Rickie Lee JONES a rencontré un succès immédiat et inattendu via son premier album éponyme en 1979, qui contenait notamment le single "Chuck E’s in Love" inspiré des aventures vécues avec le duo infernal Tom WAITS et Chuck E. WEISS.

Mais ce triomphe a été escorté de tentations auxquelles elle eut du mal à résister. Tant et si bien qu’à l’orée des années 80, sa vie bascula, sa rupture avec Tom WAITS étant officialisée, ce qui la laissa dans un état de désespoir profond –. Des décennies plus tard, on peut voir à quel point ce sujet l’émeut encore via un passage télévisé chez Thierry Ardisson.

Après six mois passés en compagnie de la dangereuse cocaïne, elle parvient finalement à transcender son amertume en musique, publiant courant 1981 Pirates dont l’énigmatique photo empruntée à Brassaï capture aisément l’ambiance sépulcrale.

Louie sur "Living It Up" et que "We Belong Together" se charge directement d'interpeller (Je pense que t’as trouvé ça au Mexique avec ton père). Dans un accès de masochisme insensé, le titre éponyme citerait même une de ses chansons Mais rien à faire, les sentiments ne sont pas réciproques (déchirant "A Lucky Guy").

Musicalement, Pirates exprime ainsi une douleur continue via un propos doux-amer parfois aigre, tel un STEELY DAN en pleine dépression (Donald FAGEN est présent parmi les musiciens). La pièce de maître "Traces of the Western Slopes" s’invite durant huit minutes sur les atmosphères douteuses d’un Climate of Hunter de Scott WALKER encore en gestation. Seul "Woody and Dutch on the Slow Train to Peking" s’octroie un momentané instant de légèreté, anomalie d’un disque trouble et psychotique toutefois nécessaire afin de compléter l’exorcisme.