C’est fugace mais on aperçoit Sam Kiszka, le bassiste de GRETA VAN FLEET (G.V.T) dans le clip de "See Where the Night Goes" de GOODBYE JUNE et c’est pile le détail dont j’avais besoin pour étayer honteusement une thèse que je défends depuis un moment : on est davantage tolérants avec les plagieurs d’AC/DC qu’avec ceux de LED ZEPPELIN parce que la bande à Angus est toujours en activité.

Je m’étais juré de ne jamais mentionner G.V.T dans mes chroniques. Pas besoin d'ajouter mon grain de sel et de grossir les rangs de la partie civile dans le procès qui leur est intenté en plagiat de LED ZEP. Ce n’est pas faute d’avoir essayé : l’autre jour, j’ai lancé l’écoute de The Battle at Garden’s State encensé par mes confrères de Forces Parallèles et, s’il est indéniable que le combo de la fratrie Kiszka a fait de gros progrès et commence à s’émanciper, je n’ai pas pu aller jusqu’au bout. Le gamin Josh me casse trop les oreilles. En tout cas, comme KINGDOM COME (K.C) avant eux, la critique leur est tombée dessus à bras raccourci (ce qui ne les a pas empêchés de faire un carton plein, comme K.C avant eux parce que, bonnes ou mauvaises, les critiques donnent de la visibilité et suscitent la curiosité*).

Le titre du troisième album de GOODBYE JUNE, groupe originaire de Nashville constitué non pas de trois frères mais de trois cousins, fait référence au mois de l’année du décès du frère de Tyler Baker, guitariste d’une précédente mouture du combo. Les deux premiers opus étaient déjà d’un sacré bon niveau et il est assez ironique pour ma démonstration que le hard-rock psyché teinté de Sudiste qu’ils pratiquaient alors laissait entendre des influences Zeppeliniennes (mais des influences seulement). Plus aucune trace de la bande à Page cette fois-ci et c’est à croire que le groupe a passé la pandémie à réécouter la discographie complète d’AC/DC tant nombre de plans sont piqués sans vergogne aux Australiens. Ajoutez à cela que le chanteur Landon Milbourn fait penser tour à tour à Bon Scott et à Brian Johnson (époque GEORDIE, avant qu’il se flingue rapidement la voix chez Aka Daka). D’accord, mais la ressemblance vocale ne doit pas occulter le fait qu’on tient là un immense chanteur au gosier imbibé de Tennessee whiskey capable de trancher le mur des guitares sans pour autant se départir d’une sensibilité quasi féminine. Et dans le registre de la ballade ("What I Need"), c’est le jackpot assuré, par ici la monnaie. Je n’avais pas entendu chanteur aussi légitime derrière un micro depuis Jay Buchanan des RIVAL SONS. Alors oui, certains emprunts sont gonflés mais la collection de chansons rassemblées ici tient du sans-faute. Quel amateur de binaire peut sérieusement résister à "Stand and Deliver" ou à "Three Chords" par exemple ? C’est brillamment interprété (pas de place pour les mauvais à Nashville) et les textes sont même bien troussés (le mal de cheveux un lendemain de beuverie de "Baby, I’m Back" et les onomatopées rythmiques de "Black"). Quant à la césure avant chaque "Nothing" dans le morceau du même titre, il ne m’en faut pas plus pour déclarer qu’on tient là l’album de l’année, deux mois dans 2022.

Si GOODBYE JUNE avec ce disque ne peut pas se résumer à un clone d’AC/DC comme pouvait l’être AIRBOURNE, j’ai conscience, comme la critique en général, me semble-t-il, d’être bien plus tolérant avec les copieurs des frangins Young qu’avec les pompeurs du dirigeable. Il faut dire que même AIRBOURNE n’avait pas poussé le vice à jouer en uniforme d’écolier avec une Gibson SG alors que G.V.F mérite des claques à pousser le mimétisme trop loin (les poses du chanteur, la Ludwig vert pailletée avec grosse caisse de 26, un bassiste/claviériste…). Non, au-delà de ça, je crois qu’on est plus accommodants avec les clones d’AC/DC parce que leur modèle est toujours en activité mais bien incapable de livrer des chansons aussi bonnes. Du coup, on est en manque et on va chercher une came de meilleure qualité ailleurs**. Essayez cet album, vous aurez votre dose et vous y trouverez bien plus encore.

* "Dites autant de mal de moi que vous voulez mais orthographiez correctement mon nom" disait MADONNA.
** Liste des meilleurs morceaux d’AC/DC composés par d’autres disponible contre une enveloppe timbrée.