Il y a une frange irréductible des fans d’HANOI ROCKS qui ne tient pas en haute estime ce Two Steps from the Move, arguant que ce serait le disque de la compromission, que le groupe aurait vendu son âme au diable en tentant de partir à la conquête des States. Vision romantique, refrain élitiste connu, ceux-là préfèrent évidemment Self Destruction Blues.
Moi, j’ai découvert le groupe en prenant une gifle aller-retour constituée du disque studio qui nous occupe et du double live All Those Wasted Years, sortis tous deux en 1984. À peine remis du choc, je partais à la recherche de la discographie antérieure des Finlandais, très mal distribuée en France, et je collectionnais les déceptions. Tous les albums précédents faisaient pâle figure à côté de l’exécution furibarde des versions live et de la production massive de Two Steps par Bob Ezrin.

En signant chez CBS, le combo bénéficie d’un budget qui lui permet enfin de magnifier ses compos. Monroe est fan d’Alice Cooper ? Il hasarde le nom d’Ezrin pour produire le disque et la major accepte. Ezrin nous fait l’immense plaisir de nous épargner les hélicos, les cui-cui d’oiseaux et autres bruitages pénibles et signe une production classieuse qui met en valeur huit compos originales, une réécriture et une reprise, toutes impeccables. Comme à son habitude, l’homme participe aux arrangements (et s’incruste dans les crédits, ce qui ne suffit pas normalement) et appelle Ian Hunter pour participer à l’écriture de trois textes, c’est appréciable quand l’anglais n’est pas votre langue maternelle.
Bref, le petit groupe de glam-punk sympatoche a les moyens de ses ambitions et accouche d’un album qui a fière allure. Essayez d’écouter la première mouture de "Don’t You Ever Leave Me" sur le premier album, ce n’est juste plus possible. On pourrait presque dire la même chose de "Up Around the Bend", j’ai beau aimé les CREEDENCE, la version des Finlandais est devenue définitive pour moi.

Est-ce que la fusée HANOI ROCKS aurait atteint la lune si elle n’avait pas explosé en plein vol juste après le décollage, suite à la mort de Razzle dans un accident de la route, assis dans une voiture conduite par Vince Neil? Pure spéculation romantique, le groupe était depuis longtemps au bord de l’implosion. La consommation d’alcool de McCoy et Suicide devenait problématique. Insatisfait depuis un moment, Yaffa avait annoncé sa démission et Razzle lui-même avait semble-t-il engagé des pourparlers avec les sœurs Wilson pour rejoindre HEART. Quant à tout mettre sur le dos du chanteur de MOTLEY CRUE, comme on le lit souvent, c’est tout bonnement stupide, il n’y en avait pas un pour sauver l’autre dans ces bacchanales alcoolisées. J’ ai froid dans le dos rien que de repenser à mes excès de jeunesse. Pas fier du tout. Vince Neil est le plus mauvais chanteur de sa génération, c’est déjà un fardeau, pas la peine d’en rajouter. En revanche, sortir des compilations du CRUE intitulées Music to Crash your Car to (musique sur laquelle emplafonner ta caisse), ça, c’est impardonnable.