Le moins que l'on puisse dire, c'est que Dirk Knight, la tête pensante de SEASURFER, ne chôme vraiment pas. A peine trois ans après la parution du superbe Dive In, le revoici en effet pour nous proposer Under The Milkyway... Who Cares. Vous pourriez me rétorquer que trois ans, ce n'est pas un délai si court, mais dans le monde de l'underground accompagné de sa cohorte de contraintes multiples, ceci relève à l'évidence quand même d'un petit exploit. L'Allemand développe de nouveau cette idée d'invitation au féminin. Ce n'est plus l'androgyne berlinoise Dorian E mais Julia Beyer bien connue pour être la chanteuse de CHANDEEN (projet Heavenly Voices de Francfort) qui cette fois-ci posera sa voix sur ces dix titres tout en tension aérienne.

Cette idée de ne pas se cantonner à une même chanteuse à chaque nouvel album est une belle et riche idée car la réception en est naturellement différente. Le timbre de Beyer que j'ai toujours beaucoup aimé est particulièrement doux. Il s'avère être un parfait contrepoint à l'énergie électrique parfois brute déployée par Knight. D'énergie, cet opus n'en manque à l'évidence vraiment pas. Le temps des moments uniquement évanescents semblent déjà bien loin. C'est tout à l'honneur de SEASURFER que de se renouveler et ceci débute fort avec "Tricolore", l'introductif rageur que viennent ponctuer les mots du poème de BAUDELAIRE Le Calumet de la Paix. Plus de Guerre, Plus de Sang s'époumone pour une fois Beyer. C'est entendu !

Under The Milkyway démontre donc une nouvelle fois que Knight maîtrise parfaitement ses gammes et réussit à élaborer un efficace mur du son du plus bel effet à l'image des excellents "The Roads We Take" et "Symétrie" qui vous enveloppent progressivement par leur pesanteur. Ce qui est assurément plaisant à l'écoute de cette Voie lactée, c'est la richesse de l'éventail sonore proposé par les Allemands. SEASURFER brouille ainsi malicieusement les pistes et l'auditeur y entendra un convaincant mélange entre autres d'effluves shoegaze, dreampop ou electro, le tout parfois dans un seul titre ("If You Leave"). Cette diversité appréciable n'éparpille pas pour autant le propos car le projet nous invite toujours en définitive à la même chose: au rêve et il est difficile d'y résister.

Julia Beyer contribue pleinement à ce voyage le plus souvent vaporeux. Sa voix possède un charme enchanteur. Elle est de celle qui de prime abord ne marque peut-être pas mais la subtile douceur de son timbre sur le long terme fait indubitablement son petit effet ("Too Late for Goodbyes"). Elle est un discret échos à une certaine musique indépendante des années 90 ("Falling") ou à celle rappelant les timbres angéliques qui s'élevaient il y a près de quatre décennies comme l'émouvant "Daydream" qui semble littéralement retenir le temps. SEASURFER ne se la joue pas pour autant revival. Knight est pleinement de et dans notre temps. Efficaces en diables, ses mélodies s'articulent autour de guitares cristallines, de claviers aériens (le superbe "Trust the Path Unseen") mais pas que. La lave couve toujours et ne demande qu'à exploser comme le souligne "Confusion" qui illustre parfaitement le concept dreampunk du projet.

Under The Milkyway... Who Cares est donc une réussite totale. Les amoureux d'ambiances amples et riches en émotions seront naturellement aux anges. Les plus curieux d'entre vous pourront également tenter l'aventure, ne serait-ce que pour toucher un moment ces superbes étoiles.