Quatre ans après la fin des tournées du groupe SELMI’S, Mohamed Selmi remet le couvert et enregistre un second disque dont il assure toutes les prises, à l’exception de la batterie jouée par un certain Jean-Paul Pierieu. Au contraire de son prédécesseur, Union ne bénéficie pas d’un statut culte ni d’une réédition en bonne et due forme, et est en vente à un prix tout à fait raisonnable. Beginning ayant été une rouste mémorable, je n’attendais pas grand-chose de cet album-ci. J’ai malgré tout tenu à l’acquérir, en misant sur la marge de progression.

On ne peut que constater le progrès technique depuis le premier album. Enfin! L’interprétation est beaucoup plus assurée qu’avant, le son d’ensemble gagne en consistance et les sonorités sont bien mieux diversifiées, du saxophone au piano électrique, en passant par la flûte et le Solina String Ensemble. La rythmique est solide, Jean-Paul Pierieu est bien meilleur derrière les fûts que Thierry Audebert, et les apports de John Selmi aux percussions sont bienvenus. À la guitare, John Selmi a bien digéré ses racines proche-orientales.
Sur cette base, les compositions sont bien mieux construites que celles de Beginning. Plusieurs morceaux sont bien entraînants, tels l’introductif "Birthday Cigars" aux faux airs de reggae, le court mais intense morceau-titre, "Ma Joie", "Spontanéité" et "Morning Feeling" aux jolis soli de guitare. Le reste est plus calme, sans verser dans la ballade pour autant. Bon, pas de quoi grimper aux rideaux ni hurler à la lune, le tout reste plutôt tranquille et convenu, flirtant parfois dangereusement avec la pop. Mais tout de même, ça fait plaisir à entendre après le quasi-désastre de Beginning.

Il reste des maladresses. Le chant de John Selmi est toujours aussi approximatif voire carrément faux, et les paroles, qu’elles soient en anglais ("Down The Road", "If I Were A King" – si si, une vraie faute de conjugaison) ou en français ("Chemin Nocturne", "Spontanéité"), semblent improvisées 'à la zob' et chantées avec une pomme dans la bouche et, quand elles sont compréhensibles, révèlent des textes naïfs et clichesques au possible. En outre, nous trouvons régulièrement des soli de saxophone peu investis et trop poussés en avant dans le mix. Union n’échappe pas à certains soucis de production; le son de certains claviers sature par moments, comme le piano Fender au début de "Down The Road" et "Spontanéité" ou le synthé de "Chemin Nocturne", et quelques fade-out interrompent indûment certains morceaux.

Mohamed 'John' Selmi n’eut plus d’autre occasion de graver de la musique, ni en solo ni en groupe. Nanou Soumagnas, Thierry Audebert et Jean-Paul Pierieu n’enregistrèrent également rien d’autre. Dommage. Nous sommes donc en présence d’un microcosme musical. Union demeure par défaut le meilleur album de Mohamed Selmi. Aux dernières nouvelles, il est toujours actif en tant que professeur de musique et donne de temps à autre des concerts de musique traditionnelle au aoud.

2 ¾ sur 5