Cette compilation sous forme de double CD revisite chronologiquement la période faste du chanteur guitariste aux travers de 60 titres parus en singles. Revenons brièvement sur Faron Young dont la carrière aura connu quelques beaux succès dans les domaines du Honky Tonk et de la ballade. En clair, encore un bon petit péquenot !

Originaire de Shreveport (Louisiane) où il voit le jour en février 1932, le jeune Faron s’intéresse très tôt à la musique en écoutant SINATRA, Doris Day ou Nat King Cole sur les ondes américaines. Il débute le chant au lycée intégrant la formation de son entraineur de football américain qui l’oriente aussitôt sur le Hillbilly. L’adolescent prend vite goût à ce nouveau registre et se produit rapidement dans les bars et les clubs locaux du Texas et de Louisiane. Webb PIERCE lui met le pied à l’étrier en lui permettant de passer sur la KWHK, une grosse radio sudiste. Grandement influencé, comme beaucoup d’autres, par Hank Williams, le jeune Faron passe à la Louisiana Hayride dès 1950. Une rumeur, tout à fait vraisemblable, prétend que notre Faron alors chanteur débutant se fera piquer sa petite amie (Billie Jean Eshlimar) par Hank Williams, alors star incontestée de la Country Music, sous la menace d’un six coups. Eh oui … on ne plaisantait pas au pays des cowboys et de la Country!

Young entame sa discographie sur le label de Philadelphie Gotham, firme qui lui permet de connaitre son premier succès avec « Hot Rod Shotgun Boogie No 2 », une compo de son mentor Webb Pierce avec lequel le jeune Young tourne fréquemment. En deux coups de cuillères à pot, le jeune guitariste chanteur rejoint le Grand Ole Opry et parvient à décrocher un contrat de dix ans avec la firme Capitol, une manne incroyable à l’époque pour un artiste Hillbilly débutant. En novembre 1952, à tout juste 20 ans, il monte sur la deuxième marche des charts Country avec « Goin’ Steady ».
Mais notre chanteur doit laisser le micro et sa guitare au profit d’une tenue militaire pour aller jouer au petit soldat lors du conflit avec la Corée pendant près de deux ans. Le guitariste ne servira pas en première ligne, un général, admirateur de l’artiste, lui permet de jouer au sein des clubs de l’US Army et même d’enregistrer quelques microsillons pour Capitol, pendant que ses collègues se font dessouder dans les rizières ou près du Fleuve Yalu. Eh… ça a quand même du bon la Country!
A sa démobilisation en 1954, l’ancien soldat de parade se remet illico au micro, poussé par Capitol qui veut une réponse Country face à la vague déferlante du Rockabilly avec les arrivées d’ELVIS et de Gene VINCENT. Il lui faudra attendre le mois de mars 1955, pour décrocher la timbale avec « Live Fast, Love Hard, Die Young », un Hillbilly Rock qui atteint la 1ère place des classements Country. Si l’ancien soldat méprise le Rockab, registre qu’il exècre, cela ne l’empêchera pas d’interpréter quelques titres musclés comme « Honey Stop! (And Think Of Me) », « I’m A Poor Boy » dans un style proche de Johnny HORTON, « I’m Gonna Live Some Before I Die » un excellent Hillbilly Rock avec Hank Garland à la guitare, ou « I Can’t Dance ».

Faron Young va s’installer dans les charts Country durant une quinzaine d’années. Ces deux galettes (durée 2 H 22) contiennent pas moins de 25 Top Ten Country. Au milieu des années 50, Faron Young s’essaiera au cinéma dans de petits westerns ou de modestes séries B, ce qui renforcera sa popularité auprès du public américain. Il faut dire qu’avec ses chemises « Nudie » (du tailleur créateur Nudie Cohn), notre séducteur faisait mouche auprès du public féminin. Au niveau du répertoire, Young va conjuguer Hillbilly classique, Nashville Sound, Honky Tonk, ballade et chansons Country à la mode crooner.
Excellent chanteur, Young va aussi se singulariser en n’hésitant pas à reprendre des chansons composées par de jeunes nouveaux songwriters comme le « Sweat Dreams » de Don Gibson ou « Hello Walls » de Willie Nelson. Mais comme souvent, les bonnes choses ont souvent une fin. Au début des années 60, les Etats Unis subissent une complète mutation tant géopolitique que musicale. Il en va de même pour le chanteur, il divorce, se complait dans des aventures amoureuses multiples et sans lendemain, plonge dans l’alcool, les substances prohibées et dans la médication principalement pour digérer des tournées aussi harassantes qu’incessantes. En 1963, Capitol le lâche et Young atterrie chez Mercury qui l’oriente vers le Nashville Sound et une Country souvent insipide et sans originalité, sa maison de disque tente de le présenter en duo en compagnie de Margie Singleton, mais rien n’y fait. Il connaitra un dernier succès en 1971 avant de rejoindre en vain la MCA en 1979 pour un contrat de deux ans et des productions de plus en plus médiocres.
La suite ne sera pas rose et deviendra carrément noire. Obligé d’enregistrer sur de minuscules labels, l’ancienne icône Country, épuisé par ses excès, tombe dans l’oubli, devient de plus en plus aigri, brutal et tombe dans une mélancolie maladive. Souffrant d’un emphysème pulmonaire le bon Faron nous quitte, oublié de tous, en décembre 1996 en se déchargeant son fusil de chasse dans la cervelle. He oui … ça ne rigole pas toujours au pays des cowboys et des countrymen.

Soyons francs, si cette compilation propose en ordre chronologique la meilleure période de cette ancienne gloire, il faut avouer que le répertoire nashvillien, porté sur un hillbilly honky tonk des plus classique, n’engendre que peu souvent l’enthousiasme. Il faut être américain et probablement avoir plus de 75 ans au compteur pour apprécier comme il se doit le répertoire présentement compilé. Ce double CD comporte bien une bonne quinzaine de faces intéressantes, à condition de vouloir se mettre dans l’ambiance et d’apprécier le son de Music City mais cela fait trop peu pour que ce recueil puisse récolter la moyenne. De plus, Acrobat a zappé deux titres issus du label Gotham et 18 titres Capitol, ce qui aurait permis d’avoir une complète discographie de cette période. On peut se demander pourquoi Acrobat n’a pas incorporer les faces manquantes dans un 3ème CD. Peut être par soucis d’alléger notre supplice ?
On préfèrera orienter les lecteurs et amateurs de Country vers la compilation « Hi-Tone Poppa » publiée en 2006 par le label Bear Family. Cette dernière ne contenait certes que 32 morceaux mais cet opus de la série « Gonna Shake This Shack Tonight » se révélait plus énergique et avec un nombre de pièces faibles moins important. Résultat des courses, cette compilation ne récolte qu’une modeste note de 2/5, le temps semblant avoir fait son œuvre sur un répertoire devenu obsolète et démodé.