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- Style : Ella Fitzgerald , Peggy Lee

Helen MERRILL - You've Got A Date With The Blues (1959)
Par LE KINGBEE le 3 Juin 2024          Consultée 387 fois

En 1959, son contrat avec EmArcy Records n’étant pas renouvelé, Helen MERRILL atterrit chez Metrojazz, une filiale de la MGM dirigée par Leonard Feather, journaliste anglais établi à New-York depuis près de vingt ans, tour à tour auteur compositeur pianiste, arrangeur, biographe. Auteur de nombreuses notes de pochettes, l’Anglais n’en est pas à son coup d’essai, il a déjà produit Charlie Christian, Dinah Washington, Benny Carter et Oscar Pettiford.

Observateur éclairé de la scène Jazz, Feather aura contribué à faire sortir de l’ombre un grand nombre de jazzmen afro-américains jusqu’alors mis sous l’éteignoir par le biais de la Ségrégation en vigueur dans de nombreux états. Naturalisé américain depuis dix ans, Feather prend Helen sous son aile sur les conseils du contrebassiste Oscar Pettiford. Enregistré à New-York lors de trois sessions en 1959, la chanteuse peut s’appuyer sur trois solides quintets dirigés de main de maitre par le pianiste arrangeur Jimmy Jones (ex Sarah Vaughan, Charlie PARKER, Duke ELLINGTON). Ce dernier connait bien la chanteuse pour l’avoir accompagné sur son premier disque et sur scène. Outre l’arrangeur, d’autres connaissances de la chanteuse viennent prêter main forte : le guitariste Barry Gailbraith (ex Clifford Brown, Coleman HAWKINS, Charles MINGUS), le flûtiste Jerome Richardson (ex Kenny BURRELL, Hank JONES, Dinah Washington), le contrebassiste Milt Hinton (ex Billie HOLIDAY, Ruth BROWN, Little Willie John). D’autres sidemen réputés participent à l’album au gré des sessions : le flûtiste Frank Wess (ex Dorothy ASHBY, Count Basie), le batteur Johnny Cresci (ex Lena Horn, Bobby Short), le contrebassiste Al Hall (ex Erroll GARNER, Stan GETZ) alors que le trompettiste Kenny DORHAM (ex Art BLAKEY, Charlie PARKER) intervient dans un rôle de guest sur deux titres.

Après s’être rôdée à la scène Jazz depuis ses quatorze ans, Helen Merrill désormais trentenaire dispose de plus d’une corde à son arc, mais son meilleur atout réside dans son timbre qu’elle ne force jamais tout en parvenant à maintenir émotion et tension de manière constante à travers des reprises convergeant entre Bop et des ballades sentimentales liées au Jazz Vocal. Mais la chanteuse dispose d’un autre as dans sa manche, elle fait fi des étiquettes et des modes se contentant bien souvent d’offrir des ensembles particulièrement équilibrés pouvant plaire aussi bien aux amateurs de West Coast Jazz qu’aux afficionados de l’Est.

Au total, six morceaux font référence à la couleur bleu (blue) ou au Blues. En guise d’ouverture, la présence de "The Blues", titre de Duke ELLINGTON tiré d’un Live au Carnegie Hall en 1943, n’est pas anodin. Sous forme de concert concept, Ellington contait les aventures de 700 noirs venus d’Haïti pour défendre Savannah durant la Guerre d’Indépendance. Si le titre sera repris à plusieurs occasions par le Duke en compagnie de Sarah Vaughan et Mahalia Jackson, Merrill nous en offre une version épurée, la trompette de Kenny Dorham décuplant l’intensité dramatique. Elle rend hommage à Hollywood avec "Am I Blue?", issu de On With The Show, l’un des premiers longs-métrages en couleur et entièrement parlant. Si Ethel Waters reste la première interprète du morceau, celui-ci tombera dans la besace de multiples registres, Eddie COCHRAN en délivra une version entre Hillbilly Rock et Rockabilly bien plus originale que les ballades à l’eau de rose généralement entendues. Helen nous en offre, selon nous, l’une des meilleures interprétations avec celle de Ruth BROWN.
Enregistré pour la première fois par Nat King COLE, "Blue Gardenia" se révèle plus souple par rapport aux covers de Dinah Washington ou Gloria Lynne, la trompette faisant toute la différence. Première compo de Feather, "You've Got a Date with the Blues" donne son titre à l’album et donne le premier rôle au piano de Jimmy Jones alors que la flûte instaure un brin de mystère.

Parmi ses titres fétiches, elle reprend "The Thrill Is Gone"* titre issu d’une série de pièces jouées à Broadway. Le rythme extrêmement lent met en valeur le jeu de guitare de Barry Galbraith. Merrill reprendra ce titre avec le Gary Peacock Trio en 71 et en 87 avec Gordon Beck. Derrière la douceur des arpèges de guitare, certains reconnaitront "When The World Was Young", adaptation américaine de Johnny Mercer de « Le chevalier de Paris » chanté par Edith Piaf. Deux autres titres apparaissent avec des intitulés français : "Vous m’éblouissez (You Go To My Head)", un standard pourtant américain de Fred Coots enregistré dès la fin des thirties par une kyrielle d’interprètes (Peggy LEE, Doris Day, SINATRA, Bryan FERRY ou Linda RONSTADT) se déguste comme une ballade extra lente rappelant certains tempos de Chet BAKER. Plus léger, "Lorsque tu m’embrasses" est en fait l’adaptation française de Jacques Plante d’un standard du Duke "Just Squeeze Me". Chanté ici en français, l’accent de l’américaine constitue une distraction amusante.

Afin d’ajuster nos comptes deux titres bleutés manquent à l’appel : "Blues In My Heart", une reprise chantée de Benny Carter surement proposée par Leonard Feather, décroche la mention du meilleur titre. Autre bonne pioche avec "The Meaning Of The Blues", compo de Bobby Troup, créateur du tube « Route 66 », une version où les arrangements encore pleins de sobriété restent d’excellents atouts. Une version bien plus palpitante que les récentes reprises de Carol Sloane, Michael Sutton ou du guitariste Joe BONAMASSA. En clôture, "Signing Off", seconde compo de Feather, se déguste comme un interlude de 90 secondes faisant office de remplissage.

Si les arrangements et l’orchestration mettent parfaitement en valeur le timbre d’Helen Merrill, la lenteur et l’orientation vers un Jazz bien propre sur lui aurait à notre sens mérité quelques étincelles. Un disque qui s’inscrit pleinement dans le wagons des productions de Jazz Vocal de la fin des années 50 mais qui évite astucieusement toute tentative d’esbrouffe au profit d’un ascétisme parfois trop prononcé. Un album à ranger entre ceux de Peggy LEE, Anita O’DAY, Carmen McRAE ou June Christy.
Note réelle 2,5.

*Titre homonyme à celui de Roy Hawkins popularisé par BB King.

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- Helen Merrill (chant)
- Barry Galbraith (guitare)
- Jimmy Jones (piano, arrangements)
- Milt Hinton (contrebasse 1-3-4-5-6-7-9)
- Al Hall (contrebasse )
- Johnny Cresci (batterie)
- Jerome Richardson (flûte, trombone 1-2-3-4-8-10-11)
- Frank Wess Flûte, Saxophone 5-6-7-9)
- Kenny Dorham (trompette 1-3)


1. The Blues (from Black,brown & Beige)
2. Am I Blue?
3. Blue Gardenia
4. You've Got A Date With The Blues
5. The Thrill Is Gone
6. (ah, The Apple Trees) When The World Was Young
7. Blues In My Heart
8. Vous M'eblouissez (you Go To My Head)
9. Lorsque Tu M'embrasses (just Squeeze Me)
10. The Meaning Of The Blues
11. Signing Off



             



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