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GOTHIQUE / HEAVENLY  |  E.P

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1993 Suspiria

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1992 Iris

MIRANDA SEX GARDEN - Iris (1992)
Par AIGLE BLANC le 22 Avril 2015          Consultée 2247 fois

A la sortie de Madra en 1991, Jocelyn West, Kelly McCusker et Katharine Blake, membres originels de MIRANDA SEX GARDEN, sortent tout juste diplômées de l'Ecole de Musique Purcell à Bushey près de Watford (Royaume-Uni). Leur premier album propose un programme exclusivement consacré à des madrigaux a cappella bien dans l'esprit de ce qu'on est en droit d'attendre de trois superbes créatures de formation des plus classiques. Elles initient donc leur discographie sous les auspices de John Wilby, Thomas Morlay, Orlando Gibbons, Thomas Tomkins, autant de compositeurs anglais de la période élizabéthaine mais dont la renommée, à en croire mon humble ignorance, n'a semble-t-il pas vraiment dépassé le cadre britannique.
Ce disque rappelle un peu ceux du trio féminin ANONYMOUS 4 qui jouissait déjà d'une certaine renommée à cette époque dans la sphère Musique Ancienne du répertoire Classique.

Quand paraît Iris, leur EP de 1992, la terre vient de vivre en accéléré plusieurs révolutions solaires. Les fans de la première heure, public énamouré qui fréquente assidument les bacs Classiques des disquaires, et qui ne jure que par les instruments acoustiques traditionnels, a dû imploser sous l'effet du phénomène météorologique dévastateur que personne n'avait senti venir. Et pour cause : c'est un fossé, un abîme, un trou noir qui sépare les deux oeuvres.
Cependant, force est de constater que plusieurs indices auraient dû inciter à la méfiance : d'abord le nom du Label sur lequel Madra était paru : Mute Records fort bien connu des adeptes d'Electro (DEPECHE MODE) et de Rock Gothique (NICK CAVE & THE BAD SEEDS). Ensuite, le portrait des chanteuses sur la pochette de Madra, portrait en Noir & Blanc isolant les trois visages en clair obscur, plus proche il est vrai d'une esthétique gothique que soulignaient la police des caractères du ban titre.
Et enfin, le nom-même du groupe : connaissez-vous beaucoup de trios féminins d'obédience classique (musique ancienne) portant un patronyme aussi licencieux que MIRANDA SEX GARDEN ? Et quel est le sens de ce nom? De quel "jardin" s'agit-il ? Le sexe d'un jardin ? Le Sexe du Jardin de Miranda ? Ne s'agirait-il pas plutôt d'une métaphore autour de la Toison de Miranda? Vous les déçus qui trouvez que cette chronique devient franchement lamentable et de mauvais goût, au lieu de rester collée au charme élégant élizabéthain de Madra, je ne vous retiens pas. Vous pouvez partir maintenant, pendant qu'il en est encore temps, la suite risquerait de provoquer chez vous un orgasme... euh pardon, non! ... un arrêt cardiaque.

Ces précautions terminées, vous qui êtes resté(e), accueillez comme il se doit la nouvelle formule de MIRANDA SEX GARDEN. Jocelyn West a quitté le navire, remplacée au chant et à la viole par Donna McKevitt, ce qui maintient dans le groupe un trio féminin de base. La grande révolution réside dans l'adjonction de deux nouveaux membres masculins, Ben Golomstock à la guitare, à la basse et à l'orgue, et Trevor Sharpe à la basse, batterie et aux percussions. Si Ben Golomstock participe aux vocaux sur certains titres, en particulier aux choeurs, cela ne se fait pas au détriment de la coloration féminine de l'ensemble.
La nouveauté passe en priorité par les instruments. Madras était je vous le rappelle un recueil de madrigaux entièrement a capella. Iris enrichit la palette expressive des voix de sopranos par une instrumentation rock des plus probantes sans que le groupe abandonne totalement ses origines madrigalesques. J'en veux pour preuve le titre introductif "Lovely Joan" le seul qui soit un air traditionnel et qu'interprète au chant lead la troublante Katharine Blake. Cette dernière apparaît dans Iris comme le mentor de MIRANDA SEX GARDEN dans la mesure où elle se charge la plupart du temps de la ligne vocale principale et où elle est la seule des femmes à assurer aussi la section rythmique aux percussions.

Par sa durée (tout juste 30 minutes pour 5 titres), Iris ne saurait prétendre au statut d'album à part entière. Et pourtant, il s'élève au-dessus du lot des traditionnels EP pour plusieurs raisons : la première réside dans son indéniable cohérence. Les titres s'enchaînent avec une fluidité qui renforce le lien qui les unit. L'impression dominante est celle d'un disque développant une atmosphère unique dont chaque titre vient enrichir la palette des couleurs. Iris trempe dans un spleen baudelairien particulièrement vicieux, à la fois séduisant par le timbre des voix féminines et amer par l'insondable tristesse qui le submerge à chaque instant. La cohérence thématique et celle des ambiances se voient secondées par l'agencement des compositions. Les deux titres co-composés par Katharine Blake se placent en deuxième et quatrième positions, et ce sont en même temps les plus lents, ceux dont le venin se révèle le plus incidieux. Les deux compositions collectives signées MIRANDA SEX GARDEN se trouvent placées en troisième et cinquième positions et ce sont les plus ouvertement rock, ceux dont les instruments rock se déchaînent dans une ambiance sataniste des plus réussies. Ces correspondances subtiles confèrent à Iris un équilibre quasi parfait entre le caractère dépressif des titres les plus lents et celui plus rageur des titres collectifs.

"Falling" et "Blue Light" (en seconde et quatrième position) plongent l'auditeur dans une descente dépressive vraiment flippante. Le chant douloureux et étiré de Katharine Blake que soutiennent des choeurs langoureux associés à une instrumentation raréfiée créent une sensation perturbante : celle de sombrer dans une interminable agonie, les deux compositions jouant sur des notes incertaines en décrescendo. J'en ressors à chaque fois comme d'un cauchemar qui me voit chuter tout en flottant dans le vide.

"Fear" et "Iris" même si beaucoup plus rythmées n'en sont pas plus rassurantes avec les voix féminines qui alternent séduction et messe noire soutenues par les interventions malsaines d'un orgue, tandis que les guitares de Ben Golomstock alignent arpèges déréglés et murs du son bruitistes, le tout délivré avec un sens ahurissant de la montée en puissance. A ce jeu, "Fear" se présente comme un modèle du genre. Le crescendo qui constitue son ossature dramatique est le plus réussi qu'il m'ait été offert d'entendre. Imaginez SIOUXIES AND THE BANSHEES s'accouplant avec le DEAD CAN DANCE de la première période tout en se laissant influencer par NICK CAVE AND THE BAD SEEDS et les GOBLIN de Suspiria, et vous aurez une petite idée des trésors sulfureux qui vous guettent dans ce EP magnifique : dantesque.

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   AIGLE BLANC

 
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- Kelly Mccusker (chant, violon, orgue)
- Katharine Blake (chant lead, violon, percussions)
- Donna Mckevitt (chant, viole)
- Ben Golomstock (guitares, orgue, basse, chant)
- Trevor Sharpe (batteries, percussions, basse)


1. Lovely Joan
2. Falling
3. Fear
4. Blue Light
5. Iris



             



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