Après le très américain TV Sky, justement chroniqué et généreusement noté par le camarade Nosferatu, le trio helvétique décide, selon toute vraisemblance, de prolonger l’expérience et d’approfondir encore plus ce qu' avait déjà bien plus qu’effleuré le précédent opus. Un véritable trip sur la route 66, en somme, mais où l’ambient le plus crépusculaire envahit progressivement l’espace sonore comme rarement par le passé.

On est directement captivé par ce bien nommé Only Heaven dans lequel on entre d’abord comme dans un nuage avec la vaporeuse et électro "Outside" pour mieux nous faire happer ensuite par la grondante "Strangel".
"Speed of Night", glacial dans son intention indus et pourtant chaudement rock'n’roll dans son rendu, résume bien l’état d’esprit de nos Suisses préférés en cette charnière année 1995.
La très arrondie "Donnez Les Esprits", est un superbe exemple de paysages désertiques parcourus par d’aériennes guitares et qui nous prépare au rite de passage qu’est "Moon Revolutions". La révolution lunaire se passe sous nos yeux parfaitement à l’écoute. Un final en forme de heavy rock tribal, quasi sacrificiel – hommage aux SWANS, très sûrement.
Puis, vient "Kissing the Sun". Probablement conçu comme une sorte de hit potentiel, ce titre n’a peut-être pas aussi bien vieilli que le groupe l’espérait sincèrement. Cela dit, l’espèce de pulsation synthétique qui intervient au milieu pour ne plus repartir ensuite a été conçue pour rester durablement dans la tête de l’auditeur (d’autant plus qu’elle revient, encore plus fantomatique, sur la dernière piste).
"Dream House" corrige le pas si mauvais tir avec une belle et naturelle alternance entre electro/ambient et indus/rock à la GODFLESH. "Lointaine" succède harmonieusement ; chant francophone, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Cela dit, il nous faut "Garder Les Esprits" pour qu’après un étrangement sympathique "Child In The Three" et ses non moins étranges mais plus vraiment sympathiques retombées, nous puissions sombrer dans l’inquiétant et irradiant "Kissing The Sun (Orange Mix)" – pur moment de shamanisme électronique.

Dans l’idéal, j’aurais aimé qu’un pareil album, si helvétique dans l’âme bien que très redevable au rock américain dans sa forme, soit principalement chanté en français ou pourquoi pas en allemand (langue que l’oncle Franz maîtrise tout de même un peu, mais peut-être pas au point de s’en servir pour un album entier).
Comme sur le précédent opus, on sent que Ramuz, sans pourtant quitter la scène, fait place à Jim Morrison. On peut le regretter, mais cela dit on passerait alors à côté d’un très bon album des YOUNG GODS, très planant, parfaitement habité et, encore une fois, original.

Note très exacte : 4,45 / 5