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POST-PUNK/GOTHIQUE  |  STUDIO

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1981 Fiction Tales

MODERN EON - Fiction Tales (1981)
Par K-ZEN le 21 Septembre 2024          Consultée 154 fois

L’explosion du punk à la fin des années 70 remit les compteurs à zéro en termes de virtuosité musicale.

En effet, les jeunes punks, en quête de musique plus abordable rejetèrent le progressif et les autres dinosaures du rock tels PINK FLOYD, on se souvient du célèbre t-shirt qu’arborait Johnny ROTTEN. Si bien qu’après une brève période où les deux genres coexistèrent – citons Going for the One de YES ou Animals comme produits de cohabitation –, ils disparurent des radars, le punk consumé par ses contradictions et dévoré par ses propres enfants plus doués que lui. Le prog, lui, ne tarderait pas à renaître via l’appellation neo-prog, que les talentueux MARILLION incarneront dès le début des années 80.

Dès 1978, certains n’avaient toutefois pas attendu pour concevoir une musique innovante. Qu’ils soient neufs et nourris par la première vague punk ou pas, les groupes américains ne se contentaient pas de suivre le mouvement et proposaient quelque chose de réellement inédit et attrayant. En Europe aussi, des mastodontes se projetaient dans le futur avec brio. Bien implanté à Berlin, BOWIE ne tarderait pas à sortir sa trilogie dont le qualificatif porterait le nom de la ville allemande, Brian ENO et Robert FRIPP l’accompagnant dans sa tâche. Le guitariste, libéré du carcan KING CRIMSON, produirait Exposure, disque new wave avant l’heure sur lequel Peter GABRIEL serait invité, le chanteur explorant un chemin personnel et bientôt world music suivant son départ de GENESIS. Des rythmes africains qui seraient aussi infusés sur My Life in the Bush of Ghosts, collaboration entre ENO et le leader des TALKING HEADS David BYRNE.

Toutes ces expérimentations serviraient de catalyseur à une scène britannique devant à nouveau se réinventer. Ce que l’on nomma new wave déplaça l’épicentre musical hors de la capitale, actant une recomposition de puzzle complexe. Manchester pouvait aisément revendiquer ce titre via le label Factory qui commençait à forger une identité musicale et visuelle forte en éditant des réalisations originales mais les nouveaux talents se trouvaient également à Sheffield (The COMSAT ANGELS), en Écosse (AZTEC CAMERA ou le premier groupe d’un jeune Edwin COLLINS ORANGE JUICE), ou encore Liverpool. Outre les talentueux ECHO & THE BUNNYMEN et TEARDROP EXPLODES mis en avant au Eric’s Club en même temps que d’autres formations du nord-ouest, le secret le mieux gardé de la patrie des BEATLES se nommait MODERN EON.

Se nommant initialement LUGLO SLUGS, le groupe émerge en 1978, jouant dans des clubs liverpuldiens et s’agrégeant pleinement à l’explosion punk ambiante. Se faisant remarquer via une compilation relatant la scène locale, ils changent rapidement de nom et publient sur leur propre label l’EP Pieces en 1979, préfiguration de leur évolution à venir. Après un single édité chez Inevitable en novembre 1980, on les retrouve sur la filiale Din Disc de Virgin – gérant déjà les ORCHESTRAL MANŒUVRES IN THE DARK – qui sortira leur premier longue-durée Fiction Tales en 1981.

Co-produit par la formation, stabilisée à cet instant précis autour de Alex CHE JOHNSON dit Alix chanteur et guitariste, du bassiste Danny HAMPSON auxquels s’agrègent l’artiste Bob WAKELIN aux claviers, Tim LEVER au saxophone ténor et guitare et Cliff HEWITT à la batterie, l’album bénéficie d’une jaquette réalisée par l’atelier Koninck, œuvre remarquable mettant en scène ce qu’il semble être un primate babouinesque comme émergeant d’un brouillard métallique et fixant d’un regard inquisiteur mais fatigué l’auditeur curieux. Les inscriptions fixant les crédits, similaires au Marble Index de NICO, ne parviennent pas à lever complètement le mystère, renforçant la curiosité à l’égard d’un objet diablement unique, sens propre qui sera finalement entériné rapidement.

Car MODERN EON produit une musique avec peu d’équivalents britanniques. La basse bulldozer et la batterie tribale la rapprochent en premier lieu logiquement du post-punk tel que le pratiquent The CURE ou JOY DIVISION, tout comme cet aspect solennel se dégageant de certaines pièces (terrible "Second Still" en apéritif). Cependant, le saxophone et les vocaux flamboyants dispensés par ALIX, sorte de Marc BOLAN plaintif s’échappant d’une épaisse brume, amènent une coloration particulière, renforçant des influences puisant jusqu’aux climats poisseux du dangereux Far West de Ennio MORRICONE directement cités via "Waiting for the Cavalry" ou "High Noon". Le compositeur italien avait d’ailleurs été contacté en vue d’assumer la production mais il refusa, arguant qu’il ne travaillait pas avec les groupes de rock. Dans une moindre mesure, WALL OF VOODOO se tient très proche également.

Lyriquement, les grands espaces convoqués par ALIX sont ceux de la psychologie et de l’imagination à l’instar de son intitulé le sous-entendant habilement. Ainsi "Real Hymn" cherche avec langueur du côté de Jung quand le fantastique "Euthenics" emprunte son nom à un mouvement sociologique du début du vingtième siècle tout en évoquant immanquablement NEW ORDER. "The Grass Still Grows" traite d’écologie bien avant que le sujet ne devienne le combat du nouveau millénaire.

Rapidement après la sortie de Fiction Tales, le groupe sent déjà qu’il arrive à la fin d’un cycle. Quelques morceaux sont enregistrés en tant que démos pour un hypothétique deuxième disque qui ne verra jamais le jour. Parmi ces morceaux, l’hypnotique "After the Party" livrant des lignes prémonitoires telles que Après la fête, il y aura… Du silence.

Tels Nick DRAKE ou T2 dans d’autres genres, l’héritage de MODERN EON commence à être bien établi, celui-ci se basant uniquement sur des considérations musicales. En témoigne cette réédition de Fiction Tales opérée en 2022 par Cherry Red compilant tous leurs travaux et permettant de redécouvrir ce groupe unique, le deuxième disque livrant des titres aussi décisifs que "Cardinal Signs" ou "Visionary", pièce fataliste où semble pleinement à l’œuvre la main noire du destin.

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- Alex 'alix' Che Johnson (chant, guitare, piano, suona)
- Danny Hampson (basse)
- Bob Wakelin (claviers, cordes, chant, percussions)
- Tim Lever (guitare, saxophone)
- Cliff Hewitt (batterie, timbales)


1. Second Still
2. The Grass Still Grows
3. Playwrite
4. Watching The Dancers
5. Real Hymn
6. Waiting For The Cavalry
7. High Noon
8. Child’s Play
9. Choreography
10. Euthenics
11. In A Strange Way
12. Mechanic



             



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