Demain peut-être est le huitième album studio de DANAKIL. Le groupe propose toujours ce Reggae assez chaloupé et paisible chanté en français ce qui permet de bien s’imprégner des textes qui se partagent entre engagement et recherche personnelle. L’accent est mis sur une production de qualité qui fait la part belle à des arrangements puissantes et massifs mis au service de grooves relativement paisibles et envoutants.
Peu de changement dans le style de DANAKIL, c’est toujours aussi professionnel, sérieux, bien construit, et bourré de belle paroles. Nul doute que les fans du groupe trouveront leur bonheur dans ces douze nouvelles chansons.

En effet, à l’image de "Demain peut-être", le morceau qui donne son nom à l’album, nous avons là des chansons d’un Reggae soyeux qui s’écoute avec plaisir en distillant une ambiance bien agréable. Comme cela est un peu sa marque de fabrique, les thèmes de DANAKIL oscillent entre critiques sociales, leçons de vie et déclarations d’amour. Avec notamment le très « surprenant « "La démocratie balbutie" qui résonne de manière terriblement actuelle. A tel point que l’on demande si le texte ne serait pas né après la comédie politique estivale que l’on vient de vivre. Il est a noté que l’on peut trouver ce titre dans une version sur laquelle MIKE et RIKE de SINSEMILIA viennent apporter leur concours au chant.

Mais, car il y a un « mais », de mon côté, je ressors de l’écoute de cet album avec un sentiment de frustration. Ca ronronne gentiment et de manière très agréable, mais cela peine à nous bousculer, à marquer notre mémoire, du fait d’une orchestration majoritairement trop massive et unidimensionnelle. Et de rythmes qui se ressemblent presque tous. On retrouve là l’ADN de Baco Records, qui plébiscite les orchestration riches et de qualité, parfois au détriment d’une certaine spontanéité et fraicheur. Mais alors que d’habitude cela fait mouche et que l’on ne peut que se réjouir de la finesse et de la richesse des arrangements, ici, cela alourdit le propos du groupe. Le standardise. Et je regrette le manque de surprises et de prise de risque d’un disque qui s’écoule paisiblement, en peinant fortement à réellement m’accrocher et me faire vibrer.

Les surprises, les contre-pieds sont en effet très rares. On peut citer le final de "Qu'y a-t-il ?" qui apporte un peu de fraicheur du fait d’une sobriété qui tranche avec les autres morceaux. Il en va de même avec l’introduction de "Marie-Antoinette" qui distille plus d’énergie grâce à une guitare électrique et une batterie plus sèche qui se distinguent fortement de l’orchestration du reste de l’album. Et il faut attendre le dernier morceau, "Depuis le début", et ses arrangements plus sobres qui tablent essentiellement sur le chant et une guitare acoustique pour vraiment que le groupe se singularise et accroche notre attention. Et encore, au fur et à mesure que le titre avance, on sent poindre une envie irrépressible de rajouter des chœurs et des nappes musicales en fond sonore. Comme si le besoin de noyer l’identité des morceaux sous des couches d’instruments était un refuge trop tentant pour le groupe.

Dans les bons moments, on peut également citer l’introduction de "L'ordre des jours", avec sa rythmique pesante qui s’avère assez imparable et "Ca va ça vient", et son orientation légèrement Ska. Mais il n’y a pas qu’au niveau de la musique que la déception pointe un peu le bout de son nez. En exagérant un peu, certains des textes flirtent avec un côté sentencieux, et Bakil se pose parfois en vieux sage donneur de sagesse, avec un léger manque de recul. On peut toutefois louer la qualité des textes de "Marie-Antoinette" "La démocratie balbutie".

Je suis conscient que mon propos est un peu acerbe, mais DANAKIL est un nom qui pèse dans le Reggae hexagonale. Un groupe qui, par le passé, nous a montré une facette plus originale, tranchée et marquante.
Un groupe au talent indéniable dont j’attends plus que cet album très correct, à la qualité technique indiscutable et qui sent le Savoir-faire dans tous ses recoins. Mais la conclusion de ma chronique de leur dernier album pourrait encore s’appliquer ici : "Il n’en reste pas moins un bon album qui devrait satisfaire les fans du groupe, mais qui aurait certainement gagné à se montrer un peu plus épicé et déconcertant".

DANAKIL doit être un Chef de file, un éclaireur, et non pas un groupe qui se complait dans la redite de ce qu’il sait déjà, très bien, faire.
2.5/5