The Same Sun, le deuxième album de Sharon CORR, était pour le moins difficile à attendre, pour qui ne s'informe pas assidument, et encore... La violoniste des Corrs, prenant exemple sur sa petite sœur Andrea et devenue chanteuse soliste depuis la fin 2009, peine à nourrir l'enthousiasme et retrouver le succès qui l'avaient d'abord accueillie. Les fans du groupe, nettement partagés sur l'idée d'une carrière solo, s'étaient vite laissés entraîner à la joie, et par ailleurs continuent d'aller aux concerts, motivés par la sincérité et les sourires. Ce n'est que reflet de l'ambiance sur scène...

En revanche, côté publication, c'est plus difficile. Dream of You avait déçu une bonne partie du public : trop mou, trop «sucré». Les fans ont alors préféré se tourner vers «Dydy» Andrea, dont le second effort, un album de reprises, récupérait toutes les ovations moins d'un an plus tard. Début 2012, Sharon CORR parle d'un petit frère à Dream of You et l'annonce pour septembre. Elle mentionne des chansons écrites avec d'autres personnes, par opposition à tout ce qui a précédé, y compris l'histoire des Corrs, où elle créait seule. L'album s'imprègne de l'amour passionné qui entraîne à tenter l'impossible, et en toute logique, doit s'intituler Catch the Moon.

Il faut cependant attendre septembre 2013, soit un an de plus, pour que The Same Sun voit le jour. D'emblée, il apparaît comme révélateur d'une forte hésitation. Le titre n'est pas le même que celui annoncé. Loin du projet de collaborations, Sharon a écrit l'entièreté, à l'exception du concours occasionnel de Mitchell Froom. La confidentialité règne autour de la publication : d'abord l'Argentine et les Philippines, puis la Nouvelle-Zélande, alors que les îles britanniques doivent patienter encore jusqu'à septembre 2014... La pochette, qui semblait partir d'une bonne idée, n'offre pas l'effet escompté, c'est le moins que l'on puisse dire. D'ailleurs, l'expression «Peut mieux faire» revient ensuite tout au long de l'écoute, hélas.

Sans doute confortée par les choix d'Andrea pour certaines de ses reprises en 2011, Sharon confine son écriture à un style pop feutrée, vaguement rétro. Une touche qui transparait grâce à des intonations jazzy, placées en début d'album de préférence («Raindrops»). Le son, chaud et doux, possède une texture de vinyle, loin des canons actuels. Le groupe qui accompagne Sharon est quant à lui relégué à l'accompagnement, aucune récréation façon «Cooley's Reel» n'est proposée. La voix de Sharon elle-même, hésitante et avec les limites qu'on lui connait, peine à marquer sur la longueur, en l'absence de mélodies porteuses. Mélodies parfois belles, mais loin d'un «Radio», d'un «So Young», ou même d'un «It's Not a Dream»...

Si parfois le tempo est plus dynamique que sur la majorité des chansons de Dream of You («You Say», «We Could Be Lovers»), l'ensemble peine à s'ancrer en tête, à donner envie d'y revenir. Le tout sonne très étouffé, trop sans doute. Ce que l'univers de Sharon gagne en intimité et en éléments «smooth», il le perd en particulier à cause d'un manque de maturité question composition et arrangement. Certes, le très réputé Mitchell Froom, ancien ami de la famille et qui avait tant brillé sur le Unplugged des Corrs quinze ans plus tôt, est présent ici, sur quelques morceaux. Mais, à son tour, ce n'est pas de manière fortement remarquable, pas davantage en qualité qu'en quantité...

The Same Sun s'écoute fort bien en fond sonore, mais est-ce vraiment ce que l'on apprécie de la part de l'irlandaise, si talentueuse ? Rien de celtique ici d'ailleurs, quelques éléments country sympathiques, mais cela reste peu. Elle a voulu travailler autrement, sans aucun doute. Difficile de ravir les amateurs que l'essai précédent avait pu frustrer, cependant... «Full Circle», pourtant bien ficelé, reste significatif d'un léger manque, on ne sait où, ni de quoi. Seule une très jolie chanson de Sharon au piano, «Edge of Nowhere», diffusée en 2011, se dégage, rappelle «Butterflies» de Dream of You et arrive même à faire mieux. L'instrumental final se laisse aussi admirer...

Un album plus transparent que lumineux (eu égard du titre), éventuellement agréable mais décevant. Surtout, décevant...