Les premières réalisations d'artistes sortis de l'adolescence revêtent souvent un intérêt réel. La fougue des jeunes années est maintenant maîtrisée, les approximations ne sont plus autant permises. Les morceaux, souvent composés sur de longues années, ont été éprouvés sur scène, se sont enrichis, améliorés, au fil du temps et des expériences. Ainsi, malgré l'âge respectable de 36 ans, Dany SAUVAGEAU propose son premier album avec "Je reviens sur terre", oeuvre tendre teintée de folk, de rock et de blues. Le Québecois n'est pas pour autant un débutant. Se frottant à ses premiers publics dès l'âge de quinze ans, allant de prix en récompenses, en passant par des premières parties prestigieuses, le bonhomme vit de son art depuis le début des années 2000, et a déjà donné naissance à deux démos.

C'est riche de toutes ces expériences que Dany SAUVAGEAU offre, avec ce premier opus, un ensemble de morceaux marqués par la prédominance de la guitare, des ambiances rock affirmées et des textes très visuels, porteurs d'images cinématographiques. L'album démarre comme un western, au son du banjo du "Vieux cocher", avant que la guitare et la section rythmique ne viennent agrémenter ce titre lent, aux ambiances blues prononcées. La guitare est virtuose et participe, tout autant que la voix chaude et puissante de Dany, à faire de ce titre une indéniable réussite.

Le blues se fait très présent et transpire sur l'album, même s'il se voit à plusieurs reprises éclipsé par des ambiances rock (le survolté "Le train s'en vient") et country-folk ("Chats sauvages"). La première partie de l'album semble "facile", séduit sans réellement surprendre. Il faut attendre "La coupure", cinquième titre de l'opus, pour que l'on puisse enfin gratter sous la carapace et découvrir l'identité profonde de l'artiste. Celle-ci se fait foisonnante de sentiments, à la fois délicate et mordante. Cette ballade, "La coupure", agrémentée d'un harmonica mélancolique, est d'une splendeur mesurée époustouflante et délicieuse. Lancinante, "Le chant du capitaine" prévaut grâce à une mélodie toute en progression et un texte d'une grande beauté. "Y'as-tu rien que moé", folk enjoué, est pour sa part doté d'une mélodie imparable qui ne laisse aucune place à la demi-mesure : on adhère, et on adore.

C'est néanmoins lorsqu'il se fait plus sombre que Dany SAUVAGEAU se fait véritablement savant. La ballade "De passage", est un chef-d'oeuvre folk-rock, tout simplement, porté par la puissance mesurée de la voix du Québécois et un refrain d'une splendeur difficilement descriptible. Il faut écouter ce titre authentique et inspiré pour en prendre la pleine mesure. Dans la même veine, "L'immortel" et sa guitare virtuose confirment que, lorsqu'il s'éloigne des mélodies blues-rock "traditionnelles", l'artiste est véritablement capable du meilleur.

Cette première réalisation est mûre, aboutie, à la fois sage et enthousiaste. Avec sa voix chaude et reconnaissable et ses compositions de grande qualité, qui devraient satisfaire tous les amateurs de folk-rock bluesy, Dany SAUVAGEAU s'installe comme une valeur (déjà) sûre de la scène québécoise. En espérant que le succès sera suffisant dans la Belle Province pour donner envie à des promoteurs de venir lui faire faire un petit tour de ce côté-ci de l'Atlantique.

3,5/5