1978. Le punk fait rage. Ça conteste à tous les coins de rue au pays de Sa Majesté. Et lorsqu'on évoque ce mouvement musical et idéologique qui naissait alors pour éclater, par la suite, en d'innombrables sous-genres, comment oublier The CLASH ? Nos Londoniens sortent en cette année leur deuxième album, après un premier effort marqué du nom du groupe, l'année précédente.

A noter l'arrivée de Topper HEADON, batteur historique du groupe. Et ce qui frappe sur cet album, en plus du musicien précédemment cité (ouais, je sais, elle est nulle), ce sont les gros changements par rapport à l'album éponyme ! On sent en effet ce Give 'em Enough Rope bien plus léché que son prédécesseur : les morceaux sont en moyenne plus longs, et l'on sent un gros effort au niveau de la production.

Trop lisses, vendus, les CLASH ? Non ! La rage et l'envie sont toujours là. Vous en convaincra certainement la dynamique des trois premiers morceaux, qui roulent avantageusement des biceps. Écoutez donc « English Civil War » et ses soli virevoltants ! Ou encore le martèlement de « Tommy Gun » !

Une parenthèse douce s'ouvre avec « Julie's Been Working for the Drug Squad », et son piano qui swingue. Plutôt surprenant et d'autant plus agréable.

Pour ce qui est du reste de l'album, sans surprise, ça vient des tripes, comme toujours chez The CLASH : Joe STRUMMER est toujours armé de son timbre inimitable. Le bougre sait adopter sans crier gare des intonations rageuses (raah « Guns On The Roof ! »). À noter des guitares au son plutôt acéré, mises en valeur par la production de Sandy PEARLMAN.

« Give 'em Enough Rope » ne renferme pas de titres vraiment faibles à proprement parler ; il faut dire qu'il est plutôt court : 37 minutes. « Safe European Home », « Last Gang in Town », ou « Drug-Stabbing Time » (rehaussé de saxo !) et son intro plutôt mouvementée sont autant de brûlots efficaces dont nous régale le groupe.

Au rayon « coups de cœur », j'aimerais vous parler de « Stay Free », chantée avec beaucoup d'émotion par Mick JONES. Le riff principal et les mélodies de guitare qui l'accompagnent ont quelque chose de résolument solennel, se balançant subtilement entre enthousiasme et nostalgie. Cette impression douce-amère est d'autant plus soulignée par le texte : « Have a drink on me... but go easy... step lightlty... stay free ». La ligne de basse est géniale, et que dire du passage plus calme qui achève le morceau de la meilleure des façons ?

Niveau paroles, c'est d'un bon niveau : les textes s'accordent plutôt bien avec la musique. Et chantés par STRUMMER, ils prennent toute leur force.
Il est regrettable que le disque se ferme sur « All the Young Punks (New Boots and Contracts) », qui dénote une baisse d'inspiration : longuet et plutôt répétitif.

Pas de réelle révolution avec Give 'em Enough Rope : The CLASH a peaufiné sa formule initiale, l'a intensifiée oserais-je dire. Avec ce deuxième opus, le groupe commencera timidement à s'ouvrir la porte des USA.
On se retrouve donc avec un album assez musclé, mais qui sait se ménager quelques accalmies judicieuses, sans nuire aucunement à l'homogénéité de l'ensemble. Difficile de croire que les Anglais concoctaient alors un cocktail bien plus bariolé, qui sortira l'année suivante. Toujours est-il que Give 'em Enough Rope est un bon album qui je l'espère vous plaira autant qu’à moi.
Jamais facile de précéder un monument...

3,5/5