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UNCLE EARL - She Waits For Night (2005)
Par LE KINGBEE le 27 Décembre 2023          Consultée 326 fois

Après avoir enregistré deux E.P. et une autoproduction lui servant avant tout d’objets de démarchage auprès des programmateurs de festivals, UNCLE EARL attire l’attention de Rounder, label indépendant spécialisé dans le Folk, l’Americana et le Blues. Constitué de quatre membres féminins, le groupe doit son nom à l’influence et l’admiration qu’il porte envers certains de ses homologues portant le patronyme Earl (le banjoïste Earl Scruggs, le guitariste Steve Earle qu’on retrouvera plus tard comme acteur dans les séries tv The Wire et Treme, et Uncle Tupelo, groupe précurseur du registre Country Alternative) une combinaison qui débouche sur Uncle Earl.
Produit par Dirk Powell, un virtuose du fiddle et du banjo au riche curriculum vitae (Joan BAEZ, Levon HELM, Eric CLAPTON), l’album est enregistré au Cypress House Studios, propriété de Powell basée à deux pas du Bayou Teche. Si la pochette issue d’une photographie de Maria Camillo dévoile l’ensemble sous un aspect légèrement flou, comme si la mise au point avait été volontairement faussée, ce qu’on retient avant tout, c’est le banjo et le fiddle, instruments tenus respectivement par Abigail Washburn et Rayna Gellert.

Le répertoire résolument ancré dans le registre du New Grass se divise en deux parties distinctes : d’un côté des titres enjoués, festifs et dansants et par ailleurs d'autres empreints de grisaille, accentués par une coloration appalachienne parfumée de mélancolie.
Le quatuor nous plonge dans le bain dès les premières mesures de "Walking In My Sleep", un titre gravé par Arthur 'Boogie' Smith dans les années trente, inspiré de la mélodie de "Brown Leaf Rag", un vieil air du Missouri. Si le fiddle entame les premières notes relayées par des paroles aux intonations cajuns, les guitares, le banjo et la contrebasse entrent aussitôt dans la dance de cette virevoltante square dance. Tombé dans l’escarcelle du Bluegrass via Bill Clifton et Ralph Stanley, la chanson prend ici une allure plus dynamique, privilégiant l’harmonie entre les différents instruments au détriment du banjo.
Le petit instrumental "Booth Shot Lincoln" est une variante inspirée de 'John Wilkes Booth', nom de l’assassin du Président Lincoln, un interlude marquant une rupture avec l’environnement mélancolique.
"How Long" **, une quadrille dans laquelle le vent semble tourbillonner pour le plus grand plaisir des danseurs, se révèle lui aussi particulièrement festif. Issu d’un traditionnel composé sur une formule trio fiddle/banjo/guitare "Old Bunch Of Keys" fut enregistré pour la première fois en 1968. Contrairement à certaines reprises qui englobent des influences celtiques, ici c’est résolument vers une square dance des Appalaches à laquelle nous invite le groupe. Les claquements de mains et de pieds permettent à l’instar de certains flamencos de marquer la cadence. Autre farandole pleine de vitamines, "Ida Red" est un traditionnel probablement issu de Virginie, dont on dit qu’il aurait inspiré le "Maybellene" de Chuck BERRY. Si Bob Wills, Roy Acuff, "T" Texas Tyler et Woody Guthrie ont repris le morceau dans des orientations allant du Western Swing au Folk Blues, ici les instruments nous ramènent au Kentucky, emmenés par la voix de Kristin Andreassen.

A contrario du titre d’ouverture, la guitare et la voix de K.C. Groves impulsent une atmosphère hautement mélancolique à "There Is A Time", un bluegrass des Dillards, toujours tendance, repris plus récemment par Alan Jackson et Mountain Rose. Le genre de titre qui aurait sa place au générique de la série The Walking Dead(fi]. Après une brève intro chantée a capela par Kristin Andreassen et Abigail Washburn, les instruments reprennent "Sugar Babe" *, un traditionnel appalachien popularisé par le banjoïste Dock Boggs. Si les premières notes évoquent une berceuse, la suite dresse un décor sur lequel plane une invariable vague à l’âme magnifiée par le violon.
La Guerre de Sécession qui embrassa le territoire américain entre 1861 et 1865 demeure un thème fertile pour le domaine Bluegrass. Le sombre "Warfare" évoque le retour d’un combattant auprès de sa famille, un titre proche de certains Country Gospels appalachiens. Autre instrumental, "Sullivan’s Hollow" reprend la légende d’une communauté sectaire vivant dans une vallée du Mississippi. Si le titre prend sa source dans le Mississippi, le fiddle nous renvoie à la chaine des Appalaches, alors qu’un accordéon sonne comme une cornemuse. Une drôle d’histoire sans paroles !
Issu d’un ancien folk anglais, "Willie Taylor" nous dévoile un décor ambigu entre tristesse et espoir avec cette histoire de femme s’habillant en marin pour retrouver son bien-aimé disparu en mer, une chanson qui comme vous pouvez vous en douter ne se termine pas en happy end.
"Sleepy Desert", une histoire d’amour contrarié, remet au goût du jour une ballade de Wilmer Watts, un multi-instrumentiste de Caroline du Nord ayant enregistré 14 titres pour la Paramount en 1929. Décédé en 1943, Watts, tisserand de son métier, est représenté par une illustration du dessinateur R. Crumb, chef de file du mouvement Underground Comix, installé dans le Gard depuis des lustres.

Si la formation reprend des titres old time permettant de judicieuses découvertes, elle prend soin d’incorporer trois compos s’insérant parfaitement à l’ensemble. La lune, thématique souvent usagée en chanson, sert de trame à "Pale Moon", une douce ballade où fiddle, banjo et mandoline tissent un mélodieux croissant.
Chanté a capella, "Divine" met en avant la qualité des harmonies vocales avec Abigail Washburn en voix de tête, un titre glorifiant les routes divines et nous emmenant au paradis.
Dernière création avec "Take These Chains", une ballade dans laquelle le violon mène la danse, bien secondé par les accords d’un banjo et d’un chœur qui renforce un chorus relativement bref et répétitif.

Ce premier jet édité par l’excellent label Rounder reste annonciateur du futur Waterloo, Tennessee. L’assemblage des différents instruments, et la symbiose qui en découle, associée à une production sans poudre au yeux, contraste avec la New Country et la Country FM qui inondait alors les ondes radio du nouveau millénaire. Le répertoire propose un délicat patchwork de vignettes old time et de nouveautés qui s’entrelacent souvent avec efficacité. Les arrangements de Béla Fleck, accessoirement époux d’Abigail Washburn, restent des modèles de sobriété et d’élégance. Si aujourd’hui Uncle Earl semble avoir tiré sa révérence, les quatre musiciennes se produisent dans différents canevas valant la pose d’une oreille attentive.


*Titre homonyme à ceux de Mance Lipscomb et Stephen Stills.
**Titre homonyme à ceux de Rick Nelson, J.D. Souther, Ida Cox et Connie Smith.

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- Abigail Washburn (banjo, chant 1-4-9-12-14, chœurs)
- Kristin Andreassen (guitare, chant 3-5-9-13, chœurs, clap feet 2-10)
- K.c. Groves (mandoline, guitare 3-14, chant 2-9, chœurs)
- Rayna Gellert (fiddle, chant 7-9-11, guitare 11, chœurs)
- Dirk Powell (banjo 12, accordéon 8)
- Dan Rose (contrebasse 12)
- Christine Balfa (triangle 3)


1. Walkin' In My Sleep
2. There Is A Time
3. Sugar Babe
4. Warfare
5. Pale Moon
6. Booth Shot Lincoln
7. Willie Taylor
8. Sullivan's Hollow
9. How Long
10. Old Bunch Of Keys
11. Sleepy Desert
12. Divine
13. Ida Red
14. Take These Chains



             



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