Tout a déjà été dit et plutôt bien dit à propos de Wish You Were Here, neuvième album studio de PINK FLOYD et pièce légendaire, s’il en est. Au sens premier du terme, au vu de ses ventes faramineuses (disque d’Or au Royaume-Uni et de Diamant en France) mais aussi de l’unanimité qu’il semble faire auprès des critiques et même des musiciens impliqués eux-mêmes dans son élaboration. Le critique Robert Christgau ainsi que le guitariste David GILMOUR lui-même déclarèrent ainsi qu’il s’agissait de leur album préféré composé par le groupe britannique.

C’est également une plaque ayant donné lieu aux fantasmes les plus fous, en premier lieu concernant Syd BARRETT. On se souvient des anecdotes relatant l’apparition spectrale dans les studios d’EMI de l’éphémère leader du FLOYD un beau jour de juin 1975 sous une forme physique radicalement différente de celle qu’il arborait plus jeune. Le mythe voudrait que le groupe enregistrât justement "Shine on You Crazy Diamond" à cet instant précis. Invocation surnaturelle ou simple coïncidence ? Cet épisode troublant semble avoir durablement marqué le quatuor, renforçant sa volonté d’élaborer un disque parfois réellement anxiogène où l’absent joue un rôle majeur.

Quarante ans après la sortie de ce monument, quelle légitimité voire utilité à ce projet Pink Floyd’s Wish You Were Here Symphonic ? Quelle volonté matérialisée alors, en plus d’un respectueux hommage à une œuvre majeure, par son géniteur Pete Smith ? Son but est ici de donner une suite à l’observation qu’avait tenue Christgau via sa critique de l’œuvre originale. Il y parlait d’une musique avec une âme et une dignité symphonique.

On peut dire que le producteur a eu le nez creux, il n’en était toutefois pas à son coup d’essai, ayant participé à Us and Them : Symphonic Pink Floyd. Il est incontestable que la musique de PINK FLOYD possède un potentiel symphonique remarquable. On l’avait déjà remarqué sur quelques extraits imprégnés de classique, comme "Atom Heart Mother" bien sûr qui, en outre, ne se privait pas de proposer une durée imposante, une constante pour un FLOYD peu effrayé à l’idée de s’affranchir du calibrage temporel pop typique. Le groupe s’inscrivait ainsi dans les pas des œuvres classiques prenant le temps de se mettre en place avant de pleinement se déployer telles les versions interminables d’"Interstellar Overdrive" qui pouvaient parfois atteindre l’heure au cours de leurs premiers concerts.

Pour ce projet, Smith réunit des collaborateurs du monde entier, à commencer par le chef d’orchestre néo-zélandais Peter SCHOLES qui arrangea la musique et conduisit l’enregistrement. Dave FOWLER et Stephen McELROY furent également conviés, deux figures familières du FLOYD qui se produisirent dans The AUSTRALIAN PINK FLOYD SHOW ainsi qu’Alice COOPER. Le chantre du shock-rock posa son timbre si particulier sur un titre éponyme pratiquant quelque peu le mélange des genres ainsi que sur l’étouffant "Welcome to the Machine" où il parvint à transmettre l’entière paranoïa d’un titre conservant son suspense angoissant.

Ailleurs, les deux pièces de choix "Shine On" se prêtent bien au jeu de l’orchestre, le LONDON ORION ORCHESTRA exacerbant la gravité d’instants troublants emplis d’émotion. "Have a Cigar", malgré l’ironie mordante du chant de Roy HARPER absente, fonctionne malgré tout, mieux que la seconde éponyme tout de même fort jolie.

Pink Floyd’s Wish You Were Here Symphonic ne surpasse évidemment pas son mythique grand frère mais il offre une relecture savoureuse et inédite permettant de redécouvrir les recoins cachés de chansons que l’on pensait connaître jusqu’à la moindre note.