2002, presque 20 ans que la légende BAUHAUS est en hibernation. On croyait la bête enterrée depuis 1983, elle fut incroyablement ressuscitée sur scène en 1998 puis à présent en 2005... Mais toujours pas de nouveauté studio (on me chuchote dans l'oreillette que... chut!!).
Cependant en 20 ans les différents membres de ce groupe mythique ne se sont pas tournés les pouces... à commencer par leur charismatique chanteur, Peter MURPHY.

Dans ce 6ème opus d'une carrière solo en dents de scie débutée en 1986, la pop très typée 80's des précédents albums va sembler bien loin. Peter rend ici hommage à sa terre d'accueil, la Turquie, et nous fait don d'un véritable bijou du Moyen-Orient.

Istanbul, le balcon d'une chambre d'hôtel, le soleil de l'après-midi est assommant. La vue de la ville bouillonnante qui s'agite sous les yeux de l'homme, accoudé au rebord, lui donne des vertiges. Les notes orientales d'un kanun s'incrustent dans l'atmosphère, les interrogations de cet homme prennent vie grâce à cette voix chaude, reconnaissable entre mille.

Mal à l'aise, en sueur, il rentre dans la chambre, s'isole de ce soleil de plomb. La relative pénombre de la pièce, transpercée par quelques raies de lumière, laisse percevoir le rideau de poussière, étouffant, qui s'incruste partout. Ce violon qui bourdonne à ses oreilles, laisse l'homme haletant, épuisé.

Allongé sur ce lit qui lui torture le dos, la migraine arrive, elle lui scie littéralement le cerveau. De lointaines vocalises arabes finissent par le bercer et le plonger dans une somnolence où son idée fixe le rattrape encore une fois. Cette obsession, martelée sous les rythmes tribaux, finit par avoir raison de lui. Il rêve. Il rêve de cette femme, de la femme qu'il aime, pour laquelle les métaphores sont inépuisables. Il se sent bien, quelques gouttes de pluie semblent perler sur son visage alors que sa vision onirique s'efface petit à petit pour le ramener à la réalité.

La blancheur agressive qui filtrait des volets il y a quelques heures, a laissé place à une douce teinte orangée. Le réveil est pénible, presque cruel. Cette solitude que l'homme rompit dans son sommeil le reprend à la gorge. Son coeur pulse dans sa tête, le souffle vaporeux d'un mey l'enveloppe. Il ne peut rester ainsi dans cette tristesse qui l'étreint. Il doit la retrouver.

La moiteur de l'hôtel laisse place à l'air sec de la ville. Il marche, au ralentit comparé à la foule qui l'entoure, la circulation, les tramways qui sectionnent momentanément les routes à quelques mètres de lui. Cette ville qu'il aime tant, c'est la ville de ses rêves, de son amour. Les senteurs de la capitale l'enivrent.
Dans sa tête il se remémore encore une fois comment ils en sont arrivés là, bête erreur en somme.

Le métro, le rendez-vous, est-elle là? Il est temps pour lui, le moment est arrivé, comment lui dire? Une plainte implorante? Des excuses? Il trouvera les mots...

"Dust", une ambiance incroyable, une musique dépaysante, une voix tout bonnement sublime, Peter MURPHY n'a jamais laissé passer autant d'émotions que sur cet album, qui atteint des sommets sur le morceau épilogue de l'album, l'épique "Subway". Un chef d'oeuvre, le travail d'orfèvre d'un grand artiste.