Le désormais célèbre duo continue avec Brian Burton a.k.a. DANGER MOUSE (qui produit et co-écrit). Objectif: se renouveler. Rééditer l'exploit d'El Camino est un espoir vain (hymnes blues-rock concis, gras et pêchus). D'autres sentiers doivent être explorés, sinon la foule les pendra pour recours à la facilité et ils le savent.

Tout comme "Lonely Boy" nous scotchait direct par sa rupture avec l'opus précédent, "Weight of Love" tente le contrepied: plus lent, mélancolique et presque planant, son intro instrumentale de 2 minutes, ses longueurs, son duo de guitares marquent le coup. Malgré le changement d'ambiance, l'identité des BLACK KEYS est plus présente que jamais, l'écriture et la prod de Brian Burton continuent d'apposer leur patte élégante dans ce blues brut en poursuivant l'évolution du style. Bien joué!

Une mélancolie qui se confirme sur "Turn Blue". Bourdonnement de drône, piano, choeurs diaphanes... le récent divorce d'Auerbach donne le ton au disque. "Bullet in the Brain" sort du lot aussi avec son changement de rythme et sa slide bourrée de reverb. De la très bonne came, tout comme le solo psyché d' "It's Up to You Now" ou la guitare fuzz de "In our Prime" dans ce superbe fade out... Et le single, "Fever"? Il fait mouche et tombe à pic pour redonner un peu de peps et de positif. Son clavier qui fait tût-tût dans la tête toute la journée, sa deuxième partie surprenante, son beat lourd, rien à dire là dessus, ils font le job. Et ils le font vraiment bien.

Surprendre, les BLACK KEYS s'y essaient dans le chant également. La voix de Auerbach sur "Waiting on Words", moins âpre et chargée que d'habitude, ajoute une touche de douceur inattendue... et pas franchement géniale. C'est doux mais c'est mou.

La redite est hélas inévitable avec les bluesmen - le blues est par essence fondé sur les 3 mêmes sempiternels accords. Malgré leur talent et leur tripes, on ne peut que déplorer que "Year in Review" soit un copy/paste de "Dead and Gone", légèrement ralenti. "In Time" ou "10 Lovers" (le clavier qui double la voix, bof bof...) sont également un pastiche de tout ce qu'on peut trouver dans Brothers. "Gotta Get Away" est prévisible et gonflante - elle n'est d'ailleurs pas produite par DM, ceci explique sans doute cela. Ah s'ils avaient conclu par le fade out d' "In our Prime"... Mais cela ne suffit pas à gâcher le plaisir que procure l'écoute de l'ensemble.

Globalement réussi, Turn Blue souffre surtout de la comparaison avec les deux albums maousses qui le précèdent. Il indique aussi que la collaboration avec le producteur le plus couru du moment risque de s'auto-parodier rapidement. Mais le mid-tempo plein de spleen de ce disque ajoute une brique importante à leur oeuvre.

Un indispensable de 2014.