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2002 P.H. Test/Two
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Le PEUPLE DE L'HERBE - P.h. Test/two (2002)
Par DARK PANDA le 30 Juin 2010          Consultée 3344 fois

Le PEUPLE DE L'HERBE. Tout un programme. Mais le groupe mérite amplement son nom, tant il foisonne à l’image d’une pelouse en friche et dénote d’un goût pour la substance même de la drogue, cette ivresse folle aux couleurs d’arc-en-ciel, qui parcoure inlassablement l'enchevêtrement musical qu'est P.H. Test/Two. Et la recette unique du peuple, sorte de chaos musical contrôlé, implose sûrement le plus littéralement aux oreilles dans ce second album studio : toute la culture des lyonnais s’y trouve, couchée sur un rythme rock – dans l'attitude agressive - aux sonorités dub, jazzy et hip-hop - mais pas du hip-hop traditionnel : de l'abstract hip-hop, aux variantes progressives -, le tout recouvert d'un manteau électro parfaitement maîtrisé. Il faut le dire, ces trublions savent faire de la musique, non pas comme on en fait plus, mais comme on en a jamais fait auparavant.

Pour entrer dans cet univers foisonnant et assez déjanté, prenons un exemple type, au hasard le morceau "Inspiration", sixième de l'album : la première cadence est donnée par un son régulier, mélange d'horloge et de métronome, rattrapé au bout de quelques secondes par une basse lourde et monochrome. Celle-ci virevolte un instant entre la balance, puis la musique s'arrête. Avant de reprendre immédiatement, étoffée d'une batterie très appuyée et d'un arrière-fond électronisé. Une voix se fait soudain entendre et souffle délicieusement un mot : "inspirez". Nouvel effacement de la musique, seule reste en piste la batterie accompagnée d'un nouvel arrivant, la trompette. Son air jazzy se couche onctueusement sur le rythme des tambours et augmente peu à peu l'intensité du morceau. La tension monte mais la musique, décidément effrontée, s'arrête une nouvelle fois : la basse gutturale et la cadence du métronome réapparaissent, saupoudrées d'un enivrant crescendo de trompette. Sur cette plage soyeuse, la voix refait surface et grésille : "inspirez, allez, inspirez bien... une dernière fois, vous soufflez... et recommencez ! Attention...". La trompette réitère ensuite son crescendo, sans paroles cette fois : l'énergie se galvanise, l'estomac se noue, l'auditeur attend la dernière note du cuivre qui semble aboutir sur l'apothéose du morceau. Mais il n'en est rien. Alors que tout devait mener au déchaînement instrumental le plus complet, le morceau bascule sur une irréelle partie de tennis de table. Des chaussures crissent, tandis qu'une balle en plastique est frappée avec violence de chaque côté d'une table à filet. L'un des joueurs rate son smash et pousse un râle, avant que l'arbitre n'annonce une égalité : "Deuce". Un break plus loin, la musique prend enfin de l'ampleur. La trompette se fait plus épaisse, la batterie opère quelques variations, le son électronique et quelques scratchs rajoutent de la profondeur. Le paroxysme tant attendu arrive, laissant les instruments se déchaîner entre eux. Au-dessus de la tempête, la trompette s'empare de la barre et navigue à vue, perforant de ses plages langoureuses les puissants rouleaux de scratchs et une batterie au rythme abyssal. Mais lentement, déjà, la musique s'estompe et aboutit sur la fin du match de raquettes : rires et congratulations accueillent le dernier point joué. Le morceau est terminé.

Voilà un avant goût de la jungle du PEUPLE DE L'HERBE, un terrain toujours glissant où s'acharnent d'exister un humour absurde toujours implacable et les innombrables influences de ce groupe inclassable. Leurs membres ont, pour la plupart, débuté dans le milieu hip-hop et en usent ainsi abondamment... mais avec une intelligence extrême et pour mieux extirper encore le souffle jazz, dub et électro de leur musique. Leurs influences, au contraire de se chasser, s'additionnent toujours entre elles au sein d'une alchimie incandescente, non pas fourre-tout et hétérogène mais brillante de clarté. Le plus jubilatoire cocktail que l'art musical ait jamais généré ! Et qui, je me répète, exulte le plus librement sur P.H. Test/Two : après une courte intro burlesque, l'album souffle à l'oreille vierge sa première œuvre, "Delice", une ballade smooth jazz merveilleusement électronisée. Déboule juste après un hymne ragga/jungle à la sauce oldschool, "No Escape", joué à la vitesse de la lumière et empreint d'une exaltante rage animale. Notamment grâce à la voix explosive et jubilatoire d'un invité de marque, UK Apache, légende de la scène Drum'n Bass et précurseur du Jungle. Pour se remettre de cet assaut dansant, "Escape dub" projette à sa suite une dub nébuleuse à souhait, à l'ambiance rétro et mélancolique. Plus loin, on rencontre les vibrations de "Maison en Dur", un drum'n bass puissant et incisif, puis l'aérien "1 rythme 2 chiens", dans lequel une trompette rayonnante combat un arrière-fond musical trempé d'obscurité.

Fort de cette diversité, l'album amuse ou dramatise, enrage ou repose, inspire toujours. Lorsqu'il prend fin et laisse l'oreille rassasiée dans l'atmosphère sourde du silence, la plénitude envahit les sens. Car P.H. Test/Two est parfaitement entier, en ce sens qu'il possède des pathologies musicales à cheval entre l'ivresse et la folie, et leurs remèdes instantanés : la colère sauvage de « No Escape », qui fait frémir d'intensité et appelle au déchaînement du corps, est ainsi immédiatement calmée par « Escape Dub » ou « Transmissions », bijoux de volupté et d'allégresse, qui reposent l'esprit et le propulsent vers une tranquille béatitude. Mais si ces spleens vous font broyer du noir, pas d'inquiétude, vous pouvez aussi continuer l'aventure avec humour au travers de l'« Interlude » du milieu d'album, aussi court que drôle, avant de passer au final absurde des « Rues de Saint-Paul » et à la désopilante partie de tennis de table d'« Inspiration ».

Ainsi rassasié, passé par tous les maux et sauvé par leurs antidotes respectifs, vous pouvez décider de clore l'univers. L'ouragan est passé... mais ô miséricorde, qu'il est addictif ! Une main fébrile (la vôtre, en tout état de cause) s'avance alors vers le lecteur de la galette et, d'un geste souple ou tremblant (suivant l'état dans lequel P.H. Test/Two vous aura plongé), réinstalle la tempête à son commencement. Car elle ne vous a pas encore tout livré, vous le sentez. Vous repartez donc en voyage armé d'un seul bagage, votre esprit, afin de ré-explorer cette forêt vierge que vous venez d'arpenter. Et si vous pouvez être certain d'arriver à la fin du parcours, sachez que ce sera sûrement par des sentiers bien différents. Aviez-vous déjà entendu par exemple les sublimes variations de cette basse, sur « Lion Youth » ? Ou ce riff de guitare rock au début de « Parkside Souvenirs » ? Et cette sonorité tremblante qui rythme « Transmissions » et lui insuffle toute sa mélancolie, ne vous avait-elle pas échappé à la première écoute ? Sans parler de ce solo de trompette sur l'hymne final « 1 Rythme 2 Chiens », qui se redécouvre indéfiniment : il suffit d'être dans de bonnes conditions d'absorption pour laisser échapper quelques larmes de tristesse sur ces notes de cuivre, tant le « blues » qu'elles transmettent est insoutenable de beauté.

Voilà donc un album qui hante, pour peu qu'on l'écoute d'une bonne oreille et qu'on soit amateur d'alchimie. Son flot ne semble jamais se tarir, tant il fourmille de variations dans ce qu'il offre en genres et en sonorités. Réussir à combiner la rage du Jungle, la caresse de la Dub, l'âpreté du Drum'n Bass, la poésie de l'électro et l'humour distingué de l'absurde, voilà ce qu'a commis LE PEUPLE DE L'HERBE. Pour le plus grand bonheur des mélomanes à la recherche d'étrangeté et d'originalité, mais aussi et tout simplement à la recherche de musique, la vraie, celle qui sait faire avancer son art en repoussant toujours plus loin ses limites. Et en mettant un rigoureux point d'honneur à ne pas se prendre au sérieux.

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- Dj Pee (scratch, samples, programmation)
- Psychostick (batterie, programmation)
- N'zeng (trompette, claviers, bugle, programmation)
- Jc 001 (chant, human beatbox)


1. Intro
2. Délice
3. No Escape
4. Escape Dub
5. Blunted
6. Inspiration
7. 20 Years Gone
8. Les Rues De St Paul
9. Lion Youth
10. Mister Nice
11. Parkside Souvenirs
12. Transmissions
13. Maison En Dur
14. Interlude
15. 1 Rythme 2 Chiens



             



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