On nous bassine, vraiment, jusqu'à plus soif, avec les préceptes d'une vie saine, qu'il faut nécessairement appliquer, nous dit-on, si l'on souhaite payer la totalité de nos cotisations retraite en bonne santé. Ne pas boire, ne pas fumer, ne pas rouler trop vite, ne pas grignoter entre les repas, faire du sport... Ah, on me glisse dans l'oreillette que pour respecter cette dernière injonction, il existe une manière simple et ludique : se dandiner sans discontinuer à l'écoute du Stage Box de FIDDLER'S GREEN. Plus efficace qu'un régime, moins cher qu'un abonnement à la salle de gym. Effectivement, pas de quoi s'en priver.

Pourquoi cet album, direz-vous (eh bien, dites-le !) ? Les Allemands de FIDDLER'S GREEN ont, depuis leur naissance au début des années 90, émaillé leurs sorties d'opus live de bonne qualité. Celui-ci, publié en 1999, est néanmoins un cran au-dessus des autres enregistrements en concert du groupe. Tout simplement parce que Stage Box constitue un accomplissement dans la carrière du groupe de folk-rock-punk celtique. Après quelques tâtonnements, quelques errances et quelques déconvenues, FIDDLER'S GREEN semble avoir intégré le fait qu'il vaut mieux être un exceptionnel groupe de rock celtique qu'un groupe de rock moyen. Décomplexé, comme libéré d'un poids (celui de tenter d'obtenir le succès de masse), le combo s'assume enfin et s'engage avec confiance et envie vers la seule direction dans laquelle il se sente parfaitement à l'aise : celle faite d'un rock énergique et dansant, mâtiné de touches écossaises et irlandaises mais profondément marqué par une personnalité affirmée.

Tout cela, cette envie renouvelée, se retrouve donc sur ce double live dont les deux heures semblent durer à peine un instant. Établissant une setlist savamment dosée, constituée à moitié de titres originaux et de reprises de traditionnels celtiques, FIDDLER'S GREEN frappe juste est fort. Cette capacité à se faire énergique de manière constante explique sans doute pourquoi le groupe est l'un des seuls combo rock celtique à provoquer des wall of death et autres circle pits lors de ses concerts en festival.

On se trémousse, donc, et on perd ses kilos tandis que retentissent dans la sono le survolté "Mary Mack", "Make up your mind", "The reel jig bag", "Don't turn away" (sans doute l'une des meilleures compositions du groupe), "Rocky road to Dublin" et autres joyeusetés qui constituent un live compact, sur lequel l'intensité ne baisse que rarement. Tout juste le groupe s'accorde-t-il quelques temps de pause, avec la sombre et solennelle "Home", le mid-tempo "Wish you well" et la ballade finale, la délicate "Stay by my side" qui offre une communion entre les membres du combo et leur public, acquis et participatif.

Deux heures qui passent en un éclair, donc. On apprécie la versatilité, la capacité à maintenir une tension et un intérêt constant alors que les titres s'enchaînent. Au sommet de ses capacités, le violoniste Tobias Schäfer, qui quittera l'année suivante, virevolte et emplit de délectables notes des morceaux qui doivent beaucoup à la cohésion d'un groupe enfin sûr de son fait.

S'il ne fallait en retenir qu'un, ce serait sans doute celui-ci. Stage Box, témoignage d'un groupe qui mêle avec bonheur tradition et inspiration, participation du public et virtuosité des musiciens. Un accomplissement, un vrai, un bon. Voilà qui vaut bien cinq fruits et légumes.