A l’heure d’attaquer un des grands de la New Wave, une petite précision : nous verrons l’histoire du groupe avec le déroulement logique de sa discographie, comme il se doit. Contentez-vous de savoir que le groupe eut son heure de succès dans la première moitié des eighties et qu’il évolue toujours autour des mêmes personnalités dont le chanteur Robbie Grey et le guitariste Gary McDowell. Les anglais sudistes de Colchester restent actifs depuis leurs divers retours et se portent plutôt bien, et ceci est leur seulement neuvième opus.

La new-wave pratiquée par MODERN ENGLISH est de première génération, celle qui se créait juste après les mouvements Punk et que TELEVISION et les TALKING HEADS ont popularisée. Le son est bien rentre-dedans sur "Long In The Tooth" avec de jolies digressions au synthés. Nous traversons l’Atlantique après cette introduction pour émuler les ambiances des OMD sur "Not My Leader" si ce n’est cette surprenante gratte déglinguée sur un refrain bien boosté aux amphet ! On jurerait les CURE sur "I Know Your Soul", avec un refrain aux jolies notes cristallines. Puis, "Exploding" nous envoie sur orbite avec une basse fantomatique, un chant robotique et une ambiance très science-fictionnaire, très expérimentale. On félicite nos sexagénaires pour une si belle offrande.

Du très lourd ? Sequencers dynamique, basse à la Youth et guitares rageuses s’associent pour faire de "Plastic" un titre étonnant de bout en bout, un état d’esprit qui doit tout au punk avec un message accusateur pour nos belles sociétés. La guitare distorsionnée tonne avec bonheur, le chant de Robbie est répétitif à souhait et la mélodie se joue sur 3 notes, mais le résultat final transcende magnifiquement les années pour nous faire revivre en 83 et les élans cold wave de l‘époque. Chers camarades quincas, à vos ordis pour cette petite perle ! La basse ondoyante de "Out To Lunch" se marie magnifiquement avec une guitare bien agressive mais tantôt aérienne, le chant linéaire de Robbie et les effets spéciaux qui vont bien avec et nous plonge dans la transe du début des eighties, c’est l’éclate ! Il y a des années de savoir faire là derrière, c’est l'évidence comme si la simplicité était restée de mise depuis tout ce temps. Nous sommes presque drone, et d’une redoutable efficacité.

D’une voix proche de celle d’un MORRISSEY à la base, nous voici avec entre les mains un organe vocal de Robbie plutôt juvénile et innocent. "Crazy Lovers" se signale par une jolie basse et une structure très monolithique. La reverb' et l’aspect aquatique du slow "Voices" ne sont pas désagréables mais ce retour en arrière est vraiment fort bien effectué. Je me demande comment les oreilles des années 20 réagissent à pareille musique. On pense aux SIMPLE MINDS sur "Not Fake", il s’agit d’un véritable maëlstrom de new-wave, ö combien étonnant pour nos vieilles années 20 ! Il y a à nouveau du punk bien raw dans la rythmique de "Genius", agrémentée des synthés bien pompiers de Stephen Walker, c’est magnifiquement répétitif, on croirait presque les BOLLOCKS BROTHERS dans l’idée.

Et me voici complètement surpris par cette plongée en apnée dans la musique de ma jeune adolescence, les gars ! Et tout ça sans être prévenu au préalable ! Je vous jure non mais quelle prise de risque ! Un album de très bonne qualité qu’il convient d’écouter avec attention tant son champ d’expérimentation est vaste, tout en restant circonscrit à le New-wave. Plusieurs titres atteignent l’excellence dont ce damné "Plastic" et le fumeux "Out Of Lunch". Je n’hésite donc pas à poser un 4 pour nos vieilles branches des eighties.