On le sait, les liens entre le hard rock extrême et le punk ont toujours été étroits et cela depuis les origines de ces deux styles bruyants. Il n’y a qu’à voir l’impact qu’ont eu les géniaux MC5 sur leurs héritiers métalleux et autres épinglés à nourrice de toute espèce… Dans les années 80, BLACK FLAG et les combos de leur label SST s’inspiraient aussi des deux courants en relisant le répertoire de BLACK SABBATH par le prisme des RAMONES, grosso modo.

Rien d’étonnant à voir d’anciens activistes de ces deux scènes s’accoupler au sein de “supergroupes”. C’est ainsi le cas d’OFF!, réunissant le vétéran du hardcore punk Keith Morris (ex CIRCLE JERKS) avec d’autres agités du binaire lourd, mais aussi de SUN AND SAIL CLUB… Ce club de défoncés notoires compte dans ses rangs Scott Reeder à la basse (ex KYUSS) – on rappellera brièvement qu’au début des “grungy” années quatre-vingt-dix KYUSS fut à l’origine de tout ce qui se fit en matière de heavy stoner... Mais aussi Bob Malch à la gratte et Scott Reeder (décidemment !)... à la batterie. Tous deux ont joué au sein de FU MANCHU, cinglant quatuor heavy/punk de la même période que KYUSS. Aux vocaux on retrouve un certain Tony Cadena, nouvellement intégré, qui hurla un temps avec les hardcoreux des ADOLESCENTS au début des “eighties”.

D’après vous, que vont faire ces vétérans (dont les âges doivent tourner autour de la cinquantaine) ? Bingo, du stoner rock enragé. Rien que la pochette, déjà, évoque celles des vieux membres carbonisés de BLUE CHEER, autres grands ancêtres bruyants des “sixties”. D’entrée, on est en terrain familier. Le disque contient en effet dix torpilles bien torchées (la plupart ne dépasse pas les deux minutes) et qui font mouche à chaque coup. Elles piochent autant dans le hardcore punk, surtout pour la rapidité de certains riffs, que dans la métallurgie lourde “seventies” illustrée ici par des ralentissements de brontosaure en rut.

L’influence de BLACK FLAG se ressent sur des titres sauvages comme “Krokodil Dental Plan” ou “Alien Rant Factory”. Sur “Full Tilt Panic”, on a même l’impression que Cadena braille comme le Henry Rollins période drapeau noir, justement. La guitare très “gregginesque” sur “Inside Traitor Outside View” rappelle le “loose nut” du gang à Rollins.

Les passages ultra heavy renvoient aux exercices doom des MELVINS, voire au post metal d’un NEUROSIS première période (flagrant sur "Level up Shut I down” certainement le meilleur morceau). Dans le genre, le plus long titre est sans conteste “Cypherpunk Roulette”, où les vocaux évoquent Buzz Osbourne des MELVINS, mais aussi le coté un peu expérimental de ces derniers. “Fever Blister…”fait penser au BLACK SABBATH pour la gratte très “tonyiommesque” et l’imitation du père OZZY par Cadena, ainsi qu’à certains travaux de SOUNDGARDEN période SST.

Souvent les faces des deux courants sont présentes à l’intérieur des pièces présentées, comme “Migraine with a Chainsow” avec son mix hardcore/doom (marqué par de redoutables growls) qui donnerait justement la migraine à un fan de TOTO… Sinon “Dresden Firebird Freakout” est dans une veine plutôt thrash avec un refrain étonnamment heavy metal à l’ancienne qui ne dépareille pas de l’ensemble. On entend aussi un chant vocodé à la KRAFTWERK (“Baba Yaga Bastard Patrol”) ou carrément psychédélique, des intros très space rock pour intensifier la prestation “stoner” de l’ensemble.

Bref, un disque hardcore/heavy “seventies” qui ne révolutionne rien mais qui chatouille lourdement les tympans tout en étant paradoxalement planant…