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Billy BRANCH - The Blues Keep Following Me Around (1995)
Par LE KINGBEE le 18 Mai 2020          Consultée 1360 fois

Né à Chicago en 1951, Billy suit sa famille partie s’expatrier en Californie alors qu’il est âgé de cinq ans. A dix ans, il rentre dans un magasin, bien décidé à s’acheter un instrument de musique. Il opte pour un harmonica, le moins encombrant et le moins cher. Il apprend en autodidacte et maitrise parfaitement l’engin quatre ans plus tard. En 1969, Billy regagne ses pénates pour poursuivre ses études en sciences politiques. Quand il ne bûche pas sur ses cours, il joue le soir au Theresa’s Lounge, célèbre taverne ouverte à la fin des années quarante par Theresa Needham, un juke-joint où tous les grands noms du Chicago Blues se produisirent un jour ou l’autre.
Billy fait ses gammes avec le pianiste Jimmy WALKER avant d’être remarqué en 1975 par Willie DIXON. Une fois son diplôme en poche, Billy décide de ne pas donner suite à son cursus universitaire et tente sa chance au sein du CHICAGO BLUES ALL STARS de Dixon, formation où il va s’aguerrir auprès de l’harmoniciste Carey BELL.

C’est toujours par le biais de Willie DIXON que Billy BRANCH se fait connaitre en Europe grâce à une première tournée européenne en 1977. Il fonde son propre groupe l’année suivante The SONS Of THE BLUES en compagnie de Lurrie BELL (fils de Carey) et Freddie DIXON (rejeton de Willie). Si l’harmoniciste peut se targuer d’avoir placé quelques uns de ces titres dans des compilations dédiées au Chicago Blues, il lui faut attendre 1982 pour enregistrer son premier disque édité par le label allemand L+R Records. Il grave un Live lors de la tournée de l’AFBF 82, mais celui-ci ne sortira que 12 ans plus tard. BRANCH met en boite trois albums marqués par d’incessants changements de guitaristes. Le bonhomme participe à « Harp Attack », un album regroupant Carey BELL, Junior WELLS, James COTTON, un disque comme aime sortir Bruce Iglauer, patron du célèbre label Alligator.

En 2020, Billy s’est produit dans le monde entier, il est à la tête d’une discographie d’une quinzaine de pièces auxquelles il convient de rajouter une demi-douzaine de compilations (souvent des Live). Il figure, en outre, comme sideman sur environ 160 disques. Parmi ce gigantesque éventail, il reste l’auteur d’innombrables sessions pour Johnny WINTER, Son SEALS, Taj MAHAL, Jimmy JOHNSON, Koko TAYLOR, Willie KENT, Aron BURTON, Honeyboy EDWARDS, John PRIMER ou Mighty Joe YOUNG (pour n’en citer que quelques uns).

Mais Billy ne serait-il pas un bien meilleur accompagnateur qu’un meneur de troupe ? La qualité de son chant et son manque d’engouement dans l’écriture demeurent des écueils assez préjudiciables. Billy BRANCH qui figure depuis trente ans parmi les meilleurs harmonicistes lançait un coup de canon avec cet album édité par Verve et qui fera l’objet d’une seconde publication via Gitanes Jazz Productions.

On pourrait croire le titre un peu présomptueux, mais quand on écoute « The Blues Keep Following Me Around », il n’y a pas à tortiller dans cet album, Billy plonge à fond dans le bon Blues et parvient à immerger l’auditeur dans un univers voguant entre Chicago Blues et un Blues urbain aux accents sudistes. Il faut dire que si les guitaristes Lurrie BELL ou John PRIMER ne sont plus de la partie, l’harmoniciste ne perd pas au change avec Carl WEATHERSBY (ex Albert KING, Buster BENTON). La section rythmique avec deux musiciens se situant aux antipodes l’un de l’autre avec le bassiste cajun Cal ARNOLD (ex ATCHAFALAYA, John DuBois) et le batteur Kenny BROWN (ex Buddy GUY, Clarence « Gatemouth » BROWN, BB KING) parvient à créer une dynamique bien groovy alors que le pianiste David TORKANOWSKY (ex Dianne REEVES, NEVILLE BROTHERS, Phillip WALKER) apporte une touche de New Orleans Sound. C’est peut-être par ce biais que ce disque se détache du lot, BRANCH ne reste pas figé dans un Harmonica Blues typique de Chicago.

Curieusement le disque débute par une petite coquille : « Bring It On Home » est accrédité à Sonny Boy WILLIAMSON II au lieu de Willie DIXON. Si Sonny Boy a bien repris le titre, il s’agit d’une proche variante de « Back Home To Mama », autre compo de DIXON gravée par Big Walter HORTON en novembre 1954 pour le label States, une filiale d’United Records. Le morceau reste connu pour avoir été repris par le CANNED HEAT, Joan OSBORNE ou Ace FREHEY mais c’est bien grâce à LED ZEP que le titre demeure mondialement connu, figurant dans le second disque des anglais. « Grown Men Cry », une compo offerte par le louisianais Larry GARNER, semble le libérer définitivement des carcans du Chicago Blues, les riffs d’harmo sont accrocheurs, renforcés par une sobre section cuivre pour une tension constante.
BRANCH sait se montrer tendre quand le besoin s’en fait sentir. Il reprend « If Heartaches Were Nickels » de Warren HAYES membre de GOV’T MULE sur un mode Slow Blues long de six minutes. Si le titre a été repris par des guitaristes aussi démonstratifs que gueulards (Joe BONAMASSA, Leslie WEST), Billy en offre un visage bien différent, l’orgue et l’harmonica endossant les premiers rôles, tandis que la guitare de Carl WEATHERSBY nous assène un solo où chaque note touche sa cible. Probablement la meilleure version du morceau avec celle du soulman Charles WILSON. De la Soul, parlons-en justement avec la reprise du « You » de Bill WITHERS. La guitare un brin funky s’avère délicate et astucieuse, le chant colle parfaitement au morceau, preuve que Billy sait fournir des efforts quand il n’est pas préoccupé par son harmonica. Une version qui donne un coup de jeune et envoie celle d’Al JARREAU aux pâquerettes
Carl WEATHERSBY n’est pas uniquement venu avec sa guitare, il a apporté trois chansons dans ses bagages. Non content de donner son titre à l’album « The Blues Follow Me Around » s’annonce comme un excellent mid tempo en mode moderato, la basse bien groovy instaure un rythme typique au shuffle. Un bon titre que WEATHERSBY reprendra à son compte deux ans plus tard dans une version plus courte. « Should Have Been Gone »⃰ s’annonce comme un bon Chicago shuffle avec un changement de chanteur, Carl nous récitant son texte. Le guitariste récidive sur « Should Have Know Better »**, titre dans lequel l’intensité dramatique monte d’un cran. Le quintet nous retapisse deux inusités de deux légendes de Chicago : « Evil » œuvre de Muddy WATERS gravée en 1957 avec l’appui de James COTTON et du guitariste Pat HARE. Si WEATHERSBY se charge encore du chant, le groupe nous en délivre une version sans fioritures, respectant les schémas de l’original. Œuvre tardive de Willie DIXON, « Flamin’ Mamie » figurait dans « Mighty Earthquake And Hurricane », disque dans lequel l’harmoniciste était un certain Billy BRANCH. Le combo en délivre une interprétation solide nous paraissant un ton au dessus par rapport à celle de Koko TAYLOR. Seule la composition « Where’s My Money » est un titre fétiche de l’harmoniciste figurant dans l’album du même nom paru onze ans plus tôt. La première version avec Carlos JOHNSON à la guitare valait le détour, là le groupe semble encore mieux rôdé, la section rythmique plus active et la complicité entre le guitariste et l’harmoniciste est à son comble, BRANCH parvenant à instaurer une touche d’humour, chose rare chez lui.
Terminons ces modestes lignes par un feu d’artifice explosif avec la reprise du « Polk Salad Annie », du regretté Tony Joe WHITE. A vrai dire on ne compte plus le nombre de mecs qui se sont cassé les dents sur ce titre, on pense à Tommy OVERSTREET, Bill CARLISLE, Tom JONES ou à notre bon Joe DASSIN. Même le grand ELVIS avec son beau costume blanc n’est pas parvenu à rendre l’intensité du morceau. En fait, hormis Little MILTON, BIG TWIST & The MELLOW FELLOWS et les LONELY BOYS (tous dans des versions décalées), tous les gars assez culottés pour oser reprendre cette pépite nous ont offert de beaux gadins. C’est malheureusement indéniable ! Le pari était donc plus que risqué et Branch et ses potes s’en sortent haut la main. Le groupe nous assène une grande baffe dans la gueule, l’harmonica ne cesse de relancer la machine, la guitare se montre tour à tour flamboyante, virevoltante et funky, les cuivres viennent déposer un nappage exaltant, la rythmique reste la gardienne du temple et Carl WEATHERSBY se lâche au chant comme un chien dans jeu de quilles. Souvenez vous : « Down to Louisiana - Where the alligators grow so mean … Polk Salad Annie- The gators get your granny (Chomp ! Chomp ! Chomp ! ». Un vrai tourbillon !

Enregistré en juin 1994 au Dockside Studios, remarquablement produit par l’éminent John Snyder cet album demeure à découvrir. L’harmoniciste nominé à trois reprises aux Grammy Awards (il n’a jamais rien décroché) évolue ici sur le fil du rasoir. Billy quitte ici son ancrage très Chicago Blues, un vrai joug, pour nous offrir un superbe voyage du West Side de Chicago jusqu’à la Nouvelle Orleans et les bayous louisianais.

⃰ Titre homonyme à celui de John Lee HOOKER.
** Titre homonyme à ceux des BEATLES et de Jim DIAMOND et Graham LYLE.

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- Billy Branch (chant1-2-5-6-7-10-11, harmonica)
- Carl Weathersby (guitare, chant 3-4-8-9)
- Cal Arnold (basse)
- Kerry Brown (batterie)
- David Torkanowky (claviers 1-4-9-11, piano 3-5-6-7-8-10-11)
- Jon Smith (saxophone 2-3-4)
- Ward Smith (saxophone 2-3-4)
- Steve Howard (trompette 2-3-4)


1. Bring It On Home
2. Grown Men Cry
3. Polk Salad Annie
4. If Heartaches Were Nickels
5. You
6. The Blues Follow Me Around
7. Flamin' Mamie
8. Should Have Been Gone
9. Should Have Known Better
10. Evil
11. Where's My Money ?



             



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