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The CRAMPS - Songs The Lord Taught Us (1980)
Par TOMTOM le 25 Mai 2012          Consultée 4546 fois

La vraie question est : qu’est-ce qu’Alex CHILTON était venu faire dans ce foutoir ? Plus habitué à la perfection pop avec The Box Tops et Big Star, comment s’était-il retrouvé à produire ce groupe de dégénérés notoires ? Peut être les Cramps lui renvoyaient-ils le chaos de ses propres expériences musicales passées ; ou peut être que, comme Lux et Ivy, l’exilé de Memphis partageait une conscience aiguë de l’érosion du patrimoine musical américain. Et puis, pour celui qui haïssait l’industrie du disque au plus haut point, produire les premiers singles puis le premier album des Cramps constituait l’occasion d’un grand fuck off adressé à la planète toute entière… Quoiqu’il en soit, c’est bien lui qui fournira aux Cramps ce son infernal, gorgé d’échos, le studio de Memphis littéralement transformé en cimetière de distorsion, ce même son qui leur manquera cruellement par la suite.

Memphis 1980, donc. C’est officiel, le punk est mort et de plus en plus de groupes s’engouffrent dans cette horreur qu’il est convenu d’appeler la new-wave. Dès lors, le titre de l’album sonne comme une épitaphe : les messies de l’apocalypse sont là, prêts à prêcher la bonne parole. Hors du garage rock et du rockabilly, point de salut. Retour au corps du christ rock n’ roll : le trash, dans les thèmes comme dans la musique. Un grand pèlerinage en Cadillac rouillée avec, bien calées sur la banquette arrière, une collection de 45 tours, de Link Wray aux deux premiers Flamin’ Groovies, une pile de cassettes pornos, une autre de films de zombies. Et puis les lunettes de soleil « after dark », afin que le désert n’attaque pas plus une pupille déjà ravagée par l’acide.

Plus que sur leurs EP, The Cramps s’imposent ici comme les rois de la reprise déglinguée, toutes tirées de la collection personnelle du chaman-archiviste Lux INTERIOR et de celle de la belle plante qui lui sert de compagne. Le « Strychnine » des Sonics (déjà foutrement violent au départ) ne pouvait espérer meilleur traitement. Et après ce solo, on ne s’étonne plus de rien, même pas du « Fever » d’Eddy COOLEY et Otis BLACKWELL que le groupe fait sienne. C’est simple, écoutez cette version et vous n’imaginerez même plus qu’elle ait pu être chantée par quelqu’un d’autre. Puis, Lux INTERIOR s’écorche le larynx sur le « Tear It Up » de Jonnhy BURNETTE (« Tear It Up Bop Bop Bopdoowop !») qui finit dans un grand fracas de casseroles. Et en guise de dessert, il restera le « Rock On The Moon » de Jimmy Stewart & His Nighthawks, un rythme épileptique et endiablé défiant toutes les lois de la pesanteur.

Après ça, le reste de l’album n’est qu’un enchevêtrement de compositions originales toutes plus folles les unes que les autres. Comment passer à côté de « Garbageman », ode aux éboueurs, ou des effusions de violence de « Sunglasses After Dark » ? Partout IVY et KNOX (dont on ne peut qu’admirer la placidité) assurent une rythmique toujours bancale mais imparable, pendant que Brian GREGORY, de sa Flying V à poids (celle-là même qu’il se fera voler lors de la tournée française de l’album), déchire l’atmosphère et ses tympans via des lames de fuzz bouchonnées. Lux INTERIOR est bien le « Mad Daddy » de la chanson, hoquetant à tout va, la voix habitée (possédée) par le démon de la surenchère. Le tout est une performance exceptionnelle, un grand sabbat à volume maximal qui atteint son paroxysme rageur sur « I Was A Teenage Werewolf » et plus encore sur le duo « Mystery Plane »/ « Zombie Dance », peut être (avec « Strychnine ») les deux titres les plus marquants de l’album, les plus absolument déjantés, ce genre de chanson qui à n’importe quel moment de la journée est capable de vous changer en monstre assoiffé de musique binaire, à s’en rouler par terre en bouffant des micros.

Après cette décharge on pourra replacer The Cramps dans un mouvement de rockabilly revival, pyschobilly, gothabilly, que sais-je encore… Reste que Songs The Lord Taught Us est au dessus de tout, instantané divin dans une discographie à laquelle on reprochera de tourner en rond, de reproduire chaque fois la même formule tout en n’atteignant jamais l’originale. Cette critique on la fera aussi à Motörhead, et de manière générale à tous les groupes qui, conscients de la portée messianique de leur musique, n’ont jamais perdu de vue leur mission. Mais comment les-en blâmer ?

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- Lux Interior (chant)
- Poison Ivy Rorschach (guitare)
- Brian Gregory (guitare)
- Nick Knox (batterie)


1. Tv Set
2. Rock On The Moon
3. Garbageman
4. I Was A Teenage Werewolf
5. Sunglasses After Dark
6. The Mad Daddy
7. Mystery Plane
8. Zombie Dance
9. What's Behind The Mask
10. Strychnine
11. I'm Cramped
12. Tear It Up
13. Fever
14. I Was A Teenage Werewolf (original Mix)
15. Mystery Plane (original Mix)
16. Twist And Shout
17. I'm Cramped (original Mix)
18. The Mad Daddy (original Mix)



             



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