Paul Williams aka "Billy Paul" a déjà une carrière longue comme le bras lorsque sort son deuxième opus à 36 ans, un âge ou de nombreuses rock stars sont déjà à la retraite. Son "Cadillac club" était la profession de foi d'un artiste professionnel dont la vocation était de chanter le jazz. Nous allons donc voir comment cet "Ebony woman" dévie légèrement mais surement de cette voie.

L'éponyme "Ebony woman", une de ses vieilles chansons datant de 59, le débute. C'est un thème, revendicatif au niveau des paroles - Est ce Pam sur la pochette ? - certes mais la musique est plus proche du crooner typique américain à la Samy DAVIS Jr ou Franck SINATRA., la chanson est cependant assez réussie. Avec le "Everyday people" de SLY and the FAMILY STONE, on repart déjà sur des terres jazz soul, tel le répertoire que Billy aimait à chanter lors de ses nombreuses années au sein des clubs de Philly. un titre pressé. "Psychedelic Sally" est tout à fait dans l'air du temps, on le croirait issu du summer of soul organisé par arte cet été ! "Windy" est sans doute plus mainstream, on note l'utilisation assez fréquente d'une batterie tonitruante, comme il était souvent le cas en ce début des seventies.

La reprise du grand classique de SIMON et GARFUNKEL "Mrs Robinson" est certes sympathique mais n'approche pas un instant de la vitalité innocente de la version des papes de la folk américaine. Billy n'y trouve pas vraiment la place pour briller ou y apporter la vibration smooth qui est la sienne. Ici, le traitement est trop rapide, certes plus rock, mais est-ce une bonne idée pour ce titre ? La basse me semble trop répétitive, on croirait assister à une jam... Elle sortira en single mais ne chartera pas au billboard... Ce qui n'est guère étonnant. Dans le même ordre d'idée la reprise du standard de CREEDENCE "Proud Mary" la rend méconnaissable, mais ne chavire pas les esprits. je persiste qu'il ne s'agit pas d'un répertoire fait pour Mr Paul.

Les highlights de l'opus se trouvent ailleurs : en premier lieu sur "The windmills of your mind", ou Billy trouve une vraie occasion de briller. Le thème hispanisant de la guitare et l'ambiance sépulcrale du titre lui permettent de laisser libre cours à sa voix qui évolue du désespoir à la simple mélancolie. Le titre est étonnament lent, mais je le conseille vivement tant il arrache les tripes. Puis nous avons le smooth de "Let's fall in love over again" qui est rien moins que dantesque. Tout concourt à l'expressivité de ce titre, l'orchestration au cordeau, avec des cordes qui semblent suspendu au fil du temps, et Billy qui lâche toute sa voix avec une vraie maestria.

Un deuxième opus qui cherche indubitablement à se détacher de l'identité "chanteur de Jazz", Billy cherche dans les standards, évolue tout au long de l'oeuvre sans parvenir à se trouver réellement. Il reste deux titres qui augurent du meilleur pour l'avenir, qui s'annonce assez ensoleillé.