Paul DESMOND, vous connaissez ? Le nom ne vous dira peut-être rien, mais si vous connaissez Take Five de Dave BRUBECK (et qui ne la connaît pas ?) alors vous connaissez son compositeur.
Je vous épargne sa biographie complète, mais Paul DESMOND était un saxophoniste, éminent représentant du cool jazz, qui a joué notamment avec Chet BAKER. C’est surtout pour ses collaborations avec Dave BRUBECK qu’il est entré dans l’Histoire du Jazz. Les deux hommes étaient très proches malgré des caractères différents, notre saxophoniste étant un homme à femme alors que le pianiste était un père de famille à la vie bien posée. L’anecdote raconte d’ailleurs qu’après avoir été renvoyé par BRUBECK à la suite d'une tournée, ce dernier avait interdit à DESMPOND l’accès à sa maison, ce qui ne l’empêcha pas de venir quand même alors que BRUBECK était en train d’accrocher les couches de ses enfants sur une corde à linge. Celui-ci aurait catégoriquement refusé de le reprendre dans le groupe jusqu’à ce que DESMOND propose de faire le baby-sitter pour ses enfants. Une anecdote amusante qui montre l’attachement profond qui liait ces deux hommes, au point que les enfants de BRUBECK le considèrent comme leur oncle et que son fils Michael reçoit son saxophone après sa mort en 1977, justement suite à une tournée avec le DAVE BRUBECK BAND, conséquence d’une vie d’excès de cigarettes et d’alcool.

Mais remettons-nous pour aujourd’hui en 1969. A cette époque, l’âge d’or de la bossa-nova est déjà passé, bien que le genre reste assez populaire. Cela n’a pas empêché DESMOND de sortir en 1966 un album de bossa-nova, intitulé avec humour « Bossa Antigua » (littéralement, « la vieille chose », en opposition à bossa nova, « la nouvelle vague »).
Il y revient donc en 1969 avec ce From the Hot Afternoon, de surcroît bien entouré. La liste des musiciens ayant joué sur l’album est longue comme le bras, mais il se paie en plus les services de Edu LOBOS pour l’écriture des chansons et de Don SEBESKY pour les arrangements. Le premier est un musicien brésilien bien connu et le deuxième a collaboré avec quelques grands noms, ne citons pour l’exemple que Wes MONTGOMERY, Dizzy GILLESPIE ou encore Astrud GILBERTO. Avec eux, les fondations sont posées, il a de bonnes chansons et des arrangements solides, il ne lui reste plus qu’à faire ce qu’il fait de mieux : jouer du saxophone.

Cela aboutit à un résultat solide, des chansons apparemment simples mais en réalité bien complexes. Même si vous n’aimez pas la bossa-nova, il est difficile de résister à l’attrait de ce disque, où fluidité est le maître mot. Il y a tout un orchestre pour accompagner Paul DESMOND, donnant un son riche. L’une des forces de l’album est de savoir laisser la place au saxophone du leader au bon moment, ce qui permet à des morceaux comme « To Say Goodbye » et « Martha and Romao » de rester intimistes. Paul DESMOND s’amuse d’ailleurs bien sur son instrument, allant jusqu’à citer l’éternel « St. Thomas » sur « Catavento » et proposant des solos inventifs.

Une jolie réussite que cet album qui ne reste néanmoins qu’une friandise bien enrobée. Malgré la technique des musiciens, le tout traîne en longueur à cause d’une tracklist trop longue (presque 60 minutes au compteur) qui manque parfois de feeling.