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2019 Semaphore
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REQUIN CHAGRIN - Semaphore (2019)
Par RICHARD le 14 Février 2019          Consultée 971 fois

En 1997, MC SOLAAR chantait déjà sur son album Paradisiaque que «les temps changent». Ces derniers mots collent indéniablement à l'image que véhicule maintenant INDOCHINE. Oh non, pas encore eux, pourriez-vous me dire. Mais que vient donc faire ici une nouvelle fois Nicolas Sirkis le leader peroxydé alors que ces quelques lignes s'attardent sur le second album de REQUIN CHAGRIN ? C'est que tout simplement et que jusqu'à présent, le destin de ce groupe emmené par la discrète et talentueuse Marion Brunetto semble intrinsèquement lié à celui du vieux corbeau,maintenant devenu canari (bay). Sirkis n'est plus totalement l'épouvantail rock des années 80 ou le perpétuel pestiféré de la décennie suivante. On peut enfin oser dire que son univers touche, émeut. Et même dans un éclat de folie,contrôlé,quand même, en parler comme d'une véritable influence musicale.C'est facile pour des dinosaures comme RENAUD ou DUTRONC de dire tout le bien qu'ils pensent des Indochinois, c'est assurément plus délicat pour un jeune groupe, Sirkis traînant toujours un peu avec lui ce sentiment diffus de gêne, ce qui peut apparaître comme profondément injuste.

Ce n'est pas cette situation qui semble vraiment contrarier REQUIN CHAGRIN, bien au contraire. Le combo originaire de Ramatuelle s'était fait connaître en 2015 avec un premier album qui devait entre autres autant aux BEACH BOYS qu'au son de guitare si typique de Dominik Nicolas, le talentueux et trop discret compositeur de la première période (la meilleure) d'INDOCHINE. Le quatuor faisant ensuite les premières parties de la dernière tournée 2018 du groupe, reprenant sur la toile une de ses plus belles chansons («Les Plus Mauvaises Nuits») et se retrouvant comme première signature sur le nouveau label du fringant sexagénaire. Seul l'avenir nous dira si tous ces points de convergence auront été une chance ou un poids, mais en attendant, laissons tout simplement Sémaphore parler, battre et exister par lui même.

Lorsqu' est sorti en novembre dernier, «Sémaphore» le premier extrait, REQUIN CHAGRIN avait incontestablement misé sur une pop ultra efficace gorgée de spleen, proposant un titre direct et assurément bien construit. A ce titre, le clip servant de support est tout bonnement superbe. Ambiguë, sensuel, à fleur de peau, il est un écho lointain comme un émouvant hommage à Xavier DOLAN ou au sulfureux Gregg ARAKI. On évitera toutes les comparaisons aquatiques, car Brunetto dans ses paroles s'en charge plutôt bien, mais il nage ici assurément dans de belles eaux troubles. Le souhait était évidemment d'espérer un album à la hauteur de ce titre plus que prometteur.

Ce ne sera malheureusement pas totalement le cas. Le principal reproche est identique à celui que l'on a pu faire au premier essai. A savoir qu'il y a comme un léger sentiment de linéarité. Attention, ceci n'enlève rien au plaisir de l'écoute, les 42 minutes défilant paisiblement, mais il est parfois difficile d'avoir un sursaut brutal pour un titre en particulier (à l'exception des «Promesses» pour moi lors de la découverte). Vous savez, le genre de morceau qui vous fait regarder à la première écoute le numéro de la plage sur le lecteur pour y revenir avec plaisir un peu plus tard. C'est d'autant plus frustrant que REQUIN CHAGRIN développe un univers que peu de groupes, voire aucun proposent finalement dans l'univers de la chanson française.

En effet, les Sudistes puisent aussi bien leur inspiration dans une douce pop rêveuse typiquement anglo-saxonne que dans les souvenirs lointains d'une certaine new wave hexagonale. Lorsque cette alchimie fonctionne, le corps est alors parcouru d'un délicieux frisson. Ainsi « Soleil blanc» réussit la prouesse de sonner à la fois comme du COCTEAU TWINS et du DAHO. Ce n'est pas banal, quand même ! C'est cette dualité qui je l'espère fera sur le long terme le charme et l’intérêt de Sémaphore. On la retrouvera avec plus au moins de bonheur dans ce disque qui est avant tout un bel album de guitares. De Dominik Nicolas à Robin Guthrie, de Johnny Marr à Robert Smith, les délicats arpèges rappellent à quel point la mélancolie peut se faire attractive. Ceux-ci se parent d'une intense luminosité à l'exemple de l'irradiant « Rivières » ou des quasiment indochinois « Clairvoyance » et « Mauvais Présage » avec sa merveilleuse image de «chevaux de soie». La nostalgie se fait comme légère et bienveillante, encore une fois.

Parfois, au détours d'un titre, ils se nimbent alors de brouillard comme le soulignent les derniers instants légèrement shoegaze du « Grand voyage » qui pourraient rappeler par instant les premiers efforts de SLOWDIVE. C'est un fait. Marion Brunetto a une certaine aptitude à développer des refrains entêtants et qui ne demandent sans aucun doute qu'à être repris en chœurs. En même temps, ses ouh ouh ou ah ah présents sur la plupart des morceaux y contribuent pleinement. Un exemple ? Le très PIXIES « Nuit » qui voit poindre une irrésistible envie de faire sa Kim Deal façon « Where Is My Mind? » ouh ouh. C'est simple, basique sans doute comme dirait ORELSAN, mais c'est imparable.

Si on a souvent raillé les textes de Sirkis, ceux de Marion Brunetto ne souffriront sans doute pas du même sort. Une fois les paroles comprises, car souvent noyées dans les échos et lointaines (excellent test d'audition lo-fi Audika ), elles libèrent leur fragile imaginaire. A l'instar de son titre, ingénieux moyen de communication, l'album à travers la voix pure de sa leadeuse transmet des émotions simples, celles de la résignation entendue, des non-dits, de la fragilité permanente d'une relation, des amours douloureuses. Sombres, parfois, elles s'opposent alors à la légèreté des guitares et comme encore sur « Les promesses », le résultat est particulièrement poignant. Ses paroles ont la juste saveur des souvenirs des derniers jours d'été.

Sémaphore passe donc avec douceur le cap du toujours délicat second album. Les adeptes de mélancolie rêveuse à la française pourront sans aucune hésitation s'y lover.

Note réelle: 3,5/5

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   RICHARD

 
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- Marion Brunetto (chant, guitare, basse, claviers, batterie)


1. Croisades
2. Clairvoyance
3. Mauvais Présage
4. Soleil Blanc
5. Sémaphore
6. Nuit
7. Dans Le Cœur
8. Les Promesses
9. Rivières
10. Le Grand Voyage



             



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