Tout le monde connaît les BEE GEES pour avoir écouté la bande originale de Saturday Night Fever. Pour beaucoup, ils ne se résument qu’à une usine à faire des tubes de disco. Ces préjugés doivent être balayés immédiatement de votre esprit. Toute l’histoire commence réellement en 1967. On découvre sur i]1stfi] non pas quatre mais trois garçons dans le vent. Les trois frères Gibb ont gravé à leur début une série de disques de pop qu’il ne faut surtout pas négliger. Barry Gibb, l’aîné, forme un trio fusionnel avec Robin et Maurice Gibb, ses deux frères jumeaux âgés de seulement dix-huit ans sur cet opus. En fait, 1st, produit par l’éminent Robert Stigwood, est déjà le troisième album du groupe. Ils sont jeunes, ont des voix d’anges, sont multi-instrumentistes et possèdent un talent inestimable dans l’art de composer des mélodies magiques. Un vent de fraîcheur incroyable enivre cet album à la pochette qui reflète bien l’atmosphère psychédélique de l’époque. Le style si singulier des BEE GEES sur ce disque est en effet un mélange étonnant de pop british baroque et de rock psyché.

Ah, qu’ils paraissent encore loin, les tubes disco de la fin des seventies lorsqu’on écoute "Turn Of The Century" ! Pop fraîche, pop baroque, la musique des BEE GEES est un enchantement. Les mélodies sont grisantes, les frères Gibbs chantent à merveille. Orchestration avec clavecin, orgue, instruments à corde et à vent, les arrangements ont beaucoup de panache et se mêlent parfaitement aux parties vocales harmonieuses. Les titres sont courts, les airs entêtants, l’ombre des BEATLES plane légèrement au-dessus de l'album. Mais, ce qui frappe surtout, c’est que le groupe, malgré la jeunesse de ses membres, a déjà une très forte personnalité et un style personnel qui ne cessera d’évoluer d’album en album, mais on peut déjà percevoir 1st comme une préfiguration d’Odessa, une des pièces maîtresses de leur discographie sortie en 1969.

Grâce et élégance caractérisent de nombreux morceaux comme "Holiday", "Cucumber Castle" ou "Red Chair Fade Away". L’interprétation et les harmonies sont de toute beauté. Les arrangements ont plutôt bien résisté à l’épreuve du temps, ce qui n’est pas le cas de tous les disques de pop avec orchestration. Que ce soient des ballades envoûtantes comme "One Minute Woman" et le splendide "Every Christian Lion Hearted Man Will Show You" ou des morceaux pop teintés de rock tels "In My Own Time", tous les titres sont de petits bijoux. On n’a pas vraiment le temps de s’ennuyer sur cet opus : on navigue entre chanson d’amour avec le célèbre "To Love Somebody" et chanson poignante avec l’excellent "I can’t See Nobody". La relation musicale entre les trois frères est vraiment fusionnelle : sur "New York Disaster", leurs voix à l’unisson ont de quoi faire frissonner même les plus réfractaires à la pop des sixties.

Avec ce premier disque, les BEE GEES s’imposent d’emblée comme un groupe plus que prometteur. En fait, ils ont gravé en 1967 ni plus ni moins que l’un de leurs meilleurs albums. Le vent frais et exaltant de la jeunesse souffle sur 1st et insuffle un supplément d’âme à leur musique. C'est indispensable pour ceux qui souhaitent découvrir la période pop du groupe.