Il y a chez TYGERS OF PAN TANG cette attendrissante conviction que le hard rock des années 2000 peut continuer à puiser dans le vivier encore bouillonnant des années 80 tout en restant pertinent et actuel. Le groupe du rescapé Robb Weir a d’ailleurs eu l’occasion de le prouver à travers les récentes publications de son groupe, proposant par exemple en 2016 un formidable album sans titre qui ne doit son absence de succès en dehors du cercle des initiés qu’à une conjoncture défavorable pour les vieux rockers. De temps en temps, donc, les Anglais viennent nous en coller une derrière les oreilles avec la rage d’un setter privé de son spam. Cet album sans titre faisant figure d’exception, il faut néanmoins reconnaître que les grisonnant rockers, malgré un enthousiasme remarquable, ne parviennent pas à approcher systématiquement la perfection. Ainsi, quatre ans après un Ritual un peu frustrant, le groupe revient avec Bloodlines dont la superbe pochette ne parvient pas à masquer tous les défauts.

Cet album, comme ses prédécesseurs récents, n’hésite pas à aller au charbon, et à proposer des morceaux nous donnant l’impression que les années 80 n’ont jamais pris fin. On se retrouve ainsi à savourer le rapide et furieux "Fire on the Horizon", excellent morceau qui témoigne de cette vigueur du groupe anglais. La voix du chanteur Jacopo Mielle rappelle ici celle de Don Dokken, dans cette tendance à faire durer les syllabes et à les prolonger, donnant au chant un côté presque paresseux, en tout cas nonchalant. Ce qui offre un bel équilibre face à la fureur de ce riff percutant. "Take no shame for breaking the silence", nous chante Jacopo. Et en effet, c’est sans gêne ni honte que le groupe propose quelques bons moments. "Kiss the Sky", qui s’inscrit dans une tradition séculaire, est un hard rock frais et groovy, qui séduit et embarque. "A New Heartbeat", parfaitement exécuté, est une véritable leçon de composition. Voici le TYGERS OF PAN TANG que l’on aime, intense et impliqué. Et puis, il y a cette capacité du groupe à basculer de manière très naturelle et organique des couplets vers les refrains, donnant aux morceaux une cohésion et un impact appréciables.

L’album n’est néanmoins pas toujours au niveau des titres précités. Si l’intro de "Back for Good", avec sa basse ronflante et ses "oh oh oh" fédérateurs semble taillée pour le live, il est dommage que le couplet qui lui succède, en tempo medium, soit assez basique, tandis que le pré-refrain évoque l’univers sans grande vigueur de MÖTLEY CRÜE. "Light of Hope", avec sa progression mélodique assez bateau, qui semble presque forcée, fait tourner la machine à vide. Le groupe fait preuve de plus d’audace en proposant avec "Taste of Love" une ballade désabusée, introduite par un piano sombre et une guitare écorchée. Et si le refrain ne semble pas au niveau des enjeux soulevés sur les couplets, l’exercice se fait tout de même appréciable.

Un bon cru ? Oui, TYGERS OF PAN TANG sait indubitablement construire un album de hard rock répondant au cahier des charges du genre, tout en proposant une production puissante et moderne. Il manque simplement sur ce treizième album du groupe un petit grain de folie, peut-être un soupçon d’implication également (notamment au niveau du chant) pour en faire autre chose qu’un album "de plus" dans la discographie du groupe.