Mesdames et messieurs, attention ! Les trois musiciens qui officient sur cet album sont loiiiiiiiin d’être les premiers tâcherons venus. Il s’agit ni plus ni moins du groupe WHITE NOISE, formé par l’étudiant en physique David Vorhaus, les ingénieurs du son de la BBC Delia Derbyshire et Brian Hodgson, et le batteur Paul Lytton. Ils créent en 1969 An Electric Storm, œuvre démentielle et inclassable, où acoustique, électronique et acousmatique forniquent joyeusement. La même année, ils publient également Electronic, chez le label d’illustration sonore Standard Music Library. Pour l’occasion, Delia Derbyshire apparaît sous le pseudonyme Li De La Russe et Brian Hodgson sous celui de Nikki St George.

Un album de WHITE NOISE parallèle, jure wallah? C’est les gens de WHITE NOISE qu’on entend, là? Mais laisse-moi goleri! Sur Electronic, point de collages fous ni de mélodies folles. Sur Electronic, mais à la place des effets sonores électroniques, tout ce qu’il y a de plus banal.

Les compositions de Brian Hodgson sont à nette tendance bruitiste. "Battle Theme", "Homeric Theme", "Greek Concrete" sont courts et insignifiants. "Attack of The Alien Minds",, "Gothic Submarine", "Whirring Menace", "Time Capsule" et "Wet Asteroid", plus conséquents, rappellent de manière fugace certaines ambiances glauques de "The Visitations" sur An Electric Storm. Des ambiances amusantes certes, mais trop floues, statiques et encore trop brèves pour dépasser le stade de l’anecdote. Souvent, ces morceaux se terminent brusquement, sans fading.

Du côté de Delia Derbyshire, c’est plus mélodique, mais guère mieux. Au rayon des jingles, on trouve "Lure of The Space Goddess", "Fresh Aire", "Tentative Delia", "Delia’s Idea" et "Delia’s Resolve". Quant aux neuf "London Lemons" qui ferment la première face, oublions-les, cela vaut mieux. "Delia’s Reverie" est une version ralentie de "Delia’s Psychedelic Waltz", "Delia’s Fulfillment" un montage de motifs musicaux de plusieurs autres "Delia".

On trouve tout de même des ambiances plaisantes : "Planetarium", "Delia’s Theme" ainsi que "Restless Relays" co-composé avec Brian Hodgson. Quelques morceaux mélodiques constituent le meilleur de l’album : "Way Out", enfin une VRAIE composition, où le VCS 3 et les boucles sont enrichis de castagnettes et d’un clavecin, ainsi que "Delia’s Psychedelic Waltz", le morceau le plus abouti de la série des "Delia". Pourquoi ne pas avoir combiné ces "Delia" épars en une composition plus aboutie? C’est là l’une des tares de la Library Music, l’éparpillement des idées musicales par le format radio.
Electronic s’achève sur deux morceaux de David Vorhaus, "Build Up To" et "Snide Rhythms", des extraits de "The Visitations" qui constituent des pièces de choix de l’album, doublées de jolis documents historiques.

J’ai été tenté de classer ce disque dans la discographie de WHITE NOISE, pour me la péter mec-qui-a-trouvé-un-album-parallèle-que-personne-il-le-savait. Non, il ne s’agit pas de WHITE NOISE : d’une part ici tout le monde travaille dans son coin, d’autre part l’esprit n’y est pas, tout simplement.

À retenir : "Way Out", "Delia’s Psychedelic Waltz", "Build Up To" et "Snide Rhythms" mais guère plus.