SPACECRAFT est le duo formé par le guitariste Ivan Coaquette, issu des formations MUSICA ELETTRONICA VIVA, CLEARLIGHT SYMPHONY et DELIRED CHAMELEON FAMILY, et le claviériste John Livengood, ayant participé au projet RED NOUSE de Patrick VIAN. Ils ont enregistré ensemble, entre 1975 et 1977, de la musique qui constitua un unique album autoproduit en 1978, réédité en CD en 1995 par Spalax puis en vinyle en 2012 par Wah Wah Records.

Paradoxe consiste en trois suites électroniques semi-improvisées enrichies de guitare, ce qui a en principe toutes les chances de ressembler à du HELDON mais s’en différencie par un traitement différent des riffs, beaucoup moins unis chez SPACECRAFT, et sans séquençage en tant que tel. C’est plutôt du côté du III (1977) de LARD FREE qu’il faut chercher des similitudes. Une autre particularité de l’album de SPACECRAFT est que la plupart des pistes sont introduites sur un canal stéréo et répétées sur l’autre avec un délai de plusieurs secondes, ce qui permet au duo de doubler une ligne de piano électrique ternaire sur "Cosmic Wheel" à la manière de Pascal COMELADE ou d’harmoniser des soli de guitare. Cet artifice de studio n’est pas inédit mais rarement il a été aussi largement mis en œuvre sur une musique aussi dense, à la différence des travaux de Robert FRIPP sur No Pussyfooting (1973), Let The Power Fall (1981) et la série des Soundscapes, beaucoup plus ambiant et dépourvus de synthétiseur.

Si on doit parler de cet album par le menu, disons que la première face contient la plus longue suite, largement dominée par "Cosmic Wheel", envoûtant enchevêtrement de riffs électroniques et de soli de guitares ou de synthétiseur, faisant suite à l’introduction planante "Lumière De Lune" et précédant le dissonant "Chromatique One’s". La seconde face est donc occupée par les deux autres suites, de longueur similaire. "Harabizant" est marqué par le contraste d’une boîte à rythmes impassible cadrant des guitares erratiques. Enfin, viennent "Ananda" et "Surface", ce dernier morceau étant en fait constitué de deux sous-parties distinctes. Nous avons donc un second triptyque : une plage rythmée encadrée par une introduction calme et une conclusion lunaire.

La réédition CD se termine sur une piste bonus, une prise live de 1973 d’une dizaine de minutes, probablement du fait de John Livengood seul aux claviers et effets sonores. "Pays De Glace" est un paysage sonore statique dont la froideur et l’hermétisme jurent beaucoup avec le reste. Paradoxe ne connaîtra pas de suite directe mais John Livengood et Ivan Coaquette vont chacun de leur côté réaliser quelques albums supplémentaires.