Dix ans après leur dernier album (Shrinkwrapped), les Gang Of Four reviennent en force avec un « nouveau » disque et surtout une notoriété retrouvée due - pour faire court - à l’émergence de groupes comme Franz Ferdinand. En effet, à l’écoute des jeunes formations rock, on se dit qu’il est impossible d’être indifférent à l’influence évidente du Gang sur l’ensemble de la production actuelle. Un son brut, une voix nonchalante, guindée et la volonté de balancer le rythme qui tue : cette recette fonctionnait déjà en 1979, date à laquelle le groupe (formé à Leeds un an plus tôt) sort son premier opus intitulé Entertainment ! . Suivent deux autres efforts, Solid Gold (1981) et Songs Of The Free (1982). La discographie du groupe ne s’arrête bien entendu pas là mais Return The Gift est en fait une relecture des meilleurs titres des trois albums cités auparavant tandis qu’un deuxième disque regroupe la plupart de ces mêmes morceaux repris par certains groupes actuels comme les Yeah Yeah Yeahs, les Rakes ou les Dandy Warhols. Gang Of Four fait donc du neuf avec du vieux… L’exercice semble périlleux et vain, pense-t-on !

Que nenni ! Return The Gift est a contrario un disque bourré d’énergie, qui décuple les qualités intrinsèques des morceaux presents ici comme les imparables « To Hell With Poverty », « Not Great Men » et « I Love A Man In Uniform ». Le groove est intact, servi de surcroît par une musique plus incisive et nerveuse à souhait. On se (re)plonge dans l’univers de Gang Of Four sans broncher, de façon excessivement naturelle ! Il faut dire que certains titres sont tout simplement géniaux. Au débotté, on peut citer l’insistant « Natural’s Not In It », l’hypnotique « Paralysed » et le monstrueux « Why Theory ». On notera un travail d’orfèvre au niveau de la section rythmique, surtout cette batterie, décidément loin d’être primaire. Le premier disque est à n’en pas douter une belle réussite.

Côté reprises (qui sont autant de remixes), on remarque d’emblée une volonté d’appropriation tout à fait louable. Même si elle est intermittente, elle constitue le principal intérêt de ce second disque où l’on trouve par exemple des parties plus électro comme sur « I Love A Man In Uniform » (Yeah Yeah Yeahs) et « Ether » (Tony Kanal). Pourtant, certains titres sont moins évidents et sont parfois dispensables, je pense en premier lieu à un « Why Theory » plutôt indigeste (Amusement Parks On Fire) et à un « What We All Want » poussif des Dandy Warhols. Bien qu’inégal, ce disque offre toutefois une alternative parfois brillante au premier disque comme en témoigne le « Natural’s Not In It » des Rakes.

Return The Gift est en résumé un album approprié à la circonstance. L’énergie post-punk de l’ensemble reste d’actualité. C’est aussi l’occasion pour beaucoup d’entre nous de découvrir un groupe définitivement influent et talentueux. On pourra regretter le manque de nouveauté et l’aspect commercial qu’implique un disque ne contenant que des ré-enregistrements mais l’important n’est finalement pas là. Il faut écouter cet album sans a priori, sans retenue et sans glose inutile. Juste pour ce qu’il est, c’est-à-dire une véritable tuerie… au moins dans son premier acte, le second restant en deçà !