La récente renaissance du mythique collectif GODSPEED YOU ! BLACK EMPEROR avec le fabuleux Allelujah ! Don’t Bend ! Ascend ! a fait beaucoup de bruit dans le milieu de la musique indépendante. Mais il a occulté que, si GY!BE était en sommeil profond depuis dix ans, son petit frère A SILVER MT. ZION continuait son bonhomme de chemin au point d’avoir désormais une discographie beaucoup plus longue et conséquente que son illustre aîné.

A SILVER MT. ZION est un collectif crée et représenté par une grande majorité des membres de GY!BE, mais la musique est d’un certain sens plus accessible, les pistes sont plus nombreuses et (un peu) moins longues. Et surtout, la musique n’est pas uniquement instrumentale. Au fil des albums, le chant prend de plus en plus d’importance. Et ce septième album en est la preuve.

Fuck Off Get Free We Pour Light On Everything… Encore un titre à rallonge, comme souvent chez le collectif, qui a aussi la manie agaçante de changer de nom à chaque disque. Ici, appelez-les THEE SILVER MT. ZION MEMORIAL ORCHESTRA. Mais gardons A SILVER MT. ZION pour s’y repérer… Fuck Off (…) accentue l’énergie déployée des précédents efforts. La musique, en particulier sur les trois premiers titres, fait preuve d’une agressivité noisy virulente. Le discours souvent anar de ASMZ comme de GY!BE, prend ici une tournure encore plus intense. Le violon a du mal à exister derrière les murs de guitare. Ce n’est pas plus mal, car tout excès de violon vous rend une chanson insupportable. Mais l’épique « Fuck Off Get Free » ne souffre pas de ce problème tout le long de ses 10 minutes. Et la suivante « Austerity Blues » est encore plus frappante : 14 minutes de guitares saturées et de claviers grandiloquents pour une critique acerbe des politiques d’austérité.
« Take Away These Early Grave Blues » garde cette énergie débordante, à la fois minimaliste et explosive, mais avec un format plus court et accessible. Pour ma part, je retrouve la même énergie que chez les américains de AKRON/FAMILY sur leur dernier album, Sub Verses.

Plus lent mais tout aussi électrique, « What We Loved Was Not Enough » se veut plus mélancolique, et le chant plaintif d’Efrim Menuck, tête pensante des deux collectifs montréalais, est ici justifié. Ce qui n’est pas toujours le cas dans la discographie de ASMZ tant ces lamentations peuvent être agaçante parfois. Heureusement, les chœurs des autres musiciens font, eux, des merveilles. En particulier sur ce titre aux allures de drame dans un film d’auteur.

Entre ce déluge d’électricité, deux chansons bienvenues calment un peu la tension. « Little Onse Run » est une très belle petite chanson au piano, douce et chantée en priorité par les deux demoiselles de ASMZ, Jessica Moss et Sophie Trudeau. Quand à « Rains Thru the Roof ot Thee Grande Ballroom », il s’agit d’un hommage à Capital Steez, jeune rappeur de Brooklyn qui s’est suicidé en se jetant du haut d’un immeuble fin 2012. Étrangement, rien musicalement ne fait référence au rap, le titre est plus proche de l’esprit des FLAMING LIPS par ses claviers psychédéliques et la voies gémissante de Menuck. Un morceau triste et funèbre, correspondant bien à l’hommage rendu.

Dans l’ensemble, Fuck Off Get Free We Pour Light On Eveything est un disque abouti et particulièrement prenant. Mais le chant, désormais présent sur tous les morceaux, est parfois agaçant. Efrim Menuck n’a jamais entièrement assumé ce rôle au sein de ASMZ, mais il accompli la tâche avec honneur, et non sans défaut. Le propos du collectif canadien réussi là un essai virulent et musclé. Mais pour ma part, je ne retrouve pas le charme des premiers albums, essentiellement instrumentaux et poétiques.

Note : entre 3 et 3,5