Troisième album du groupe, ‘’In the Land of Grey and Pink’’ est considéré par beaucoup comme l’œuvre majeure de CARAVAN. Sorti en 1971, ce disque est un ravissement. Compositeur principal des deux premiers opus, Pye Hastings laisse ici la composition à David et Richard Sinclair. En ressort une merveille de pop progressive, éblouissante et toute en nuance. La production, bien plus dynamique que par le passé, n’est plus assurée par le groupe mais par David Hitchcock, qui produira notamment ‘’Foxtrot’’ de GENESIS un an plus tard.

La rencontre entre Richard Sinclair et sa femme nous est contée dans ‘’Golf Girl’’, avec beaucoup d’élégance et une certaine insouciance. La diversité musicale entre trombone et piccolo donne le ton de l’album, plus léger et plus accessible que par le passé. Dans ‘’Winter Wine’’, la voix assurée de Richard Sinclair nous plonge dans un voyage littéraire et musical. Le plein épanouissement des membres au sein de cette formation se fait clairement ressentir ici, David Sinclair se fendant notamment de l’un de ses solos d’orgue les plus inspirés. Là où dans l’album précédent les titres plus légers s’intégraient parfaitement à l’ensemble et n’étaient pas de moindre qualité, l’unique titre composé par Pye Hastings ‘’Love to Love You’’ peine à convaincre par sa naïveté et sa rythmique simpliste. Un titre dispensable que seul le piccolo de Jimmy Hastings sauve de la banalité.

A l’image de cette sublime pochette, le titre suivant, éponyme de l’album, est une vraie réussite. Comme sur l’intro de ‘’Winter Wine’’, la guitare acoustique est jouée par un Richard Sinclair omniprésent. Bien que moins marquées, les incursions de David Sinclair sont justes, que cela soit à l’orgue, au piano ou encore au mellotron. Une merveille mélodique qui fait vite oublier le titre précédent.

‘’Nine feet Underground’’ est avec ses 23 minutes le morceau le plus long de toute la discographie de CARAVAN, composé de huit parties bien distinctes aux intitulés fantaisistes comme ‘’la danse des sept mouchoirs en papier’’ ou encore ‘’retiens grand-père par le nez’’. Les six premières minutes sont mélodieuses et harmonieuses, Jimmy Hastings faisant encore des merveilles au saxophone. Parfaitement exécutée, la suite manque toutefois de cohérence et de fluidité. La dernière partie chantée par Richard Sinclair est en revanche magnifique et confère une atmosphère empreinte de mélancolie. Le final, sans grande originalité, reprend le riff principal de ‘’Shunshine of your love’’ de CREAM. Assez étonnant lorsqu’on connaît la force créatrice du quatuor.

Un album décomplexé, aux mélodies divines, moins radical que ses prédécesseurs dans son approche, où la consonance jazz se fait notamment moins présente, et parsemé de quelques imperfections qui n’altèrent heureusement en rien le plaisir que l’on éprouve à chaque écoute. Après le chef-d’œuvre que fut ‘’If I Could Do It All Over Again, I'd Do It All Over You’’, il leur aurait été difficile de faire mieux.