issu d’un film de Tarantino et plus particulièrement Kill Bill. La guitare surfe sur les intonations d’un luth pipa. Comme on pouvait s’y attendre, le lapin sera remplacé par le tigre en milieu d’album avec "The Year Fo The Tiger", un clin d’œil au premier disque. Si le lapin du titre d’ouverture était virevoltant et peut-être espiègle, notre tigre est un modèle de zenitude reposant sur un curieux mélange de musique traditionnelle et du Shibuya-Kei. Les synthés, la guitare et les percussions rappellent avantageusement le son du yangqin et du bangu.
Bien plus trépidant, "Takahashi Timing" combine lui aussi Electro Pop à une ambiance Disco Vintage. Si les synthés lorgnent parfois sur une sonorité rappelant Computer World de KRAFTWERK, la guitare évoque par moment la subtilité du guqin. Toujours sur une lignée toujours aussi dansante, le pétillant "Pia Dance" se révèle vite aussi obsédant qu’hypnotique, si les claviers et la guitare n’impulsaient pas une ambiance en corrélation avec l’Asie, le titre pourrait s’inscrire dans un album de Giorgio MORODER.

Changement de cap avec "Tam Tam", une petite douceur qui tient autant de la ballade Funk Thaï des années 60 que du Slow Surf. Autre petite douceur, "Komori Uta" débute sur des mesures de boite à musique comme en raffolent les petites filles, la suite offre un curieux mélange entre une musique de type sophrologique dans laquelle viennent se greffer des murmures chantés en japonais dont la douceur tient autant d’un érotisme ambiant que du Shibuya. L’élégant "Shiatsu For Dinner" vient se placer entre une pièce de Jazz tempérée et du Shibuya-Key quasi cosmique. Le genre de titre idéal lors d’une séance de relaxation en droite ligne avec le trio texan Khruangbin.
Nettement plus dynamique, "The Perseverance Of Sano" se range en plein cœur d’un Surf Rock sixties, la guitare pleine de reverb et l’enrobage des claviers nous entrainent à la croisée des chemins entre Dick DALE et l’univers plus Psyché des Trashmen. Comme son titre le suggère, "Tokyo Disko" s’inscrit pleinement entre un Funk Vintage cépage Asie, Electro Pop et un registre Disco évoquant parfois Cerrone. Un titre entrainant et amusant qui n’a d’autre but que de nous faire lever pour se lancer dans la gigue. Si "White Storm" décline par moment une sonorité caractéristique à la musique asiatique, les synthés parviennent à lui donner une orientation New Wave entre Ippu-Do et Man Parrish.
Le Mont Matsu illustré par la pochette vient conclure l’album avec "Ascending To Matsu's Height" par une courte ascension durant laquelle le groupe combine ses synthés avec le son d’un luth, instrument plus traditionnel pour une ambiance brumeuse mais terriblement reposante.

Album quasi instrumental, Mount Matsu n’en demeure pas moins amusant, éclectique et plein de nuances. Si certains titres se rangent dans le rayonnage du Surf Rock, c’est la dominante Electro Pop qui caractérise l’ensemble. La formation hollandaise parvient à impulser une atmosphère dansante et festive associée à de la Soul Funk et du Disco sous des formes aussi débridées que rafraichissantes, presque toutes saupoudrées de gouttes asiatiques du meilleur effet. Si "Shiatsu For Dinner" brille par son élégance, "Tokyo Disko" et "Takahashi Timing" risquent de faire un tabac chez les amateurs de Dancefloor et d’Electro Pop. On retrouve ici certaines inflexions proches de YELLOW MAGIC ORCHESTRA, SPARKS, Gary NUMAN sans oublier des modulations liées à ALTIN GUN, groupe partageant la même écurie.