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MEMPHIS GOSPEL SOUL  |  COMPILATION

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COMPILATIONS

2007 Can't Find Happiness
 

- Style : Ann Peebles , Candi Staton , Aretha Franklin , Blue Cheer

BARBARA & THE BROWNS - Can't Find Happiness (2007)
Par LE KINGBEE le 28 Février 2017          Consultée 1331 fois

Cette compilation est la preuve que l’Industrie du Disque marchait sur la tête depuis la fin des années 60 (peut être même bien avant). En effet, à l’écoute d’un tel recueil, on peut se demander pourquoi BARBARA & The BROWNS n’a enregistré que neuf petits singles entre 1964 et 1972. Comment un tel poisson a-t-il pu passer à travers les mailles du filet ? Certes, la ville de Memphis regorgeait de nombreux talents mais cela n’explique pas tout. N’accablons pas l’Industrie du Disque plus que nécessaire, il serait facile de lui mettre sur le dos cette énième injustice. En fait, si Barbara BROWN n’a pas une discographie plus importante, elle le doit aussi à elle-même. Nous allons rapidement voir pourquoi.

Barbara BROWN est issue d’une famille nombreuse comptant dix sœurs et deux frères. Chez les Brown, tous les enfants chantent sur les bancs de leur église. A cette époque, chaque congrégation dispose de sa chorale, la ville de Memphis n’échappe pas à la règle, bien au contraire.
Depuis l’apogée de Sun Records, le célèbre label à rondelle jaune fondé par Sam Phillips, de nombreux petits entrepreneurs se sont engouffrés dans la brèche. Jim Stewart, un ancien employé de banque, a fondé Satellite (futur Stax), le disquaire Joe Cuoghi et Quinton Claunch, patron d’une quincaillerie, sont à la tête de Hi Records. De son côté, Doc Russell, un pharmacien, a créé Goldwax tandis que Chips Moman a monté dès le début des sixties le studio American Sound. L’ancien cinéma Royal s’est transformé en studio sous la houlette de Willie Mitchell, sans oublier la création d’autres labels comme Sounds of Memphis, Onyx, Sonic ou Sam Phillips Recordings. Ces différentes structures rapportaient à la ville de Memphis plus de cent millions de dollars de chiffre d’affaire à la fin des années 60.

Revenons à Barbara, les sommes colossales citées plus haut ne font pas partie de son univers. En fait, Barbara BROWN n’a comme seuls centres d’intérêts que sa foi, son environnement familial et le groupe de Gospel The Brown Sisters, un petit ensemble où elle chante en compagnie de trois de ses sœurs Betty, Roberta et Maurice (oui c’est bien le nom d’une des filles de la famille). Eh oui, c’est parfois simple la vie !
Les choses changent quand Richard, l’un des deux frangins de la fratrie Brown, prend contact avec Chips Moman pour enregistrer deux titres de Gospel. Moman auditionne le groupe. Impressionné par le chant de Barbara, il leur propose d’enregistrer « Big Party » une chanson séculière qu’il vient d’écrire. Les quatre sœurs Brown sont alors accompagnées par le guitariste Clarence Nelson (futur Sam The Sham, James Carr et O.V. Wright) et de l’organiste Bobby Wood (futur Elvis PRESLEY, Willie NELSON, Emmylou HARRIS et j’en passe). Barbara enregistre dans la foulée « You Belong To Her ». Le résultat est loin des attentes de la chanteuse, elle venait enregistrer du Gospel et se retrouve avec deux titres de Soul Gospel. Dans un premier temps, les deux titres sont publiés sur le label Wil Mo de Chips Moman et revendus aussi sec à la Stax. On est en 1964 et Barbara & The Browns fait son entrée dans les charts à la 97ème place. Suite à ce premier petit succès, Barbara BROWN enregistre deux nouveaux singles pour la firme aux doigts qui claquent (non le logo n’existe pas encore) dont une composition de Steve Cropper « In My Heart ». Mais les deux disques ne rencontrent pas le moindre succès, la Stax n’a pas jugé bon de faire la moindre promotion et laisse tomber la chanteuse comme une vieille chaussette.

En septembre 1966, Barbara & The Browns rebondit chez Cadet, filiale de Chess Records. L’ensemble participe à une session de plusieurs titres accompagné par la fine fleur des accompagnateurs de Memphis (le guitariste Reggie Young, le bassiste Tommy Cogbill et le batteur Gene Christman). Cadet ne publie qu’un seul 45tours, le second microsillon regroupant « Can’t Find No Happiness » et « I’m Gonna Start A War » sera pressé mais pas distribué, malgré l’insistance du producteur Charlie Chalmers, un ancien sax de Charlie Rich, Jerry Lee Lewis et Wilson PICKETT. En fait, il semble bien que certaines maisons de disques mettent tout en œuvre pour que la chanteuse de Memphis ne perce pas outre mesure et ne fasse pas d’ombre aux labels Stax, Goldwax et Atlantic. Eh oui, on peut dire que Barbara BROWN est plus ou moins la victime collatérale d’une guéguerre stratégique et économique entre plusieurs puissantes firmes.

Fin 67, Atco, filiale d’Atlantic, publie un single avec « Can’t Find No Happiness » couplé à « Great Big Thing », mais encore une fois aucune promotion d’envergure n’est mise en place. Seule une petite quantité de disques est expédiée aux animateurs radio. Une façon délicate de placer la chanteuse sous l’éteignoir sans avoir l’air d’y toucher. Bien des années plus tard, certaines langues se délient : des membres dirigeants d’Atlantic craignaient que Barbara fasse de l’ombre à Aretha FRANKLIN, Marvin GAYE, Otis REDDING et consorts. Une rumeur qui pourrait paraître paranoïaque mais qui se tient.
En 1968, Charlie Chalmers parvient à convaincre Mike Curb (futur président de Verve Records et compositeur prolifique de musique de films) d’enregistrer la chanteuse pour Tower Records, une sous-marque de Capitol. Curb (futur patron de Curb Records, label dédié à la Country) insiste pour que Barbara reprenne « Things Have Gone To Pieces », une ballade country de Leon Payne et gros succès de George Jones qui fit monter la chanson dans le Top Ten en 1965. Tower a beau gorger cette superbe ballade de violons, le disque fait un flop.
Trois ans plus tard, Barbara et ses sœurs sont signées par Gene Lucchesi, patron du label MGM XL Sounds Of Memphis. Lucchesi a connu un succès monstre avec l’enregistrement de « Wooly Bully » par Sam the Sham and the Pharaohs, mais le producteur suit Barbara depuis ses débuts. Clarence Nelson lui a conseillé la chanteuse quand il était guitariste pour les labels XL et Pen dirigés par le même Lucchesi. Suite à un accord avec la MGM, le label Sounds Of Memphis bénéficie d’une distribution plus large, d’une équipe de songwriters qui feront parler d’eux (George Jackson et Dan Greer) et surtout Lucchesi a les coudées franches pour enregistrer les artistes de son choix. Il vient d’enregistrer Lou Robert, Dan Greer, The Minits et vient de prendre sous contrat The Ovations. Le bonhomme est à la recherche d’un bon coup un peu à l’image de Sam The Sham dont le « Wooly Bully » s’est vendu à plus de trois millions d’exemplaires.
Le 8 janvier 1972, Barbara & The Browns participe à une session avec quatre titres à la clef. La formation remet le couvert le 4 avril avec de nouveaux morceaux. Trois singles sont alors publiés par le label. Malheureusement, l’accord avec la MGM prend fin alors que les singles viennent de sortir dans les bacs, le label de Memphis se retrouvant en faillite et Lucchesi obligé de mettre la clé sous la porte. Barbara et ses sœurs ne connaîtront jamais le succès qu’elles étaient en droit d’espérer. Barbara Brown ne retournera jamais en studio, la formation familiale se contentera de revenir à sa première vocation : chanter les louanges du Seigneur.

Cette compilation de 20 titres, éditée par le label anglais Ace en 2007 et naviguant entre Gospel Soul et Deep Memphis Sound, permet de découvrir Barbara & The Browns. L’ensemble de Memphis n’ayant pas enregistré le moindre album, c’est bien sûr vers cette compilation qu’il faut se rabattre pour avoir le plaisir d’entendre l’un des trésors cachés de la Southern Soul. Fidèle à son habitude, Ace Records trouve le moyen de nous offrir pas moins de 7 titres totalement inédits. Cet opus pourrait presque faire figure d’anthologie si le compilateur n’avait pas oublié d’incorporer les 6 faces gravées par la Stax (probablement pour une histoire de droits). Au fil des pistes, comment ne pas succomber à la voix de Barbara BROWN ? La chanteuse peut compter sur des arrangements mitonnés aux petits oignons, des accompagnateurs hors pairs et des compositions de haute facture. Que cela soit dans la ballade, la Soul Gospel ou sur les pièces plus séculières, Barbara BROWN fait mouche pratiquement à chaque morceau.

Si « Big Party » demeure le plus gros succès avec une entrée au hit parade US, la chanteuse distille de nombreuses petites pépites qui auraient mérité meilleur sort. Le cuivré « Plenty Of Room » ne peut qu’évoquer le futur répertoire d’Ann PEEBLES. Si le timbre vocal de Barbara BROWN reste fortement imprégné par les stigmates des chants d’églises, son chant s’annonce jubilatoire sur le standard Blues de Willie Cobbs « You Don’t Love Me ». Si le morceau a connu de superbes versions (Magic SAM, Albert KING ou Ike et Tina TURNER) BROWN met toute sa conviction et son émotion dans ce morceau, relançant sans cesse l’intensité et bien soutenue par ses trois sœurs au backing. La ballade plaintive « I Don’t Want To Have To Wait » diffuse un déchirant cri de douleur renforcé par une guitare mélodramatique. Les influences de Country Soul transpirent dans la ballade « Things Have Gone To Pièces » pour une version sans commune mesure avec celles de George Jones, Conway Twitty ou Merle HAGGARD. Van MORRISON a repris ce titre en s’inspirant de la version de Barbara BROWN. Autre grand moment de Memphis Soul avec « If It’s Good To You » qui évoque fortement les productions de Willie Mitchell avec la guitare funky de Mabon « Teenie » Hodges. Parmi les pistes inédites, « Man Around The House » se rapproche du « Stand By Your Man » de Candi STATON gravé deux ans plus tard.
« Can’t Find Happiness », contrairement à ce que laisse entendre son titre, procure un intense moment de bonheur.

Cette compilation figure parmi la quintessence de la production Soul de Memphis de la fin des sixties. Barbara BROWN demeure le pendant féminin de James Carr et Spencer Wiggins. Barbara Jean Brown Armstrong s’est éteinte à Memphis à deux pas du lieu qui l’avait vu naître en février 2010, à l’âge de 74 ans.

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- Barbara Brown (chant)
- Roberta Brown (chant, chœurs)
- Maurice Brown (chant, chœurs)
- Betty Brown (chant, chœurs)
- Reggie Young (guitare 2-4-7-8-12)
- Mabon 'teenie' Hodges (guitare 3-5-6-9-10-17-18)
- Leroy Hodges (basse 3-5-6-9-10-17-18)
- Tommy Cogbill (basse 2-4-7-8-12)
- Howard Grims (batterie 3-5-6-9-10-17-18)
- Gene Christman (batterie 2-4-7-8-12)
- Elmer Jackson (batterie)
- Melvin Lee (basse)
- Wayne Jackson (trompette 3-5-6-9-10-17-18)
- Andrew Love (saxophone 3-5-6-9-10-17-18)


1. Can't Find No Happiness.
2. It Hurts Me So Much.
3. If I Can't Run To You I'll Crawl.
4. I Don't Want To Have To Wait.
5. Pity Of Fool.
6. Big Party.
7. Plenty Of Room.
8. I'm Gonna Start A War.
9. You Don't Love Me.
10. Watch Dog.
11. Man Around The House.
12. Got To Be Somebody.
13. Things Have Gone To Pieces.
14. Play Thing.
15. Great Big Thing.
16. There's A Look On Your Face.
17. If It's Good To You (it's Good For You).
18. Watch Dog (alternate).
19. Things Have Gone To Pieces (démo).
20. It Hurts Me So Much.



             



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