Vous ne vous sentez pas l'âme d'un compositeur ? Aligner deux accords originaux sur votre guitare vous paraît chose impossible ? Parolier en devenir, vous séchez comme un écolier devant une page blanche ? Rassurez-vous, il est tout à fait possible de faire carrière grâce à la musique des autres. Je ne vous parle pas d'en vivre, de vous classer dans les meilleures ventes ou de déchaîner les foules, mais simplement de parcourir les villes et villages, rencontrer un succès d'estime certain et publier régulièrement des albums. Prenez les Allemands de CONNEMARA STONE COMPANY. Depuis 1997, le groupe a publié 9 albums, donné des centaines de concerts, et a reçu plusieurs prix des mains d'institution officielle. Tout cela sans écrire une seule parole, sans composer un seul morceau. En effet, le groupe se « contente » de reprendre et faire connaître la musique des autres, en adaptant des traditionnels celtiques, écossais ou irlandais, ou en reprenant à son compte des morceaux d'artistes d'obédience celtique. Un bel exploit.

Il faut reconnaître, tout de même, que l'Allemagne est une terre particulièrement accueillante pour le folk-rock celtique, nous avons eu l'occasion de nous en rendre compte à maintes reprises. Pas étonnant donc que le groupe rencontre un petit succès. Original, le dixième album de la formation, est également le premier enregistré en compagnie de son nouveau chanteur Dino Serci. Un enregistrement live, bien entendu. La musique, si elle n'est pas faite de compositions originales, n'aurait que peu d’intérêt à être captée en studio. Sur Original, nous retrouvons donc une dizaine de morceaux dits traditionnels ainsi que 3 reprises de Dougie MacLean, qui semble être le fil rouge de l'album. Dotés d'arrangements rock, « Ready for the Storm » et « Turning Away » se voient dotés d'un nouveau visage fort agréable. Pas vraiment professionnel (la qualité de l'enregistrement n'est pas optimale, le groupe n'est pas forcément toujours très carrée), CONNEMARA STONE COMPANY s'impose néanmoins comme un groupe fort compétent, composé de musiciens et d'un vocaliste parfaitement en place. On apprécie tout particulièrement le travail du violon et de la flûte, qui virevoltent avec une grâce, une légèreté et un sens de la mélodie bluffants. La troisième reprise de MacLean, « Caledonia », qui bien que composée à la fin des années 70 a acquis un bien légitime statut de traditionnel, se veut bien moins audacieuse, mais reste appréciable dans ses arrangements sobres et respectueux.

On apprécie de retrouver l'enjoué « Donald McGillavry », chanson jacobite énergique et enjouée, ainsi que les ultra-connus « Wild Mountain Thyme » et « Fields of Athenry », dont l'interprétation folk rock toute en nuances est un pur moment de plaisir. L'album dans son ensemble reste bien fait et bien exécuté. Malgré tout, s'il a le mérite de faire connaître une petite partie de la culture musicale celtique aux générations actuelles, cet album se voit doté d'une portée bien faible. Un peu comme le pique-boeufs, qui dépend des animaux sur lesquels il se perche pour trouver sa nourriture, CONNEMARA STONE COMPANY est entièrement redevable d'un patrimoine inépuisable, qui lui a permis de trouver son public. Une « petite » sortie pour les amateurs éclairés de folk-rock celtique.