La présence, pendant si longtemps, de ce seul et unique et si polémique opus de John CAGE sur FP a presque (je dis bien presque) exclusivement fait partie de mon intégration dans l’équipe de FP – c’est dire que du négatif peut naître le positif (spéciale dédicace à Karim et Vegeta).

Et bien sûr je lui colle 5 étoiles sans hésiter ; non parce que je déraisonne ou cherche à crâner mais tout simplement parce que ces 4 minutes et 33 secondes méritent autant zéro que la note maximale. Pour mieux dire il ne faudrait pas même chercher à noter cet objet pour la simple raison qu’il n’a aucune vocation à être noté. Et pour être encore plus explicite et précis : il n’y a rien, aucune oeuvre de moins notable que celle-ci et ceci parce que ces 4’33 ne sont pas du tout une œuvre, ni de silence ni de musique, mais un acte de pure négation artistique peut-être encore plus radical que l’urinoir de Duchamp.

Le silence ne peut être noté, classifié, rangé, oublié… Il est présent ; il répond Présent. Dans cet ordre d’idée, il faudrait introduire un nouvel élément de notation qui serait le non-notable ; non pas zéro étoile, mais pas d’étoile du tout.

Cela nous ramène au premier paragraphe de ma chronique sur les sublimes Sonates Et Interludes Pour Piano Préparé, à savoir que la réalité de l’acte créatif nous échappe toujours, tragiquement et que, tout aussi tragiquement, ne subsiste que l’image, que le cliché pas même d’Epinal d’une oreille coupée, d’un verre de trop ou d’une ou d’une putain irrespectueuse.
Nietzsche l’avait prédit en affirmant que l’art allait disparaître, englouti par le besoin de fête des hommes. Et voilà que nous y sommes.

Une société pleinement livrée au tourisme et au divertissement ne peut plus produire, engendrer autre chose que du vide et donc, incidemment et par-delà sa rugissante fanfare, du silence – c’est bien le moins.