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1965 Tages
1966 2

TAGES - Tages (1965)
Par LE KINGBEE le 4 Novembre 2021          Consultée 582 fois

Avant de tirer sur l'ambulance, replaçons les choses dans leur contexte. TAGES, jeune et sympathique groupe suédois fondé en 1963 par Tommy Blom, un gamin d'à peine seize ans, et du guitariste Anders Töpel voit le jour sur les cendres d'Alberts Skifflegrupp, Alberts étant le second prénom du Tommy. Fortement influencé par le Skiffle et le Rock instrumental des SHADOWS, les deux garçons sont rejoints par le bassiste Goran Lagerberg, Freddie Skantze (batterie) et le guitariste Danne Larsson, le plus jeune (15 ans).

Le quatuor se fait les dents dans les nombreux concours et radio crochet qui jalonnent la Suède, terminant fréquemment dans les dernières places. En 1964, le groupe change de nom devient Tages Skifflegruup (Tage étant cette fois ci le second patronyme du benjamin de la troupe) avant d'être rebaptisé TAGES. Durant l'été 64, la formation participe au Göteborgs-Posten Västkustens Beatles, un concours dédié aux BEATLES. Le concept est simple, les belligérants doivent être 4 et se rapprocher de la sonorité des Fab Four. La formule marche à merveille, Tommy Blom étant alors en voyage en Angleterre, le quintette devenu brièvement quatuor remporte le cocotier avec une session d'enregistrement.
En septembre, dans un studio de fortune, Tages met en boite son premier single pour Platina, un minuscule label indépendant ; contre toute attente "Sleep Little Girl" grimpe sur la 3ème marche du hit-parade suédois.

Au risque de se répéter, en musique il faut souvent battre le fer quand il est chaud. Devant l'étonnant succès du single, Platina Records décide qu'il est temps d'enquiller avec un album complet. "Sleep Little Girl" est réenregistré dès janvier. Entre l'été 64 et les premières sessions de cet éponyme, les jeunes suédois ont progressé à vitesse Grand V. Les premières influences de Lonnie Donegan et des Shadows sont très vite absorbées et remplacées par un mélange de British Beat, de Blues et d'un Rock très proche du Garage. Il y a peu un exemplaire de ce disque s'est vendu 180 euros en moins d'une heure.

Alors si on conseillait à certains lecteurs sceptiques de ne pas tirer sur l'ambulance, c'est tout simplement parce qu'en 1965, ce jeune groupe de Göteborg avait quelques années d'avance par rapport aux titres dont nos radios essayaient de nous lobotomiser le cerveau avec une certaine réussite. Au moment où Tages gravait cet éponyme, la France tentait d'imiter Zorba dans la danse du Sirtaki, Guy Mardel refusait d'avouer alors que Villard triomphait avec "Capri c'est fini"*.

La pochette retranscrit parfaitement l’époque avec ces belles coupes de cheveux à la Brian Jones. On pourra reprocher un répertoire peu personnel avec seulement deux originaux : "Sleep Little Girl" une balade gentillette à la Dave Clark Five et "The One For You", un mélange de Beat parfumé d'une légère sauce Garage dans la lignée des Brogues ou des Mojo Men. Parmi les dix reprises, certaines témoignent que Tages avait bel et bien un métro d'avance. Qui en 1965 reprenait "Bloodhound", un Rock n Roll du californien Larry Bright ? Personne ! Si la version des suédois s'écarte quelque peu de l'original avec la présence d'un harmonica et une tonalité plus Garage que Rockab, elle n'en demeure pas moins dévastatrice. Le combo booste le « Cathy’s Clown », une guimauve des EVERLY BROTHERS lui donnant ainsi une meilleure consistance. Adapté en français par le tandem Delanoë/Aber le titre chanté par Richard Anthony, HALLYDAY et les Kessler Sisters reste comme l’exemple parlant des beaux petits massacres à la française sous l’intitulé « Le P’tit clown de ton cœur ».

Certaines influences Blues ont de quoi surprendre avec en premier lieu "Naggin'", pioché dans le répertoire Excello de l'harmoniciste Jimmy Anderson. Tages démontre un grand savoir-faire en matière de Blues lent avec cette reprise qui vaut largement celle des KINKS. Autre bonne reprise avec « Dimples » de John Lee HOOKER avec harmonica et deux guitares complémentaires pour une mixture se situant entre les ANIMALS et le Spencer Davis Group. Une interprétation qui nous semble bien plus captivante par rapport à Long John Baldry ou CANNED HEAD. Il faut bien tendre l’oreille pour reconnaitre et même deviner "I Got My Mojo Working" accrédité ici à Muddy WATERS en lieu et place de Preston Foster. La chanson complètement décalée est tellement transformée qu’il aurait été préférable de proposer une compo, la barrière entre les deux n’étant pas très haute. Si le Septième Fils (rejeton de Jacob et d’une servante, Lea épouse de Jacob ne pouvant enfanter) a connu de beaux jours dans les récits bibliques, le personnage est également une trame récurrente dans le domaine du Blues. Composition de Willie DIXON, offerte à Willie Mabon "Seventh Son" a connu quelques versions Jazzy assez peu captivante. Ce coup-ci, Tages diffuse une combinaison hybride entre Mods, Beat et Rock pas désagréable même si le morceau a du mal à démarrer. Bonne trouvaille avec "I’ll Go Crazy" une petite pépite de James BROWN. Si le titre a connu pas mal de reprises, la version de Tages sert d’affiliation avec celle des STANDELLS et sera une future source d’inspiration pour le BLUES MAGOOS. Excellente reprise de "Doctor Feel-Good", œuvre de Curtis Smith (alias Piano Red) dans une veine Garage proche des SHADOWS OF KNIGHT, à tel point qu’on croirait entendre Jim Sohns.

Bien évidemment, le groupe commet d’inévitables petits impairs comme "Everybody Loves A Lover" popularisé par Doris DAY puis par Bobby RYDELL et Sandie SHAW. Le parfait prototype de chanson pour midinette. Personnellement, je trouve qu’il est assez duraille d’écouter "Stand By Me", hit planétaire de BEN E KING une fois qu’on a écouté l’original ou les versions d’Otis REDDING ou Ry COODER. On ne compte plus le nombre de reprises qui ont donné lieu à de purs massacres. Le combo propose un tempo trop appuyé et manquant quelque peu de groove, c’est d’autant plus dommage qu’il s’agit là du titre final.

Alors, d’un côté on a une bande d’adolescents scandinaves tournant aux alentours des 18 ans, et de l’autre un curieux patchwork orienté sur du Beat, du Mods, du Blues, du Garage et deux guimauves. En guise de conclusion, ce groupe encore très jeune, avait une longueur d’avance par rapport à de nombreuses formations de l’époque bénéficiant de l’appui de labels, de radios ou de boite de productions n’ayant souvent qu’une seule idée en tête : l’appât du gain, mais c’est là un autre débat. Un disque qui permet de nous faire réfléchir et pourquoi pas débattre sur la terrible inculture et la faiblesse de la scène musicale hexagonale durant cette décennie des sixties. En 1965, personne chez nous ne reprenait Hooker, Dixon, Waters et encore moins Jimmy Anderson, les médias préféraient nous repasser jusqu’à plus soif « Le travail c’est la santé », du brave Henri SALVADOR auteur involontaire d’une pub pour le MEDEF.

* Encore une fois, il s'agit des premiers exemples qui me sont venus à l'esprit.

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   LE KINGBEE

 
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- Tommy Blom (chant, guitares, harmonica)
- Göran Lagerberg (basse, chant)
- Danne Larsson (guitare, chœurs)
- Anders Töpel (guitare, chœurs)
- Freddie Skantze (batterie, percussions)


1. Bloodhound
2. Everybody Loves A Lover
3. Dimples
4. I Got My Mojo Working
5. Naggin’
6. Sleep Little Girl
7. The One For You
8. Seventh Son
9. I’ll Go Crazy
10. Cathy’s Clown
11. Doctor Feel-good
12. Stand By Me



             



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