VERTO est le projet musical du guitariste Jean-Pierre Grasset, qui collaborera plus tard avec Jean-Luc ROUDIÈRE et VIDEO AVENTURES, et officiera en tant qu’ingénieur du son pour ART ZOYD ou POTEMKINE. Krig / Volubilis est son premier album, publié par Pôle en 1976.

Par ailleurs, le groupe POTEMKINE, affilié à la mouvance Zeuhl et publiant la même année son premier album Fœtus chez le même label, participe au grand complet au premier morceau de l’album, "Krig". Ce dernier débute mal l’album, s’inspirant dans sa première moitié naïvement du thème d’introduction du Köhntarkösz de MAGMA. C’est un problème récurrent des groupes se réclamant du mouvement Zeuhl que de s’inspirer d’un peu trop près de leur modèle. Passée la référence trop appuyée à MAGMA, "Krig" débouche sur une seconde partie honnête, avec un riff solide initié par les basses, malgré des soli de guitare hasardeux.

Par la suite, le personnel devient beaucoup plus épars; sur le reste de la première face, Jean-Pierre Grasset est surtout épaulé par le bassiste Gilles Goubin, avec la participation épisodique de quelques autres musiciens. Ces disparités d’instrumentation entraînent forcément un résultat hétéroclite. Le diptyque de "Et Terre" et "Éther" donne lieu à de beaux dialogues de guitare et de basse. "Oka" est porté par les digressions acoustiques de François Artige, commençant comme une ballade mélancolique et désarticulée, avant de prendre forme autour de la guitare à 12 cordes. "Locomo" par contre me laisse dubitatif. Sur une rythmique plutôt lâche, Jean-Pierre Grasset s’adonne à des soli sans vraie structure – qui plus est il est désaccordé par rapport à la basse – comme s’il essayait de se la jouer guitar hero sans y parvenir, faute de technicité.

La seconde face détonne largement après les cinq morceaux de la première. On y trouve vingt-trois minutes d’improvisation par Jean-Pierre Grasset seul. "Strato (Volubilis)" est une très longue plage où Jean-Pierre Grasset s’applique à créer des paysages sonores planants en utilisant sa guitare à contre-emploi, avec un archet et une lame de scie, le tout spatialisé avec des pédales d’effet. Le tout ressemble aux passages électriques de "Inside The Dream" de l’album éponyme (1975) de Pôle, en bien plus convaincant. La seconde moitié du morceau est plus animée, avec des ébauches de riffs et autres guitarismes. Jean-Pierre Grasset s’y montre étonnamment plus à l’aise que sur le poussif "Locomo". La fin de la piste est dominée par de magnifiques arpèges aquatiques et lointains. L’album s’achève sur "TK 240 S 52" qui change à nouveau de registre. On y entend des signaux électroniques rugueux et dissonants, assez impressionnants mine de rien, dont l’effet d’oppression est curieusement amplifié par le pleurage du vinyle.

Un peu bancal, parfois décevant, Krig / Volubilis est un témoignage embryonnaire. Il faudra un album de plus à VERTO pour se réaliser pleinement.