THE JEZABELS, groupe australien de pop-rock. Voilà comment on pouvait très brièvement présenter la formation jusqu'en 2016. En effet, voilà que le quatuor mixte a décidé de suivre la tendance et donc de rajouter en masse des synthétiseurs. En voilà une bonne chose de faite, surtout à une époque où le spectre du clavier Bontempi a disparu depuis belle lurette. Plus précisément, les Jezabels trouvent là une forme, un écrin plus adapté encore à leur pop plutôt poétique et réfléchie.

2016 voit donc la naissance de Synthia, troisième album du groupe. La pochette donne le ton, avec sa sobriété de rigueur et en même temps très parlante. Et c'est peu dire : dès le premier morceau, "Stand and Deliver", les Jezabels envoient l'artillerie lourde dès le début. Avec cette longue ouverture (7 minutes), le groupe sort une dream pop des plus brillantes, transportant dans un monde où la voix si belle de sa chanteuse frappe d'emblée en plein coeur. Oui, vraiment, on peut dire de Hayley Mary qu'elle fait partie du haut du panier.
Une ouverture aussi notable peut cependant cacher de mauvaises surprises, un amoncellement de titres plus fades. Sauf que ce n'est que le premier volet d'une série de chansons certes plus conventionnelles, mais pas moins bonnes. Preuve en est avec "My Love is My Disease" : si le refrain est en partie aussi basique et honteux que chez les compatriotes de AC/DC (vous savez, le groupe avec Axl Rose au chant), le croisement des claviers saturés et des guitares distordues en fait une pépite addictive. "Unnatural" présente l'aspect le plus synthpop des JEZABELS, mais n'oublie pas pour autant de sortir l'artillerie lourde pour autant.

Un problème notoire chez Synthia réside cependant dans le fait qu'on ne retienne aussi vite que ces trois chansons-là. Et pourtant, le reste ne démérite pas, à l'instar de "Come Alive" et sa tension dramatique qui ne lâche pas pendant ses 5 minutes. Citons également "If Ya Want Me", rappelant vaguement Florence + The Machine – ce n'est pas une mauvaise chose – et qui a tout d'un single percutant. "Pleasure Drive" est un relatif point faible, dans le sens où ses couplets ne sont pas les plus mémorables du lot, mais son refrain est redoutablement bon. Et terminer l'album sur "Stamina" n'est qu'une preuve de plus qu'on a affaire à des musiciens sachant doser la maestria instrumentale et l'émotion transmise par le chant.

Synthia n'a cependant pas forcément les armes pour être l'un des tout meilleurs crus de l'année 2016. En effet, 10 pistes pour 53 minutes de musique, ça fait forcément des morceaux un peu longs. Autant pour "Stand and Deliver" et "Stamina" ce n'est en rien un problème, autant l'efficacité pop s'en trouve un peu émoussée notamment pour "Smile" et "Unnatural". Plus grave, le plaisir est certain quand on écoute Synthia, mais est-il durable ? Ce n'est pas dit. La qualité est présente, comme dit à plusieurs reprises, mais il manque le côté intemporel, cet élément transformant une chanson vraiment bonne en classique potentiel.

À moyen terme, Synthia peut toutefois s'imposer comme un album à écouter avec grand plaisir. Les JEZABELS ne font pas partie de ces formations qui foncent dans la brèche synthpop et en sortent une musique fade ou inintéressante. Il manque donc la dimension universelle, mais il s'agit là d'un détail décisif qui serait le bienvenu dans une recette déjà fort bien rôdée et prête.

Note réelle : 3,5/5