Après seulement six années d’existence, les BERURIER NOIR tirent leur révérence (une première fois) en 1989. François tourne alors la page et entreprend des études en langue orientale. Mais son éloignement de la scène musicale est de courte durée, car dès 1990 il forme MOLODOÏ avec Frédéric Berger, dit Nanouche, et Rémi Berger, dit Spirou, respectivement à la basse et la guitare. Ce dernier se chargeant également de la programmation et de la boite à rythmes, suivant en cela la recette des BERUS. Le nom du groupe, qui veut dire "jeune" en russe est tiré du film Orange mécanique.

Très vite MOLODOÏ signale sa présence par un EP deux titres On est là !, et quelques mois plus tard il sort son premier album, Irrécupérables. Le groupe évolue dans un style assez proche de celui des BERURIER NOIR, avec une sensibilité un peu plus Rock, voir Punk Oï, que ces derniers, comme le démontre le rapide et quasi Rockabilly "Métis". Cette légère évolution est en grande partie due à des guitares et une boite à rythmes un peu plus variées. Mais le goût pour les chœurs fédérateurs et les mélodies immédiatement mémorisables est toujours bien présent.

Comme cela était parfois le cas avec les BERUS, le son laisse clairement à désirer. Manquant de clarté, de puissance et de relief, il ne permet pas aux quatorze morceaux qui composent l’album d’être mis en valeur. Mais là où la folie, la singularité et la simplicité des BERURIER NOIRS permettaient de passer outre, ici le résultat est moins heureux. Car même si certains titres sont de belle facture, leur rendu sur disque peine à convaincre. C’est ainsi le cas de "Golan United" ou de "Politichiens" des titres foncièrement Rock, mais qui sont pénalisés par des paroles difficilement compréhensibles, et une mélodie qui n’est pas plus aisément identifiable. Il en va de même des brouillons "Traite’ment spécial" et "Skalopards" qui ressemblent plus à des démos qu’à des titres réellement aboutis.

Et le constat est identique avec "30 avril 75" qui conte la chute de Saïgon, ou bien "Bonze déchu", deux titres dans lesquels on retrouve l’inspiration asiatique qui apparaissait déjà dans les BERURIER NOIR. Mais qui souffrent d’un son et d’une production bien trop confus. On sent la motivation et la passion du groupe au travers d’un chant habité et de guitares nerveuses, mais le rendu est bien trop maladroit et les compositions trop linéaires pour que l’ensemble fasse mouche. Quelques titres parviennent cependant à tirer un peu leur épingle du jeu, à l’instar de "La rage" dont le tempo plus lent facilite l’assimilation. Il en va de même de "La marche des Molodoï" dont l’aspect plus rythmé et martial n’est pas sans rappeler l’ancien groupe de François. Porté par une belle ligne de basse ce titre est une des rares réelles réussites du disque. C’est un peu le même constat avec "Molodoï" donc le caractère simple et direct permet au groupe de passer outre les faiblesses sonores. Et enfin, comment ne pas mentionner "Irrécupérables" un véritable hymne dont l’efficacité permet également de passer outre la piètre production.

Irrécupérables sent l’urgence et donne le sentiment que le groupe était pressé de délivrer, de s’exprimer, sans trop se soucier (ou avoir les moyens) de disposer d’une production digne de ce nom.
A ce titre, on ne peut pas réellement parler de réussite. Par chance, MOLODOÏ se montrera un peu plus convaincant par la suite. L’album a été remastérisé en 2018 par Spirou et est disponible auprès du Folklore de la Zone Mondiale, avec plusieurs Bonus parmi lesquels "La belle petite cage", "Lieutenants du désordre", "Vive l'armée... du salut, B.M.C. Dub", "Roi des singes". Mais il ne m’a pas été donné d’écouter ces nouvelles versions. 2.5/5