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2008 No Sanctuary : The Spiderleg R...
 

1985 Arise!

AMEBIX - No Sanctuary : The Spiderleg Recordings (2008)
Par K-ZEN le 23 Mai 2023          Consultée 579 fois

L’ambiance poisseuse des squats. Les murs qui s’effritent, ultimes vestiges d’un crépi usé jusqu’à la moëlle. Un gravier, las, s’incorporant par tous les pores de la peau, insidieux poison sanguin. Des plafonds troués, ouverts aux quatre vents, comme nos idées. Et un sommeil impossible à trouver réellement, allongé à même ce matelas parasité.

Ce n’est même pas de la colère. De la déception, par rapport à cet ordre établi contre lequel on ne semble rien pouvoir. On ne veut plus de ce monde-là. Cette impression de devoir pénétrer au cœur même du système pour pouvoir le détruire de l’intérieur. Est-ce un mythe ? Un mirage ? Dû au manque de volonté ou à la peur de ce qui se cacherait dans le placard ?

Personne ne croit plus en rien. On vit au jour le jour. Juchés sur le sol, seringues, détritus, tracts alimentés par force slogans pour une nouvelle société, moins égoïste, plus juste. Des concerts sont prévus en ce sens. Mais pour asseoir notre vision, on aura encore besoin d’argent. Est-ce cela, la grande hypocrisie sur laquelle nombre se sont cassé les dents, le crime du siècle d’après une merveilleuse chanson ? Mordre la main qui nourrit quitte à en mourir la gueule grande ouverte.

Notre naïveté fait peut-être peine à voir, mais toi tu fais encore plus pitié avec tes condiments et tes meubles aux noms imprononçables. Un jour dans dix mille ans, on leur aura piétiné la gueule de nos boots crasseuses, les faisant passer par la fenêtre dans un grand éclat de rire, en nous apostrophant sur leurs noms proprement débiles, témoins de notre méconnaissance totale du suédois.

Les prémices d’AMEBIX se situent en 1978 lorsque s’agrègent quatre étudiants, Rob 'THE BARON' Miller, son frère Chris 'STIG' Miller, Andy 'BILLY JUG' Hoare et Clive Barnes, avec le projet de monter un groupe en ces temps bouillonnants politiquement et artistiquement en Angleterre. Ils tournent intensivement non loin de Tavistock où ils résident et enregistrent une démo qui parvient jusqu’aux oreilles curieuses ornant les têtes des chantres de l’anarcho-punk anglais CRASS. Ces derniers intègrent ainsi une des premières compositions élaborées par le tout jeune quatuor dans la compilation Bullshit Detector.

Barnes et Hoare quittent alors le groupe. Rob Miller récupère la basse en plus du chant, Chris Miller conserve la guitare et Martin Baker devient le nouveau batteur du gang, fournissant en prime une salle de répétition attitrée grâce au manoir parental. Répondant préalablement au doux nom de The BAND WITH NO NAME, l’affreuse créature commence à se faire appeler AMEBIX en référence aux amibes, micro-organismes fascinants dont l’aïeul est peut-être l’ancêtre commun à tous les eucaryotes. Baker ne fit toutefois pas long feu, envoyé par ses parents à Londres où on lui diagnostiqua une schizophrénie paranoïde, ce qui inspira d’ailleurs plus tard une chanson au groupe.

L’éphémère trio recrute NORM comme claviériste et se relocalise à Bristol où il vit dans divers squats. VIRUS, batteur du groupe hardcore punk DISORDER, les rejoint ensuite, pour ce qui représente le premier line-up à peu près stable d’AMEBIX, personnel qui enregistra deux E.Ps et un single sur Spiderleg, label fondé par FLUX OF PINK INDIANS. Ce sont ces travaux qui sont compilés sur la compilation ici présentée : Who’s The Enemy suivi par le single Winter en 1982 puis l’E.P No Sanctuary un an plus tard, dont la pochette a été conservée pour l’occasion.

Une couverture empruntée à une photographie réalisée par Dmitri Baltermants nommée Grief et illustrant le massacre nazi ayant eu lieu dans l’antique ville de Kertch située en Crimée ; on y aperçoit le chagrin accablant des visages féminins cherchant les corps de leurs bien-aimés, enfants, maris. Le ciel lourd en arrière-plan renforce ce sentiment dramatique, la main noire du destin ayant frappé injustement. Une jaquette sombre parfaitement adaptée au propos musical original créé par AMEBIX, contrée sauvage peuplée d’une végétation composite : basse métallique, roulements tribaux de batterie, vocaux hurlés quasi désespérés et riffs acérés, une mixture desservie par une production brute, bien qu’un peu fluctuante par instants (notamment à partir de "Carnage").

A mi-chemin de KILLING JOKE et de MOTÖRHEAD, les Anglais tissent ainsi des ambiances glauques et malsaines. La paranoïa d’un bad trip ou d’une folie sous-jacente se manifestant soudain, tension latente dont on ne sait jamais à quel moment elle va exploser, si cela doit exploser (démoniaque "Sunshine Ward", mid-tempo subissant soudain une violente écorchure). La morsure du froid ou de la peur, alimentée par force questionnements sincères sur la guerre, le système, la religion, le progrès voire l’aliénation ; une éthique et vision politique inspirée et défendue par CRASS. L’intitulé "No Gods No Masters" représente ainsi un manifeste parfait d’intention.

Sortie en 2009, cette compilation permet de se plonger dans les premières heures tumultueuses d’un groupe dont l’influence sera vitale, véritable gué entre punk et metal, donnant même naissance à un nouveau genre : le crust.

Dans l’ascenseur empalant de part en part la multinationale et menant notre anarchiste droit au sommet de la tour brillante, les roulements structurant "Battery Humans" résonnent. Les cadavres en costard cravate sont empilés dans couloirs et bureaux dont la propreté s’avère hallucinante. Vision alimentée par une faible lumière filtrant à travers les rideaux recouvrant les fenêtres, halo lointain s’élevant d’un horizon qui, quelques kilomètres en amont, n’en est plus un.

3,5/5 arrondi à 4.

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- Rob 'the Baron Rockin Von Aphid' Miller (basse, chant)
- Chris 'stig Da Pig' Miller (guitare)
- Neil 'virus' Worthington (batterie)
- Norman (claviers)


1. Battery Humans
2. Control
3. Progress ?
4. Sanctuary
5. The Church Is For Sinners
6. Sunshine Ward
7. Moscow Madness
8. Winter
9. Beginning Of The End
10. Carnage
11. Curfew
12. Belief
13. No Gods No Masters



             



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