Après le succès assez inattendu de son premier album, Leonard COHEN se retrouve propulsé parmi les grands folk singers de son temps, tel un nouveau DYLAN. Il n'en faut pas plus pour que sa maison de disques le pousse à enregistrer au plus vite un deuxième opus. Essayant de garder la tête froide, notre poète canadien se rend à Nashville, capitale de la Country, pour y enregistrer ce qui va donner naissance à Songs From a Room.

Voilà un titre qui ne trompe pas, à la vue de la pochette arrière. On y voit une chambre quasi spartiate, avec une ravissante jeune femme blonde juste vêtue d'une serviette de bain, assise devant la machine à écrire de COHEN. Il s'agit de Marianne Ilhen, la muse norvégienne de Leonard durant les années 60. Les Femmes... toujours grande source d'inspiration de Leonard COHEN.

Songs From a Room ne se différencie pas beaucoup de son illustre prédécesseur. On retrouve la même folk médiévale, mais ici beaucoup plus épurée, et presque sans choeurs féminins, ce qui est rare chez notre bonhomme. Les textes (les poèmes, devrais-je dire) tournent autour des mêmes sujets : les femmes, le judaîsme, les déceptions amoureuses et la solitude. Chers lecteurs, attendez un peu avant d'aller vous pendre, s'il vous plaît !
Certes, l'album est aussi sombre que sa pochette est blanche et épurée, comme la musique. Mais quelle beauté, quelle élégance, mes amis ! Dès le grand classique "Bird on a Wire", on retrouve cette mélancolie poétique, avec des violons pour accentuer le lyrisme. Une basse rythme la majeure partie des ballades, compensant l'absence de batterie. Et la douce voix de COHEN fait le reste.

On retrouve le schéma classique des chansons de l'artiste : les fameux arpèges de guitare classique, une basse ronde et simple, mais ici sans choeurs ajoutés ("Story of Isaac", "You Know Who I Am"), à l'exception de "The Partisan", sublime réinterprétation en anglais et français (français chanté avec un délicieux accent anglais) de la "Complainte du Partisan" relatant la Résistance française de la Seconde Guerre Mondiale. L'émotion est terriblement présente.
Mais le monument de tristesse reste "Seems So Long Ago, Nancy" où COHEN raconte l'histoire vraie d'une jeune fille qui s'est suicidée et qu'il connaissait, chanson mortuaire, aux claviers dignes d'orgues de funérailles, qui clôt la première face du vinyl originel. Non, amis lecteurs, laissez cette corde de pendu tranquille !

Il y a quelques chansons plus vivantes, comme "A Bunch of Lonesome Hero" qui n'est pas sans rappeler "So Long Marianne" DE l'album précédent, ainsi que "The Old Revolution" et "Tonight We'll Be Fine" aux roulis d'arpèges caractéristiques. Tout n'est pas noir sur cet album blanc.

S'il a été enregistré à Nashville et produit par Bob Johnston (Johnny CASH, Bob DYLAN), Songs From a Room n'est pas un album de country, fort heureusement, tant des arrangements country avec violons et tout le tralala auraient gâché l'élégante pureté des compositions. Malheureusement, on retrouve sur beaucoup de titres une guimbarde ridicule qui dénature un peu cette beauté pure, et c'est pourquoi je ne peux personnellement pas mettre la note maximale à ce disque.
Songs From a Room ne fait pas moins partie des chefs-d'oeuvre de Leonard COHEN, par ce son épuré et ces textes si riches. Leonard COHEN nous emporte vers un autre temps, tels des troubadours en quête de poésie, de mysticisme et d'Amour bien sûr.


Note réelle: quelque part entre 4 et 4,5.