Est-ce que la survie des musiques sombres passera par la passion un peu folle et sans faille de petites structures qui continueront de croire en leur bonne étoile et en des artistes de l'underground ? Il faut croire que c'est exactement la mission que s'est donnée Wave Records le label brésilien pour que ne disparaisse pas justement ce style. Grâce à ce dernier, des groupes originaires du Brésil, naturellement, mais aussi de France, Russie ou Grèce peuvent traverser les océans et arriver quasiment comme par miracle en Normandie et partout ailleurs. PORCELAIN DANCER en est un exemple probant et rassurant. Ce tout nouveau projet s'incarne donc en une seule et même personne : le Grec Ioannis Diakoumakos.

Les mondes gothiques dans ce pays existent mais, à la différence de la sphère metal, ils demeurent encore et sûrement pour toujours malheureusement ultra-confidentiels. Ils peinent à sortir de leurs frontières. La grande tête de pont demeure à ce jour le duo qu'est SELOFAN et qui à travers de solides albums a réussi à faire entendre ses mots et ses notes à un public un petit moins restreint qu'à l'accoutumée. Espérons simplement qu'il en sera de même avec PORCELAIN DANCER. Sainte Rita des cimetières, on ne sait jamais, si tu nous lis ! Le Grec en exposant A Documentary About Nightmares ne manque pas en effet aux premières écoutes d'arguments.

Balayons toutefois dès à présent tout espoir de grand changement et d'apport exceptionnel aux musiques souterraines. Ces huit titres, s'ils n'exposent rien de fondamentalement nouveau et d'excitant au plus haut point, ne sont pas pour autant sans saveur. PORCELAIN DANCER gravite ainsi majoritairement dans les eaux d'une cold wave que l'on pourrait décrire comme classique. Classique, oui, mais avec ici et là des petits détails (cette alternance cold – dark wave) qui rendent l'ensemble moins consommation courante et qui permettront sans doute aux amoureux du genre d'effectuer un temps d'arrêt. Les titres, certes un peu cliché, et la pochette devront l'aider à franchir le pas sans problème majeur.

PORCELAIN DANCER pour composer ses titres s'abreuve directement à cette fameuse source toujours sertie de cette même glace. Il ne faut pas dès lors s'étonner d'y retrouver les habituelles composantes. Ainsi, sur les excellents "Poison Cloud" et "He Burns", une voix sortant des entrailles de la Terre se voit soutenue par une guitare cristalline et des claviers qui martèlent un rythme implacable. Je ne vous parle même pas de la basse lourde à souhait, véritable ossature de l'ensemble, qui ne faiblit pas une seule seconde ("Broken Doll"). Évidemment, l'auditeur rassuré est en terrain connu, convenablement balisé. Mais lorsque c'est agencé ainsi, où est objectivement le mal ?

Le Grec, genre oblige, réussit à insuffler une belle linéarité spleenesque à cet ensemble bien gris. Attention, je n'ai pas dit monotonie, ni ennui ! Ainsi les lentes processions que forment "Porcelain Crow" et "Nightmare" tout en échos fantomatiques appellent et rappellent une forme de recueillement comme a pu le faire le Faith de THE CURE il y a plus de quatre décennies. Les rires ne seront pas évidemment de mise pour aujourd'hui. Alors, parfois, Diakoumakos porte son regard vers des terres tout aussi froides mais moins désolées. Il opte dès lors pour des sonorités dark wave que souligne un beau travail sur les claviers. Ce n'est naturellement pas ambiance Macumba mais "High Water" aux effluves CLAN OF XYMOX ou le plus enlevé "I´ll Kiss You In The Darkness" créeront assurément quelques mouvements dans votre corps de petit corvidé.

A Documentary About Nightmares, s'il innove pas, est cependant un bon disque de musique sombre. Ténébreux à souhait, il utilise globalement les canons du genre avec efficacité. PORCELAIN DANCER à travers ce premier album fait aussi et surtout perdurer ce genre à la santé fragile. Qu'il en soit ainsi chaudement remercié !

Note réelle : 3,5/5