On ne l'attendait plus, le nouveau Marie CHERRIER. C'est ce qu'on se dit lorsqu'il apparaît enfin devant nos yeux, en magasin. Et alors là, grand changement ! Le style des deux premiers albums s'est complètement effacé pour autre chose, un autre décor, la chanteuse se montre pour la première fois et de façon, disons, éclatante (sur le live, elle penchait la tête pour accorder sa guitare).

Billie, la bagnole rouge et l'ambiance Monument Valley, c'est la couleur donnée au troisième opus qui a mis six ans pour éclore, et sur un label différent : de Caroline Productions, Marie CHERRIER est passée à Comme Tu M'vois. C'est le nom donné à la première chanson qui vient créer la surprise après la pochette.

Glockenspiel, accordéon valsé, grosse rythmique rock lente et verve de voix acidulée, telle est la formule. Marie CHERRIER s'affiche en fille "minuscule" mais libre, sur un cheval avec un chapeau, en renarde du désert, en Calamity Jane, et même si cela bouscule pas mal son image, ça lui va très bien.

Beaucoup de personnes sont déconcertées par l'idée que la belle Onzainoise à l'univers d'inspiration parisienne s'est changée en cow-girl et que son nouveau disque sonne plus pop-rock, machine pour plaire aux masses. Quand c'est aussi bien fait, il est dur de s'en plaindre, et cependant, elle n'abandonne pas la rive gauche, dès le premier titre. Elle ne lâche pas RENAUD non plus.

Haute en couleurs ("Ma Parole"), elle souffle son vent de liberté et nous caresse comme elle nous cingle. Quand elle prononce le mot "gouache", tel un fouet, ça claque, jolie trouvaille ! Elle vient taquiner les bad-boys mais il ne faut pas l'attendre, elle rêve et elle veut qu'il se passe quelque chose. La grande aventure commence.

"J'm'appelle Billie, c'est dans mon corps un sang plus fort et mes haillons sont tombés", "J'offre un chienne à tes dix doigts, qu'tu la promènes s'il te plaira", "C'est ma vie à la tienne, où qu'on soit, y a du Bonnie dans mes veines quand j'suis avec toi"... Avec son argot et sa gouaille, Marie CHERRIER, 28 ans, use d'une image sulfureuse et ses mots habituels prennent une autre forme.

Le personnage de Billie et la présence de Michael Désir pour épauler Marie CHERRIER à la réalisation, font de ce disque un pont entre les structures de GAINSBOURG, les arrangements à la RENAUD et l'ambiance western. "Scotch Billie", "Billie Brouillard" forment les différents chapitres de l'histoire et nous convainquent tous d'une façon ou d'une autre.

La musique fait que le verbiage de la chanteuse populaire est moins au centre de l'attention, mais elle peut travailler sur d'autres idées comme des choeurs aigus et amusants, avec des "Hannn !" d'admiratrices qui se pâment à l'arrivée du héros. Elle passe de l'intime "T'es où ?" à la guitare acoustique au rock hargneux et sautillant de "Gouache Story", avec brio.

Le violon et l'accordéon ont été mis dans le camion, et du côté des mélodies, il y a de quoi s'émouvoir durant ce film musical. Le meilleur est encore gardé pour la fin avec un "Lou, Pour la Suite...", moment de pure grâce, ambiance hypnotique et quelques synthés pourtant bien peu attendus, ce qui reste d'autant plus fort. C'est le meilleur album de la demoiselle à ce jour !