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ALTIN GüN - Yol (2021)
Par LE KINGBEE le 15 Mars 2021          Consultée 1381 fois

Contrairement à ce que pourrait laisser suggérer son nom, ALTIN GÜN n’est pas originaire de Turquie, ni des Balkans mais des Pays Bas. En 2016, le bassiste Jasper Verhulst découvre lors d’un voyage dans le Bosphore le répertoire d’anciennes gloires locales: la guitariste Selda Bağcan grande figure de la Protest Song Ottomane, le guitariste Erkin Koray pionnier du Rock Psy en Turquie ou Neşet Ertaş l’un des dernier maître de la tradition abdal. De retour aux pays des tulipes, il partage ses découvertes musicales avec deux anciens équipiers, le guitariste Ben Rider et le batteur Nic Mauskovic. Désireux de s’agrandir, le trio passe une annonce pour recruter une chanteuse. La chanteuse Merve Dasdemir devient le quatrième membre du groupe auquel s’adjoignent bientôt le percussionniste batave Gino Groeneveld et Erdinç Ecevit Yıldız joueur de saz, claviériste et chanteur. La formation va faire ses gammes dans les grands festivals européens. On les voit aux Trans Musicales de Rennes en 2017, aux Vieilles Charrues, Route du Rock, Festival International de Jazz de Montréal, à Paris à la Cigale.
En 2018, la formation enregistre un premier disque édité par le label suisse Bongo Joe. Mauskovic quitte le groupe et tente une carrière en solo, remplacé par Daniel Smienk. L’année suivante le sextuor enregistre un second disque pour ATO Records, label qui avait édité ALABAMA SHAKES, KING GIZZARD et plus récemment Brittany Howard. Malheureusement, suite à la pandémie liée au Covid-19, la formation qui disposait alors d’un agenda bien garni se retrouve démuni, comme si on lui avait coupé ses ailes, à l’image d’innombrables groupes.

Au milieu des années 60, Hurriyet, un journal de l’ancienne Constantinople, organise l’Altin Mikrofon, traduisible par Micro d’ Or. Il s’agit ni plus ni moins d’un concours comme il en fleurit depuis deux décennies sur les ondes hertziennes. Le principe de l’émission est alors axé dans un mélange de musique traditionnelle et l’incorporation de nouvelles sonorités et d’instruments occidentaux. Cette émission aura contribué à révéler Cem Karaca, l’un des pionniers du Rock anatolien, exilé en Allemagne après le coup d’état de 1980. Le but avoué du concours était de faire cohabiter le Folklore et le Rock afin que les chansons traditionnelles ne se perdent pas. La démarche d’Altin Gün est certes différente, Jasper Verhulst ne parlant pas turc et n’ayant aucune racine avec la musique ottomane, mais le principe s’avère transverse. Tous les morceaux issus du traditionnel sont examinés à la loupe par Merve et Erdinç, tandis que les compositions et les diverses variantes issues de chants anciens proviennent de leurs plumes.

Cette fois ci, c’est sur le label allemand Glitterbeat qu’on retrouve le groupe. Firme spécialisée principalement dans la musique africaine et multi folklorique, connue pour avoir publié l’ensemble touareg Tamikrest ou Bassekou Kouyaté, Glitterbeat semble avoir fait les choses en grand pour promouvoir son nouveau poulain.

Altin Gün, qu’on peut traduire par Age d’Or, propose ici une belle invitation au voyage et dans le temps. "Yol" titre de l’album n’étant autre que la traduction du mot Chemin, et autant dire que la formation va nous faire emprunter ici de nombreux chemins de traverse. L’album s’ouvre sur "Bahçada Yeşil Çınar", sorte de mise en bouche d’une trentaine de secondes. A l’instar de certains interludes, la chanteuse et le saz électrique servent de rampe de lancement. Jusqu’alors utilisés avec parcimonie dans les albums précédents colorés de fortes teintes Rock Psy, les claviers s’offrent une belle entrée en matière sur "Ordunun Dereleri" en contrepoint d’un bruitage de circulation sur une autoroute. Comme le titre d’ouverture, il s’agit encore d’un titre pioché dans le folklore, une chanson reprise de génération en génération. La chanteuse Ilkay Akkaya, Ümit Tokcan ou Ali Riza Gündogdu ont placé le titre en bonne place dans leur répertoire.

Important changement de cap avec "Bulunur Mu", une compo de Neşet Ertaş remontant aux sixties. Si la chanson a traversé les décennies via Zerrin Zeren, Gülşen Kutlu, Köksal Bayram, Altin Gün nous réexpédie à l’orée des eighties et de la New Wave. Les claviers s’éloignent de la Mosquée Bleue pour prendre une couleur beaucoup plus froide en connotation avec un synthétisme que ne renierait pas MARTHA & The MUFFINS ou TALKING HEADS. Si le rythme s’avère primesautier, la combinaison entre les claviers, la guitare et la voix de Merve Dasdemir est une réussite aussi simple que totale. Œuvre de Çekiç Ali, grand artisan du registre bolzak et virtuose du saz, "Hey Nari" s’écarte avantageusement du traditionnel avec une basse pleine de groove et de rondeurs, un saz électrique et des percussions qui impriment un rythme superbement dansant.

Seconde claque au niveau du dépaysement avec "Yüce Dağ Başında", un traditionnel repris à la sauce Electro Pop. Là, la guitare rappelle celle de Ric Ocasek (The CARS), les claviers ceux de SOFT CELL, mais les coups de grâce sont donnés par l’envoutante voix de la chanteuse, tour à tour mutine ou espiègle et les envolées de mélodica, une vraie trouvaille. Autre titre tiré du répertoire de Neşet Ertaş, "Kesik çayir" débute par le bruit inattendu d’un petit volatile suivi des percussions locales, les claviers bien synthétiques prennent le relai tandis que le chant toujours aussi envoûtant nous emmène sur les rives du Bosphore. Si ce n’était un sobre fond sonore de clavier et de percussions s’apparentant au bruit du vent ou au doux flot d’un ruisseau Merve pourrait presque être accréditée d’un titre a capella avec "Arda Boylari", une douce et poétique ballade tirée du traditionnel. Vieille chanson du chanteur poète Asik Veysel, "Kara Toprak" se révèle peut être moins inventive mais cette douce ballade Synthé Pop parvient à nous bercer. Il suffira de fermer les yeux pour se croire au bord de l’Euphrate. Le danois Jacob Gurevitsch, un adepte de la guitare flamenca et du synthé a récemment repris le titre.

Autre emprunt à Neşet Ertaş avec "Sevda Olmasaydi". Le groupe nous assène encore une claque transformant une pièce folklorique pour saz et baglama en un Rock Psy redoutable d’autant qu’il a la sagesse de ne pas s’éterniser. La symbiose entre les différents instruments éclate encore au grand jour. Mention à "Maçka Yolları", un autre trad., avec sa guitare funky, sa basse bien ronde et ce saz imparable qui nous ramène à une encablure de l’Anatolie. "Yekte", un Rock Psy chanté durant les seventies par Alpay, offre ici une belle fusion entre tradition anatoliennes et Pop Psy, les percussions instaurent un rythme dansant d’où émerge le saz électrique. C’est une chanson célébrée lors des fêtes de villages de mariage ou des repas de famille qui conclut l’album avec « Esmerim Güzelim », mais Altin Gün prend la partie de ralentir la cadence, la voix de Merve se pose sous des volutes de claviers et d’une batterie synthétique.
Deux ou trois pistes pourraient vaguement évoquer la toulousaine JAIN, mais ce qui sonnait opportuniste et artificiel chez la française soudainement portée aux nues par une boite de prod et certains médias rapides à dégainer, sonne ici extrêmement juste et sincère. Le rythme et les nuances ne faiblissent jamais.

Si "Ordunun Dereleri" semble avoir la préférence de nombreux programmateurs radio, ce titre est loin de cacher la foret. Celle-ci regorge d’une faune captivante et de nombreuses petites pépites dont les reflets et nuances changent suivant la position du soleil. Plein de fraîcheur, « Yol » nous offre une superbe invitation au voyage. Entre les canaux d’Amsterdam et la vaste Anatolie, Altin Gün s’est crée un véritable pont qu’il sera facile d’enjamber pour peu que vous soit open et avide de nouvelles sonorités. La fusion entre la guitare, la basse et le saz d’orientation plus orientale procure de superbes variations, l’ajout surprenant d’une Synthé-Pop propose un mariage inattendu qui risque de durer longtemps. Un éclat de fraicheur dans lequel les voix de Merve Dasdemir et d’Erdinç Ecevit Yıldız se succèdent pour notre plus grand plaisir. Cette bouffée d’oxygène sera classée en Pop. Avis aux curieux, Arte Concert diffuse un show d’une quarantaine de minutes.


NDA : mes remerciements à Kemal "Tuk Tuk" pour avoir apporté ses lumières sur le folklore anatolien.

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   LE KINGBEE

 
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- Merve Dasdemir (chant, claviers, tambourin)
- Erdinç Ecevit Yıldız (chant, saz électrique, mélodica, claviers)
- Jasper Verhulst (basse)
- Ben Rider (guitare)
- Daniel Smienk (batterie)
- Gino Groeneveld (percussions)


1. Bahçada Yeşil Çınar
2. Ordunun Dereleri
3. Bulunur Mu
4. Hey Nari
5. Yüce Dağ Başında
6. Kesik Çayır
7. Arda Boyları
8. Kara Toprak
9. Sevda Olmasaydı
10. Maçka Yolları
11. Yekte
12. Esmerim Güzelim



             



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