Dans le hip-hop féminin, il manquait à FP l’une des figures de proue du genre, celle qu’on surnomme la reine du hip-hop soul, j’ai nommé Mary J. BLIGE. Depuis plus de trois décennies, Mary Jane s’y est frayée une place à part : elle n’est pas rappeuse et pourtant, elle a influencé le genre en collaborant année après année avec des acteurs majeurs du rap game, de JAY-Z à NAS en passant par Lil KIM et Method MAN.

La sortie de Gratitude, son quinzième album en novembre 2024 est l’occasion de mettre en avant la carrière de cette chanteuse qui sait mêler le côté authentique du hip-hop aux émotions à fleur de peau qu’on retrouve dans le R&B.

Quatres collègues du rap game sont invités chez Mary, tous venus tout droit de New York : Fat JOE, FERG, JADAKISS et FABOLOUS. L’originaire du Bronx a la East Coast dans la peau et ses choix démontrent cette loyauté sans faille, que ce soit sur "God’s Child" où les passages chantés par Big Mary sont bien plus mélodieux que le rap de Fat JOE, ou sur le titre plus léger "I Got Plans" dans lequel sa voix s’allie joliment à celle d’un rappeur d’une génération nouvelle, FERG, membre du collectif A$AP Mob.

Le single "Breathing" est une collab’ plutôt cool avec FABOLOUS. On sample "I Put A Spell On You", on ajoute des percussions très hip-hop et le tour est joué, le titre a juste ce qu’il faut pour nous faire vibrer doucement vers le groove sensuel du featuring "Need You More" avec JADAKISS. Les influences 90’s sont toujours bien présentes, presque dans son jus. La voix de Mary, empreinte de soul, reste encore aussi puissante qu’avant.

Qu’elle passe d’une vibe funk-disco sur "Never Give Up On Me" ou en chantant avec des tonalités plus rauques sur "Can’t Wait For You", la chanteuse prend chaque challenge pour une leçon dont elle en ressort reconnaissante, pas de quoi en faire tout un fromage mais on profite de l’instant avec Mary sans trop se poser de questions. Les arrangements et la mélodie sont plus aériennes sur le sublime "Superpowers" et il faut évidemment supporter les sempiternelles chialantes "Nobody But You" ainsi que "Here I Am". Allez, c’est pour la bonne cause que je les écoute mais vous pouvez passer votre chemin sans aucun regret concernant ces deux morceaux.

Le single "You Ain’t The Only One" est peut-être le seul titre (hormis les deux chialantes) qui a fini par me donner envie de me taper la tête contre les murs malgré - ou à cause - de ce côté festif un peu too much qui a tendance à me lasser trop facilement. Niveau voix, Mary n’en fait jamais trop au point de nous fâcher et "Beautiful People", une chanson qui touche à un son vraiment classique, montre exactement cette maîtrise et cette sobriété stylistique qui continue de dominer sa carrière. Plus rythmée, "Don’t Fuck Up" traduit également cet aspect de l’oeuvre de BLIGE, incarnée par une discrétion et une résilience fortes.

Qu’est-ce qu’on peut bien se dire à l’écoute de ce nouvel opus de Big Mary ? Qu’elle a certainement peaufiné et parfait sa recette avec les années et qu’elle est à l’aise dans sa zone de confort. Malgré ça, le style de BLIGE est indémodable et elle, eh bien, elle n’est ni fatiguée ni fatigante, ce qui vaut à cet album un joli 3,5. Loin d’être une mauvaise note, c’est davantage le fait qu’elle peine à nous surprendre, mais à 53 ans, l’emblématique Mary J. BLIGE peut effectivement continuer de porter le titre de reine du hip-hop soul avec fierté.