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1997 Rockin' This Joint Tonight

KID THOMAS - Rockin' This Joint Tonight (1997)
Par LE KINGBEE le 23 Août 2016          Consultée 1966 fois

Certains chroniqueurs de FP ont indiscutablement un faible pour les seconds couteaux et les loosers. Certains de ces nombreux artistes n’ayant pas réussi à percer dans le monde impitoyable de l’industrie du disque méritent souvent un petit détour. Au fil des années, le crédo de cette industrie ne se résume désormais qu’à un seul mot : VENDRE ! Certains lecteurs pourront rétorquer que c’était l’objectif initial de cette industrie florissante et que je suis trop naïf ou inadapté à notre époque. Je répondrais simplement que la montée en puissance de nombreux petits labels indépendants (principalement aux USA) correspondait plus ou moins à une contre attaque contre les grandes firmes (majors) de l’époque, et ce dès le début des fifties et que de nombreux indépendants permettaient une diffusion artistique et musicale bien plus attrayante que celle voulue et dirigée par les majors. Mais c’est là un autre débat.

Alors notre Kid Thomas pose dès le départ deux problématiques : son nom est souvent confondu avec celui du jazzman Kid Thomas Valentine. Second casse-tête, où classer musicalement ce chanteur ? En Blues, en Rock n Roll ou en Black Rock n Roll ? La réponse me parait évidente, on s’en fout surtout à une époque où il convient de tout étiqueter, de placer le moindre code barre sur le premier objet venu. Mais c’est là aussi un autre sujet !

Revenons brièvement (enfin je vais essayer) sur Kid Thomas, l’exemple type du second couteau ayant laissé peu de trace de son passage. Chanteur au vocal puissant et expressif, harmoniciste au phrasé proche de Little WALTER, Louis Thomas Watts (son vrai blaze) voit le jour en 1934 à Sturgis, un bled perdu du Mississippi. Il a 7ans quand ses parents décident de quitter la misère des champs de coton pour s’établir à Chicago. C’est là qu’il s’initie à l’harmonica auprès du bluesman Little Willie Smith après s’être lancé dans le maniement des baguettes. Dès la fin des années 40, il se produit au Cadillac Babys ainsi que dans les bouges les plus miteux de la Windy City. Il prend le nom de Kid THOMAS et se fait vite un nom dans la périphérie de Chicago. Au milieu des fifties, Bo DIDDLEY, Elmore JAMES ou Muddy WATERS font appel à lui, il devient le remplaçant attitré de Little WALTER lorsque celui-ci est trop ivre pour se déplacer ou jouer. En 1955 il débute sa discographie en enregistrant 8 titres pour Federal sous la houlette de Ralph Bass, mais seuls deux morceaux apparaissent en single. En 1956, il fait équipe pendant quelques mois avec Hound Dog TAYLOR. A leur séparation, Kid Thomas adopte la fameuse coiffure Pompadour et s’oriente de plus en plus vers le Black Rock n Roll. Son chant expressif et énergique se rapproche alors de Litlle RICHARD. Pendant plus de deux ans, il se produit dans le circuit des clubs bas de gamme de l’Illinois et des états voisins, parfois en compagnie de Magic SAM et d’Otis RUSH. Après s’être installé à Denver, sans succès probant, il décide de gagner les rivages plus cléments de Los Angeles. C’est là qu’il éveille l’attention de George Motola, producteur et compositeur prolifique qui a ses entrées chez Flair, Modern et RPM. Il grave son second microsillon avec le remarquable « Rockin’ This Joint Tonight » couplé à un slow blues « You Head What I Said », mais Motola est surbooké et dirige l’harmoniciste vers TRC. Brad Atwood, patron de TRC, voit immédiatement le carton qu’il peut faire avec un tel titre et n’oublie pas de s’accréditer la moitié des droits d’auteurs. Thomas est au sommet de sa forme, un passage à la télévision est envisagé, mais manque de bol, Atwood est obligé de liquider son label suite à des problèmes familiaux.
Il faudra attendre une demi-décennie pour que Kid Thomas réapparaisse en studio. Il se produit maintenant sous le nom de Tommy Louis & The Rhythm Rockers et enregistre deux singles pour la micro label californien Muriel. Les deux 45 tours connaitront un petit succès dans le sud du pays. Au milieu des sixties, Kid Thomas ou Tommy Louis travaille de jour pour un gros brasseur et se produit le soir dans le circuit des concerts privés beaucoup plus rentables que les clubs et les bars. Il jouera pour un show privé à la demande de Dean MARTIN. Le patron du Cozy Lounge, un club huppé de Los Angeles où Kid Thomas se produit fréquemment, lui propose d’enregistrer un nouveau 45 T., mais à peine sorti, le label Cenco tombe en faillite.

En 1969, l’ethnomusicologue anglais Darryl Stolper retrouve sa trace et lui suggère d’aller en Angleterre où le public est friand de Blues et de Nothern Soul, mais l’idée reste à l’état de projet. Une synthèse succincte de ces quelques lignes pourraient laisser croire que notre bonhomme était marqué par la guigne ou le mauvais œil, qu’il se produise sous le nom de Kid Thomas, Tommy Louis, Tommy Lewis ou tout simplement Louis Thomas Watts. Mais non, le meilleur est à venir. On est en 1969, le Kid se produit encore lors de rares concerts et est livreur le jour. Le 3 septembre, il achève une livraison à Beverly Hills lorsqu’un garçonnet surgi de nulle part déboule en bicyclette devant son camion. Le choc lui sera fatal ! Dans un premier temps, aucune charge n’est retenue contre le musicien, c’est un accident comme il s’en produit hélas tous les jours. Devant l’insistance de la riche famille de la jeune victime, la police revient à la charge six mois plus tard. Notre Kid dispose bien de cinq permis dont quatre sont périmés. Arrêté en mars 1970 pour défaut de permis, le chanteur harmoniciste est convoqué au tribunal le 5 avril pour être relâché aussitôt sans la moindre charge. En regagnant son véhicule, le père du garçon est présent dans le parking du tribunal, Thomas lui fait part encore une fois de ses excuses, mais l’homme n’est venu que dans un esprit de vengeance et dégaine son gun sur le chanteur … à l’américaine ! Kid Thomas est déclaré mort à 9 Heures du matin. Le parcours musical de Kid Thomas s’arrêtera brutalement ce jour là, avec une discographie minimaliste de six petits 45 tours.

Certains labels (Cardinal, JSP, Flyright, D’NL ou Norton) lui consacreront des singles et des EP à titre posthume. Les photographies de cet artiste sont rares, en mai 1970, la revue Blues Unlimited lui consacrera un article dans le numéro 72, mais c’est curieusement parmi la communauté du Rock n Roll que ce chanteur méconnu sera le mieux reconnu. Plusieurs labels vont éditer des albums faisant à la fois office d’hommage et de compilation : le label autrichien Wolf par deux fois durant les années 90, El Diablo en 1993, et enfin Rescue, un petit label franco-anglais en 2001 qui proposait 15 titres totalement inédits. Notre choix s’est porté sur « Rockin’ This Joint Tonight » tout simplement parce que cette compil propose le plus de titres (30) de l’artiste.

Le compilateur propose ici un large éventail du registre de Kid Thomas. On y retrouve des Blues estampillés de Swamp « Beulah Come Back », « Jivin’ Mess » ou « « You Are An Angel » qui ne peut évoquer Lonesome Sundown, des pièces oscillant entre Delta et Chicago ‘ »The Spell », des Rockin’ Blues patinés de Boogie, à l’instar de Joe Hill Louis, comme « Come Here Woman » ou « She’s Fine ». Kid Thomas pouvait aussi s’illustrer dans du Chicago Blues typique comme en atteste « Here’s My Story ». Mais c’est bien évidemment « Rockin’ This Joint Tonight », un Black Rock n Roll dévastateur avec un harmonica survolté et un chant évoquant Little Richard qui aura marqué la carrière du chanteur. « Wail Baby Wail » un Rock n Roll avec sax hurleur témoigne lui aussi d’une fouge impressionnante. Kid Thomas avait plus d’une corde à son arc, il pouvait se montrer redoutable dans le domaine du Slow Blues comme en attestent « The Hurt Is On » ou « Five Long Years » d’Eddie Boyd. Dernières petites démarques dans la Soul, le timbre et l’émotion dégagée par le chant prenaient une profonde ampleur sur les titres « I’ ve Been Crying » qui renvoie vers Otis REDDING, « Ninety Nine And Half » immortalisé une première fois par Wilson PICKETT puis CREEDENCE et DR. FEELGOOD, « Here Comes The Night » compo de Bert Russell (alias Bert Berns) popularisée par Lulu et plus tardivement par les Them, ou « Doggin’ Around » qui flirte avec le répertoire des Soul Stirrers.

Kid Thomas, poissard de première, n’a pas eu la carrière discographique due à son talent. Cette rétrospective de 30 titres naviguant au grés des plages entre Chicago, Delta, Swamp Blues, Soul et Rock n Roll mérite une attention soutenue. Un artiste authentique.

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- Kid Thomas (chant, harmonica)
- Marshall Hooks (guitare)
- Joe Bennett (guitare)
- W. James (guitare)
- Lloyd Glenn (piano)
- Little Willie Smith (batterie)


1. Beaulah Come Back.
2. The Wolf Pack.
3. The Spell.
4. Come Here Woman.
5. Jivin' Mass.
6. She's Fine.
7. Here's My Story.
8. Rockin' This Joint Tonight.
9. You Are An Angel.
10. Wail Baby Wail.
11. Five Long Years.
12. Lookie There.
13. Cozy Lounge Blues.
14. Willowbrook.
15. You Are An Angel. (version 2)
16. The Hurt Is On.
17. I Love You So.
18. The Spell. (alternate 2)
19. The Wolf Pack. (alternate 1)
20. The Wolf Pack. (alternate 2)
21. The Wolf Pack. (alternate 3)
22. Beaulah Come Back. (alternate 1)
23. Beaulah Come Back. (alternate 2)
24. Beaulah Come Back. (alternate 3)
25. Come In This House.
26. Beaulah Come Back. (alternate 4)
27. I've Been Crying.
28. Ninety Nine And A Half.
29. Here Comes The Night.
30. Doggin' Around.



             



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